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T�moignage
Pourquoi et comment le colonel Chaabani a �t� ex�cut� ?
Publié dans Le Soir d'Algérie le 21 - 02 - 2012

Mohamed Chaabani a �t� supplici�s � l�heure des clart�s incertaines du petit jour. Il a regard� sans trembler les visages impavides des ex�cuteurs commis � ses fins derni�res. Pour lui et pour les autres qui ont �t� supplici�s seuls, dans le noir des cachots, je d�die ces lignes.�
M. C.
Mahdi Cherif, dans cette contribution � l��criture de l�histoire, va, une fois de plus, au fond des choses. L�ex�cution du jeune colonel Mohamed Chaabani apr�s une parodie de proc�s, sur ordre de Ben Bella, a d�j� fait couler beaucoup d�encre. Mahdi Ch�rif, t�moin et acteur privil�gi� des �v�nements qui se sont d�roul�s juste apr�s l�ind�pendance de l�Alg�rie, �voque cet �pisode tragique qui a marqu� la m�moire de toute une g�n�ration. En d�m�lant l��cheveau compliqu� des actes, et des raisons cach�es, des principaux protagonistes qui ont jou� un r�le d�terminant dans la dynamique qui a conduit le chef de la Wilaya VI devant le peloton d�ex�cution, il casse des tabous solides. Lorsqu�il �voque Ahmed Bencherif, ancien chef de la Gendarmerie nationale, son analyse est d�une grande s�v�rit�. Il pr�cise cependant, � nous le citons � : �A aucun moment, je ne fais la confusion entre l�homme et l�institution. La Gendarmerie nationale, corps d��lite, corps de s�curit� prestigieux de la R�publique, a fait son devoir dans les moments les plus tragiques de l�histoire r�cente de l�Alg�rie. Des hommes de courage et de conviction, officiers de la Gendarmerie nationale, ont su dire �halte !� aux d�rives et �non !� aux ukases quand Ahmed Bencherif consid�rait la gendarmerie comme un legs parental et que ses ordres contrevenaient au droit ou lorsqu�ils heurtaient leur conscience. Ils furent nombreux : Youssef Bensid, Mokrane A�t Mahdi, Lakhdar Belhadj ou encore Mohamed Touati pour ne citer que les plus connus. Le grand bourreau a d� faire appel � d�autres, proches de sa personne ceux-l�, pour sa carri�re macabre de croque-cadavres. En exhumant de l�oubli la personnalit� attachante de Mohamed Chaabani et en essayant de rendre leur juste d� � ceux qui ont jou� un r�le dans sa condamnation � mort, j�ai voulu absoudre mon �me du p�ch� de silence pour rentrer, quand l�heure sera venue, l��me en paix dans la paix du seigneur.�
R. N.
Le colonel Mohamed Chaabane dit �Chaabani� est, en 1962, le plus jeune colonel de l�ALN. Il est n� le 4 septembre I934, � Oum�che (Biskra). Successeur du colonel Ahmed Benabderrazak, dit Si El Haou�s, tomb� face � l�ennemi le 29 mars 1959 � Djebel Thameur, pr�s de Boussada, il est le chef de la Wilaya VI (Sahara) pendant les trois derni�res ann�es de la guerre de Lib�ration. Il n�a jamais voulu, sans doute par modestie naturelle, arborer l�insigne du grade de colonel que lui conf�re le GPRA en I961. Le jeune chef de la Wilaya VI paye le prix de son implication dans les concurrences qui font rage au sein du gotha politique qui s�accapare du pouvoir au lendemain de l�ind�pendance. La p�riode du 19 mars 1962 � septembre 1964, date de son ex�cution, est riche en man�uvres de toutes sortes o� le chef de la Wilaya VI est entra�n�, quelquefois malgr� lui. Alli� sinc�re et d�termin� de Ben Bella, lors de la course vers Alger, au lendemain de l�ind�pendance, il se heurte � ce dernier qui a sa propre vision sur le pouvoir, sur la fa�on de le conqu�rir, comment l�exercer et avec quels hommes l�exercer. Tr�s vite, les heurts des ambitions et les calculs des uns et des autres cr�ent une situation telle que chacun des responsables au sommet de l�Etat recherche des alliances parmi les chefs de Wilaya encore dans l�ANP, pour conforter sa position. Le jeune colonel ne sut pas rester � l��cart de l�imbroglio alg�rois qui se complique constamment. Houari Boumedi�ne ne peut envisager son action � la t�te du minist�re de la D�fense nationale sans le d�part obtenu, d�une fa�on ou d�une autre, de tous ceux qui ne rentrent pas dans le moule de l�ob�issance telle que codifi�e par lui. Il s�attaque d�abord � ceux qui se sont ligu�s contre l�EMG, apr�s la r�union inachev�e du CNRA et qui ont tent� de lui barrer la route, par les armes, en juillet-ao�t 1962 : Moh Ou El Hadj, Salah Boubnider et Hassen Khatib, puis aux autres qui lui rappellent, trop souvent � son gr�, qu�il leur doit sa deuxi�me carri�re. Le colonel Zbiri, chef de la Wilaya de l�Aur�s est fourvoy� rapidement dans une mission qui ressemble � une antichambre de mise � la retraite, la