[email protected] Naziha a murmur� dans l