direction de l�Acad�mie de Cherchell. Chaabani, qui est l�objet de sollicitations nombreuses et int�ress�es de la part de Ben Bella et de Khider, pose un vrai probl�me � Boumedi�ne. Le chef de la Wilaya VI ne veut � aucun prix quitter son commandement � Biskra. Il ne veut pas entendre parler de l�affectation en Wilaya VI des officiers d�sign�s par Abdelkader Chabou, officier issu de l�arm�e fran�aise, qui devient apr�s l�ind�pendance le plus proche collaborateur du ministre de la D�fense. Fort du pr�jug� favorable dont il b�n�ficie aupr�s du pr�sident de la R�publique et de Mohamed Khider, Chaabani entre en conflit ouvert avec Houari Boumedi�ne. Ses griefs sont d�abord r�duits � un seul objet, puis la confrontation devenant ouverte, ils s��largissent et prennent de l�ampleur. Le premier objet de la col�re de Chaabani est la place de plus en plus pr�pond�rante, au sein du commandement de l�arm�e, des plus en vue parmi ceux qui sont venus s�int�grer � l�ALN pendant la guerre de Lib�ration. Ils sont accus�s par lui de viser, par un entrisme envahissant, tous les postes de d�cision au sein de l�ANP. Le deuxi�me congr�s du FLN, qui se d�roule dans la salle du cin�ma Afrique en avril 1964, � Alger, est pour lui l�occasion de dire tout �le bien� qu�il pense de ce parti-pris de Houari Boumedi�ne pour les quatre ou cinq officiers alg�riens qui ont fait leurs classes en Indochine, en Allemagne ou tout simplement dans les �coles de guerre fran�aises. Il voue � Chabou, � Zerguini, � Hoffman, � Boutella et surtout � Ahmed Bencherif, une m�fiance tenace. Il change cependant son jugement quand il �voque les jeunes gens qui, fuyant les casernes fran�aises, ont rejoint l�ALN pendant la guerre de Lib�ration nationale. Il n�ignore pas que ce n�est pas Houari Boumedi�ne qui les a accueillis � bras ouverts, mais bel et bien un des g�niteurs de la r�volution � et quel g�niteur ! � puisqu�il s�agit de Krim Belkacem. A Boumedi�ne qui interroge : �qu�est-ce qui est pr�f�rable, r�organiser l�arm�e avec des Alg�riens ou faire appel � des �trangers ?� Il r�torque qu�il ne vise pas ceux qui ont command�, dans les moments les plus forts de la guerre, des unit�s engag�es chaque jour contre les forces fran�aises et tout en rendant hommage aux dizaines de �DAF� morts les armes � la main aux c�t�s de leur fr�res moudjahidine. Il pr�cise : �Je vise la demi-douzaine de mercenaires qui se �cachent� derri�re Boumedi�ne, qui ont les mains libres pour tout se permettre au sein de l�ANP.� Il dit craindre que, profitant de sa position, Chabou ne soit tent�, un jour ou l�autre, par une op�ration �d�aimantage� pour attirer ceux qui ont eu le m�me parcours que le sien pour constituer une force avec laquelle il faudra compter. Sa pr�vention � l��gard de Chabou et de son entourage (�ils travaillent pour la France�) b�tie sur des jugements de valeur subjectifs, beaucoup plus que sur des �l�ments de preuves irr�futables, d�montre que le jeune chef de la Wilaya VI est � la recherche de pi�ces �rapport�es� � introduire dans son dossier et qu�il se saisit du grief �popularis� par les comp�titeurs de ces soldats de carri�re qui affirment n�avoir d�autre ambition que celle de servir l�arm�e de leur pays. Cette obsession de �la main de l��tranger� aura la vie longue. Chadli Bendjedid, le 27 novembre 2008, � Tarf, lors du colloque consacr� au cr�ateur de la Base de l�Est, Amara Bouglez, reprendra � son compte la fable de l�infiltration de la r�volution par �la promotion Lacoste�. Dans son d�sir de r�gler ses comptes avec Khaled Nezzar, qu�il cite nomm�ment, l�homme qui l�a emp�ch� de brader l�Alg�rie pour un demi-mandat, il prononce des mots d�une extr�me gravit� : �Sentant la fin de leur pr�sence sur notre sol, les Fran�ais ont pr�par� leur suppl�tifs� � L�avenir � trois d�cennies plus tard � d�montrera que cette crainte de certains maquisards, sinc�re chez Chaabani, ob�issant aux circonstances chez d�autres, de voir l�Alg�rie retomber dans l�escarcelle des Fran�ais � l�issue du �complot� ourdi par de Gaulle et muri sur le long terme, se r�v�lera infond�e. Ce sera, pour l�essentiel, les anciens �l�ves des �coles de guerre d�outre-M�diterran�e et les d�serteurs des casernes fran�aises, trop longtemps victimes de jugements injustes et outranciers, qui, devenus chefs de l�ANP, barreront la route � l�int�grisme et sauveront la R�publique. Chaabani, outre son opinion bien arr�t�e sur la poign�e de collaborateurs imm�diats de Houari Boumedi�ne, est anim� par une forte pr�vention contre les rejetons des grands notables. Il refuse de voir leurs enfants jouer des r�les pr�pond�rants dans l�Alg�rie post-ind�pendance. On constate, � l�analyse de cette conclusion chaabanienne, la survivance d�une frustration ancienne quand les r�alit�s sahariennes du temps des bureaux arabes, lorsque les grandes familles de Biskra ou de Touggourt, distingu�es et choy�es par les g�n�raux de l�arm�e d�Afrique, �taient l�interface stipendi�e de l�administration militaire fran�aise en charge du Sud alg�rien. Dans l�esprit du jeune colonel, aucun doute ne peut subsister quand � la qualit� �d�agents de la France� de Bencherif ou de Chabou. Ce dernier est fils d�un officier sup�rieur spahis, longtemps casern� � Batna. On ne peut comprendre le sentiment de col�re du successeur de Ahmed Ben Abderrazak devant les faits accomplis de Houari Boumedi�ne si on ne tient pas compte de l�habitus du groupe social o� sa prime adolescence s�est accomplie, domin�e par l�hagiographie chant�e sur tous les tons par les valets des grands guennours et des porteurs de burnous d�apparat. On ne peut comprendre l�indignation du successeur de si El Haou�s de voir Ahmed Bencherif � la t�te de la Gendarmerie nationale, si on oublie qu�il nourrit de graves soup�ons sur l�implication du beau-p�re de Bencherif � le bachagha Ahmed Lahr�che en personne � dans le renseignement obtenu par l�arm�e fran�aise sur la pr�sence dans la r�gion du Djebel Thameur, en mars 1959, des colonels Amirouche et si El Haou�s. On ne peut comprendre le sentiment qui pousse Chaabani � la r�volte si on oublie que, pour toute une g�n�ration de maquisards, la r�volution o� ils se sont jet�s corps et �me est �galement une revanche sociale. Elle a chamboul�, de fond en comble, l��chelle des valeurs admises, cass� des certitudes et attir� au-devant de la sc�ne le petit, le laiss�pour- compte, pour en faire l�auteur d�une nouvelle Histoire. Le fils du pauvre, promu par ses sacrifices, au moment o� il pense que l��re des �sidis� est d�finitivement r�volue, voil� qu�il se retrouve face au fils du ma�tre d�hier. Houari Boumedi�ne plaide sans �tat d��me l�efficacit�. Chaabani d�fend avec toute son �me la morale. L�association Boumedi�ne-Bencherif le r�volte. Bencherif, fils de grande tente, ancien sergent de l�arm�e fran�aise, naturalis� fran�ais en 1948, engag� volontaire pour l�Indochine o� il combat de 1949 � 1952, d�serte l�arm�e fran�aise au d�but de la guerre d�Alg�rie, apr�s avoir mis � sac le camp militaire o� il est affect�. Promu officier-instructeur en Wilaya IV, il est envoy� en Tunisie � cause de ses brutalit�s envers les civils et apr�s que, de son propre chef, il tue, � larme blanche, � l�insu du colonel si Mhamed, des dizaines de prisonniers kobussistes confi�s � sa garde. D�sormais commandant et collaborateur de Krim, il est charg� d�ex�cuter les colonels Lamouri, Nouaoura et Aouchria, ainsi que le commandant Mostepha Lakhal, condamn�s � mort par Houari Boumedi�ne, pr�sident du tribunal devant lequel ils comparent en 1959. Ces moudjahidine sont �trangl�s de sa propre main. Il utilise pour les mettre � mort un fil de fer qu�il passe autour de leur cou et qu�il serre jusqu�� la mort, alors qu�il dispose d�une arme � feu munie d�un silencieux. Le colonel Mohamed Aouchria r�ussit � �chapper � ses gardiens. Il court vers le mur
d�enceinte. Bencherif le rattrape. Il lui administre une terrible correction. Il le tra�ne vers l�endroit o� gisent les cadavres de Lamouri et de Ahmed Nouaoura et il lui fait subir le m�me sort. Les corps des moudjahidine supplici�s d�aussi atroce mani�re, par pure sadisme, sont jet�s par lui dans une fosse � peine ouverte. �Les chiens s�en chargeront !� est l�oraison fun�bre de leur bourreau. Si t�t Bencherif ayant quitt� les lieux, le commandant du camp entreprend de donner une s�pulture d�cente aux officiers martyrs. Bencherif, connaissant d�sormais le chemin qui m�ne � la prison de Denden, s�y rend sans �tre mandat� par personne et sans en r�f�rer � Abdelmadjid Rafa, le juge d�instruction qui a la haute main sur les p�nitenciers du GPRA. Au cours d�une de ses incursions inopin�es, il prend � partie et torture des prisonniers. Saouli Mohamed, ancien normalien, d�tenu � Denden, en conservera des s�quelles � vie. Le sulfureux Bencherif, renvoy� en Alg�rie par Krim en 1960, est bless� au cours d�un combat dans la r�gion de Sour El Ghozlane, tandis que le capitaine Fellah, son compagnon, r�siste jusqu�� la mort, lui, il l�ve les bras, se fait reconna�tre et se rend aux forces fran�aises. Il est transf�r� � Paris sur d�cision d�Edmond Michelet, ministre de la Justice du g�n�ral de Gaulle. Son transfert est obtenu par son beau-p�re et oncle, qui avait mobilis� ses amis, entre autres les Chicheportiche, Isra�lites connus � Djelfa et � Boussa�da, qui ont beaucoup d�entregent, et Jacques Chevalier, homme politique alg�rois, bien introduit au Gouvernement g�n�ral. Ces personnalit�s font valoir l�int�r�t d�utiliser Bencherif dans la strat�gie anti-FLN. Alors que le GPRA lance une grande campagne m�diatique et diplomatique pour lui sauver la vie, Bencherif joue le jeu des Fran�ais. (N�est pas Larbi Ben M�hidi qui veut !) Chaabani est r�volt� de voir l�homme qui somme Ferhat Abb�s, le 10 octobre 1960, de reprendre les n�gociations avec la France, au risque de voir la Wilaya 4 accepter une paix s�par�e avec l�arm�e fran�aise, �tre en charge d�un corps de s�curit� prestigieux de l�Alg�rie ind�pendante. Chaabani affirme que c�est le m�me Bencherif qui a jou� � l�entremetteur entre les responsables de la Wilaya IV et Charles de Gaulle. Ces contacts sont, bien s�r, destin�s � remettre en cause la coh�sion de l�ALN autour du GPRA. Gilles Meynier, dans son livre intitul� : Histoire int�rieure du FLN, 1954-1962,page 566, �voque les p�rip�ties du s�jour parisien de Ahmed Bencherif, grand �trangleur de moudjahidine devant l�Eternel et futur receleur de cadavres de colonels de l�ALN, morts au combat. La sc�ne politique alg�roise est de plus en plus en �bullition du fait de la gouvernance de Ben Bella. Fin 1963, Mohamed Khider commence � prendre ses distances avec Ben Bella qui devient dangereusement boulimique. Mohamed Khider est originaire de Biskra. Dans son souci de se concilier les bonnes gr�ces du chef de la Wilaya VI, il joue avec succ�s la carte de l�affinit� r�gionale. L�officier indign� et le politique d��u se rejoignent. Khider est d�j� � la p�riph�rie du pouvoir, mais il est encore influent. Il sugg�re la nomination de Chaabani au poste de chef d��tat- major. Chaabani r�torque qu�il serait souhaitable de r�unir les chefs des wilayas historiques afin de les faire participer � la d�signation du chef d��tat-major. Il ajoute que, dans le cas o� cette d�marche ne conviendrait pas, on pouvait toujours d�signer le plus �g� d�entre les colonels, en l�occurrence Moh Oul Hadj. Houari Boumedi�ne, craignant que, par l�entremise de Moh Oul Hadj, certains anciens du GPRA, tel Belkacem Krim, ne reviennent au pouvoir, s�oppose avec toute sa force de persuasion � la proposition de Chaabani, arguant que le poste doit revenir au chef de la Wilaya de l�Aur�s, le plus l�gitime � l�occuper. C�est ainsi que le colonel Tahar Zbiri est nomm� chef d��tat-major. Mohamed Chaabani, le colonel Abb�s et le commandant Abderrahmane Bensalem sont ses adjoints. Le d�cret n�64/88 du 4 mars 1964, paru dans le Journal officiel du 6 mars 1964, pr�cise la composition de l��tat-major g�n�ral de l�ANP ainsi que ses pr�rogatives, cr�� sur proposition du ministre de la D�fense nationale et non pas comme, on a pu l��crire ici et l�, sur d�cision unilat�rale de Ben Bella pendant un voyage � Moscou de Houari Boumedi�ne. Quelque temps plus tard, au gr� des fluctuations de ses rapports avec Ben Bella, Khider propose de nommer Chaabani ministre de la D�fense nationale. Pendant quelques semaines, l�id�e de devenir ministre de la D�fense nationale emballe Mohamed Chaabani. Il s�agite, prend des contacts, d�montre par son attitude que ce qui n�est encore qu�une vague configuration est d�j� acquis. A la villa Jolly, o� il croise Houari Boumedi�ne, le ton monte. Les deux hommes �changent des regards assassins. La tension entre les deux colonels est � son comble. Beaucoup de responsables militaires dont les colonels Tahar Zbiri, Abb�s et le commandant Sa�d Abid, essayent de faire revenir Chaabani � de meilleurs sentiments. Le colonel Tahar Zbiri fait � trois reprises le voyage de Biskra � je l�accompagne � chaque fois � pour tenter de convaincre le chef de la Wilaya VI de patienter et de parier sur une in�luctable d�cantation politique, plut�t que de tenter de la forcer dans les plus mauvaises conditions. Peine perdue ! Chaabani qui n�a que paroles de m�pris � l��gard �du planqu� de Ghardiamou� ne s�embarrasse pas de pr�cautions oratoires pour dire le fond de sa pens�e. Il d�nie � ce dernier la l�gitimit� de faire de l�arm�e son marchepied et de la restructurer � sa guise. Selon lui, la l�gitimit� � �tre le chef de l�ANP, Boumedi�ne l�a perdue le jour m�me o� il a fait ouvrir le feu sur les moudjahidine des Wilayas III et IV. Il ne s�arr�te pas � l�objection que lui aussi a �t� pr�sent sur le champ de bataille, du c�t� de M�d�a, en juillet 1962. Il argue : �Etre ministre de la D�fense, dans un gouvernement de Ben Bella, ne fait pas de lui (Boumedi�ne) une ic�ne � adorer derri�re une vitrine, mais un homme politique dont on peut critiquer l�action. Le jeune colonel, comme beaucoup d�autres avant lui, et bien d�autres apr�s lui, n�a jamais mesur� jusqu�� quel point Houari Boumedi�ne tient au pouvoir et jusqu�� quel point il est convaincu que pour le conqu�rir enti�rement et le garder jusqu�au dernier souffle de sa vie, il lui faut �tre le ma�tre absolu de l�arm�e. Cette m�connaissance du ressort profond qui fait agir Boumedi�ne causera la perte de son comp�titeur. L�exp�dition militaire contre la Wilaya VI est d�sormais sur la table de dessin de Abdelkader Chabou. Il est int�ressant de voir comment l�acc�l�ration de la dynamique de l�in�luctable �preuve de force est r�alis�e par Chabou. Lorsque toutes les parades sont en place, Chabou va pr�cipiter le moment de v�rit�, d�abord par des tentatives � peine discr�tes, sign�es Bencherif, pour circonvenir certains des cadres de la Wilaya VI et les inciter � la r�bellion. Ces man�uvres du chef de la Gendarmerie nationale mettent � vif les nerfs de Chaabani. L�incident de l�h�licopt�re fait partie du traitement � base d�aiguillons psychologiques destin� � faire monter son ire. Chaabani, d�sireux de se rendre � Biskra par la voie des airs, demande qu�il soit mis � sa disposition un h�licopt�re. Il essuie un refus, au pr�texte d�une indisponibilit� de �ventilos�. Chaabani prend la route au volant de sa Fiat 2300. Arriv� � destination, il voit un MI 04 �voluer au-dessus de l�a�rodrome de Chetma (Biskra). L�h�licopt�re atterrit. Mohamed Boutella en descend, tout sourire� Ben Bella, devant le forcing du ministre de la D�fense qui veut r�aliser la restructuration de l�arm�e et par l� m�me �liminer les derni�res figures de proue du �wilayisme�, nomme Chaabani membre du bureau politique pour conforter sa position face � celui qui veut l��liminer. La lune de miel entre le pr�sident de la R�publique et Mohamed Chaabani ne dure pas longtemps. Le changement intervint insidieusement, au gr� des humeurs fantasques de l�un et des humeurs chagrines de l�autre. Les �v�nements de Kabylie, quand A�t Ahmed s�engage dans l�opposition arm�e, viennent d�montrer � Ben Bella que Mohamed Chaabani ne sera jamais un instrument docile entre ses mains. Le chef de la Wilaya VI refuse de s�impliquer militairement contre le FFS. �On m�a eu une fois. On ne m�aura pas une deuxi�me fois� est sa r�ponse invariable � Ben Bella qui le presse d�envoyer des unit�s en Kabylie pour en d�coudre avec les partisans d�A�t Ahmed. Puis les choses s�acc�l�r�rent avec, tour � tour, la dissolution de �Djemiat al oulama du Cheikh Abdelhamid Ben Badis� puis avec le placement en r�sidence surveill�e du Cheikh Bachir El Ibrahimi. Mohamed Chaabani, qui a �t� le disciple du cheikh Ben Badis, et avec lequel il partage les m�mes valeurs spirituelles, est choqu� par une mesure que rien ne justifie. Peut-�tre Hamad�che, le B�ria du r�gime, a-t-il attribu� au v�n�rable cheikh un tract qui circule sous le manteau et qui d�nonce les professions de foi pro-sovi�tiques de Ben Bella. Le pr�sident, gris� par les hurlements des foules, imprime un autre rythme � sa d�marche pachydermique. Le fracas de la porcelaine bris�e devient un bruit de fond quotidien. La politique du �45 fillette � n��pargne ni les historiques, ni ceux qui le sont moins, ni ceux qui ne le sont pas du tout. Mohamed Chaabani exprime avec force son indignation devant le m�pris affich� par Ben Bella � l��gard de Boudiaf, de Khider, d�A�t Ahmed, de Krim, de Boussouf, de Bentobbal, de Ferhat Abb�s et des autres personnalit�s historiques. Il proteste devant l�activisme des hommes du commissaire Hammad�che qui remplissent les prisons et les camps. A la veille du 19 juin, date du renversement de Ben Bella, il y a 3 000 prisonniers d�opinion dans les prisons benbellienes. Tous ceux qui osent exprimer leur rejet d�une politique chaotique sont passibles d�une lettre de cachet. Un exemple de la parano�a qui s�est empar�e de Ben Bella est
l�enl�vement de Hadi Khediri en pleine rue et son emprisonnement � Lamb�se pendant un an sans qu�aucune accusation lui soit signifi�e. Le futur DGSN est arr�t� sur un simple soup�on. De la m�me fa�on est trait� Ahmed Taleb El Ibrahimi qui se retrouve � Sidi El Haouari sans jamais savoir pourquoi. Chaabani s�indigne des ex�cutions capitales d�opposants politiques qui se suivent � un rythme terrifiant et qui sont tenues secr�tes. Du 11 juillet au 3 septembre 1964, Ben Bella fait ex�cuter 8 opposants, tandis que ses services pr�parent les proc�s de plusieurs dizaines d�autres prisonniers d�opinion. Le pr�sident Chadli Bendjedid charge, au d�but des ann�es 1980, Abdelkrim Guehairia, officier de l�ALN et de l�ANP, cadre au minist�re des Moudjahidine, de faire exhumer les corps des supplici�s qui sont enterr�s au Carr� des martyrs. (Bendjedid leur d�cernera, � titre posthume, les plus hautes distinctions honorifiques de l�Etat). Les critiques de plus en plus s�v�res de Chaabani finissent par le rendre persona non grata au troisi�me �tage de la villa Jolly. L�heure attendue patiemment par Houari Boumedi�ne vient enfin de sonner... Pour s�parer Chaabani de ses hommes, Ben Bella somme le chef d��tat-major adjoint de rejoindre son poste. Ce dernier refuse et se retrancher au milieu de ses unit�s. Le ton monte entre les deux hommes. Les insultes fusent des deux c�t�s. �Tu n�es qu�un politicien cynique� est la r�ponse que vaut � Ben Bella sa d�cision (d�cret du 4 mars 1964) qui met fin � la qualit� de membre de l��tat-major de Chaabani. Un autre d�cret, sign� le 2 juillet I964, le casse de son grade de colonel. Au plus fort de la crise, avant les d�cisions extr�mes prises par Ben Bella contre le chef de la Wilaya VI, beaucoup de personnalit�s, et � leur t�te les colonels Zbiri et Hassen Khatib, tentent, en vain, une m�diation. Chaabani est trop engag� pour reculer, d�autant que Houari Boumedi�ne, craignant la r�ussite de ces bonnes volont�s, et jouant � l�incendiaire, envoie Mohamed Zerguini, un des DAF les plus honnis par le chef de la Wilaya VI, pour prendre le commandement des unit�s fid�les � ce dernier. Le pr�sident Gamal Abdenasser, craignant le pire pour son alli� de toujours, Ahmed Ben Bella, d�cide de s�en m�ler. Il d�l�gue aupr�s de Chaabani son ambassadeur, Ali Khachaba. La r�ponse de Chaabani est tr�s claire : �Dites � celui qui vous a mandat� mon respect et ma consid�ration. Je suis convaincu que sa d�marche est inspir�e par son souci de la stabilit� de l�Alg�rie, mais il m�est impossible de travailler avec un homme qui change dix fois par jour d�opinion.� Chaabani ne veut pas se rendre compte qu�il n�a plus d�alli� dans la place, puisque Khider a d� �galement se retirer, forc� � l�exil par le comportement de Ben Bella. Il ne veut pas se rendre compte que ceux qui ont tent� une m�diation ont fini par d�clarer forfait du fait de l�intransigeance des deux parties. Fethi Dib, chef des Moukhabarate �gyptiennes, qui esp�re pouvoir r�gler �le probl�me Chaabani� par le ricochet de Gen�ve, se rend en Suisse, pour demander, au nom du pr�sident Gamel Abdennasser, � Khider de restituer l�argent, dont il �tait un simple d�positaire, et dont il s�est empar� pour le mettre � �la disposition de l�opposition�. Fethi Dib s�entend r�pondre : �Je suis un patriote. Je viens de refuser l�aide de Sa Majest� le roi du Maroc pour l��limination de Ben Bella du pouvoir. Mon probl�me est la mani�re avec laquelle Ben Bella gouverne l�Alg�rie. Tous les hommes qui osent �mettre la moindre critique, y compris les anciens responsables historiques, sont foul�s aux pieds et emprisonn�s. Puisqu�il semble que le pr�sident Abdenasser jouirait d�une certaine consid�ration aupr�s de Ben Bella, demandez-lui d�intervenir pour faire lib�rer les personnalit�s emprisonn�es et pour que le pr�sident s�engage � mettre fin au pouvoir personnel. De la r�ponse que ce dernier lui donnera d�pendra mon retour en Alg�rie.� La r�action de Ben Bella � l��coute du compte rendu de Fethi Dib montre que les ponts sont d�finitivement coup�s avec ses opposants. Il dit � Fethi Dib : �Tous ceux qui sont emprisonn�s seront jug�s par un tribunal. Ils sont accus�s de tentative de coup d�Etat. s�ils sont condamn�s � mort, ils seront ex�cut�s. Khider lui-m�me est impliqu�. Le pr�sident exhibe un document o� il est question d�un projet de gouvernement avec Ferhat Abb�s, Khider, Boudiaf, A�t Ahmed, Ahmed Francis, Tewfik El Madani et Omar Ouzegu�ne et, bien s�r, Chaabani � la D�fense nationale. La mission de Fethi Dib s��tant conclue par un �chec, Ben Bella donne l�ordre de r�duire Chabaani par la force. La confrontation tourne � l�avantage des troupes gouvernementales, apr�s quelques escarmouches qui font deux morts � El Kantara. Les unit�s de la Wilaya VI ne sont pas tr�s motiv�es pour s�engager dans un combat fratricide. Chaabani a trop pr�sum� de ses possibilit�s. Au bout de huit jours, il est arr�t�.
L�HEURE DE AHMED BENCHERIF
Chaabani arr�t� par les hommes de Sa�d Abid est remis, sur ordre de Houari Bouedi�ne, � Ahmed Bencherif. Il est transf�r� imm�diatement � Djelfa, ligot�, les yeux band�s et couch� de force sur le plancher d�une Land Rover, les pieds de son gardien, un ancien adjudant de l�arm�e fran�aise appel� Gigi, alias Mohand Akli, pos�s sur son corps tout le long du voyage. Ahmed Bencherif suit, derri�re, dans une DS palace. Arriv� � Djelfa, Chaabani est d�abord interrog� sommairement par le m�me adjudant, sous le regard goguenard de Bencherif. Chaabani demande un caf�. Bencherif envoie un homme le ramener. Au moment o� le prisonnier tend la main pour saisir la tasse, Bencherif lui en balance le contenu � la figure. �Ceci de la part d�un ancien de l�arm�e fran�aise !� Chaabani, aveugl� par le liquide, le cingle d�un terrible : �Abna Bariss youhinouna abna Badis�, puis il se mure dans le silence. Bencherif donne ensuite la v�ritable raison de l��tape de Djelfa quand il ajoute : �Tu as fait tuer combien des miens par ici ?� Il faut savoir que les bellounistes, au moment o� ils avaient le vent en poupe dans la r�gion, �taient les bienvenus chez le bachagha Lahr�che, beau-p�re de Bencherif, lequel, peut-�tre n�en pouvait mais. Les �officiers � de Bellounis, ainsi que la majorit� des chefs harkis qui combattaient l�ALN et qui s�vissaient dans la r�gion de Djelfa avaient table ouverte chez le bachagha Lahr�che. Apr�s ce r�glement de comptes personnel de Bencherif (les hommes de la Wilaya VI n�avaient pas fait dans le d�tail en combattant les tra�tres de Bellounis), Chaabani est tranf�r� sur Oran et incarc�r� dans la prison militaire de Sidi El Houari, dans la cellule n�62. (Tout un symbole !) Dans les ge�les voisines se trouvent Ahmed Taleb El Ibrahimi, le capitaine Bouanani et peu de jours apr�s Sa�d Abadou. Les membres de l��tat-major de la Wilaya VI sont arr�t�s et transf�r�s � leur tour � Sidi El Houari, apr�s un passage par �Dar ennekhla �, la villa S�sini de B en Bella. Le choix de la prison appel�e �Sidi El Houari� n�est pas fortuit, sa sinistre r�putation, due au r�gime carc�ral moyen�geux qui y est appliqu�, est r�sum�e par le nom qu�elle porte. Le prisonnier doit ressentir � chaque heure du jour et de la nuit qu�il est livr� sans d�fense � un syst�me de murs, de portes massives, de gardiens aux visages froids, d�horaires immuablement fixes, mais qui, au-del� de ces apparences, poss�de une �me mal�fique, terrifiante de venin insidieusement distill�, celle de l�homme au regard vip�rin, dont elle porte le nom, fix� dans la p�nombre du cachot sur sa victime terrass�e.
MOHAMED HARBI, LE BIEN-PENSANT
Le 3 ao�t 1964, Houari Boumedi�ne signe, en qualit� de vice-pr�sident du Conseil des ministres et ministre de la D�fense nationale, le d�cret portant nomination des juges assesseurs devant faire partie de la cour martiale. Ce sont, dans l�ordre : le colonel Ahmed Bencherif, les commandants Abderrahmane Bensalem, Chadli Bendjedid et Sa�d Abid. Le pr�sident du tribunal, Mahmoud Zertal, conseiller � la cour d�appel, est d�sign� par le ministre de la Justice, Mohamed El Hadj Smain, par un autre d�cret sign� le m�me jour. Ahmed Dra�a est nomm� en qualit� de procureur de la R�publique. Le colonel Bencherif, d�sign� membre de la cour martiale pour veiller personnellement au verdict, et certain de ce qu�il sera, se rend dans la petite for�t de Canastel, qui a vu tant de moudjahidine tomber sous les balles de l�arm�e fran�aise, pour faire creuser la tombe de Mohamed Chaabani, avant m�me la tenue du proc�s. L�endroit choisi par Bencherif vient � bout de deux pioches, vigoureusement mani�es par les deux fossoyeurs Mohamed Ghozali et Tayeb Mrabet, tant il est dur. Lorsque les deux hommes commencent � avoir la paume des mains pleine d�ampoules, l�emplacement est abandonn� pour un autre, o� le sol est plus meuble, sous un grand pin maritime. Tandis que Bencherif est occup� � ces pr�paratifs macabres, les compagnons de Chaabani, Sa�d Abadou, Rouina Mohamed, Ch�rif Kheirredine, Amor Sakhri, Slimane Slimani, Hocine Sassi, Mohamed Tahar Laadjel, sont regroup�s dans la morgue de la prison sous bonne garde. Ils sont physiquement an�antis par les tortures qu�ils ont subies � �Dar Ennekhla�. L�-bas, ils ont eu le temps de mesurer combien Chaabani avait eu raison de s�opposer � Ben Bella. Les horreurs dont ils ont �t� les t�moins marquent encore leur m�moire. Au dernier jour de leur pr�sence dans la maison de la mort, ils ont assist� au martyre de A�ssa Messaoudi, la voix c�l�bre de la R�volution alg�rienne. �Houna El Djaza�r touhayikoum min kalb El Djeza�r� est devenu, dans la bouche des tortionnaires de A�ssa Messaoudi, et pendant que ce dernier hurlait de souffrance : �Houna El Djeza�r touhayikoum min Dar Ennekhla��. La parodie de proc�s aligne les chefs d�inculpation : haute trahison, atteinte � l�int�grit� du territoire, r�bellion arm�e, association de malfaiteurs, etc. Chaabani, abasourdi par le d�luge des fausses accusations qui s�abattent sur lui, est invit� � dire un dernier mot, il s�exprime pour assumer la responsabilit� de sa position. �j�ai d�fendu le bon droit de mon pays. Je m�en remets � Dieu.� Il r�ussira � �pargner � ses compagnons d�infortune le sort qui va �tre, dans quelques heures, le sien. Le colonel Chaabani est condamn� � mort. La d�cision est prise � la majorit� des voix, moins une voix, celle du futur pr�sident de la R�publique, Chadli Bendjedid ! Bendjedid n�a pas vot� la mort alors que Houari Boumedi�ne lui a personnellement t�l�phon� pour lui recommander, au nom de Ben Bella, de n�avoir aucune piti�. Les minutes du proc�s qui sont au minist�re de la Justice en font foi. Chadli Bendjedid prendra sur lui de faire une ultime faveur � Chaabani, lui permettre de s�entretenir avant son ex�cution avec Cherif Kheiredine. Le condamn� demande � son ami et compagnon de toujours de veiller � ce que sa m�re soit soutenue dans l��preuve et que son jeune fr�re, alors �g� de 15 ans, puisse poursuivre ses �tudes Le d�cret portant d�cision de l�ex�cution de la sentence est sign� le 3 ao�t I964, par Houari Boumedi�ne, AVANT LA TENUE DU PROC�S. Ce d�cret pr�cise les modalit�s pratiques de l�ex�cution. Houari Boumedi�ne emp�che le colonel Tahar Zbiri d�aller solliciter aupr�s de Ben Bella la gr�ce du condamn� � mort. Tahar Zbiri passe outre l�interdiction de Boumedi�ne. Dans l�illyouchine 18 qui nous emm�ne au Caire pour une r�union des chefs d�Etat arabes, le 3 septembre au matin, le colonel Zbiri revient, encore une fois, � la charge aupr�s de Ben Bella. Il ignore que la d�cision de faire ex�cuter Chaabani a �t� prise et qu�elle est irr�versible ! Chadli Bendjedid, quand il �voque, � Tarf le 27 novembre 2008, avec quels termes injurieux l�appel � la cl�mence de Sa�d Abid est re�u par Ben Bella, est encore au-dessous de la v�rit�. Ben Bella ne demande qu�� une seule personne son avis sur l�opportunit� politique de faire ex�cuter la sentence, � Mohamed Harbi. Le r�volutionnaire v�h�ment, devenu l�ic�ne de la bien-pensance alg�rienne outre M�diterran�e, conseillera, �dans l�int�r�t de la R�volution� le rejet de la gr�ce. Harbi, le lendemain de la mort de Chaabani, dira son sentiment dans un �ditorial incendiaire de R�volution Africaine. La d�cision de faire ex�cuter Mohamed Chaabani, alors que tout plaidait pour la gr�ce, est la r�sultante tragique de deux calculs. Ben Bella voulait adresser un avertissement � Boumedi�ne : �Voil� ce qui t�attend si jamais�� Boumedi�ne voulait que Ben Bella commette l�erreur de sa vie en mettant � mort un colonel de l�int�rieur, acte qui provoquera une r�probation horrifi�e, surtout chez les moudjahidine. Le colonel Mohamed Chaabani meurt courageusement � 5 heures 14 m du matin, le 3 septembre I964, apr�s avoir refus� d�avoir les yeux band�s et de demander son pardon � Ben Bella. Il regarde la mort en face. �A Dieu nous apparte�� La salve qui lui fracasse la poitrine le fait taire pour l��ternit� Le corps du supplici� subira le m�me sort que ceux des colonels Amirouche et El Haou�s. Ahmed Bencherif refusera d�indiquer l�endroit o� il l�a fait enterrer. La d�pouille sera frapp�e de s�questre pendant 20 ans. La famille du colonel Chaabani remuera ciel et terre pour la retrouver, en vain.
* Mahdi Ch�rif officier retrait�, ancien secr�taire g�n�ral de l�EMG ANP 1963 - 1967


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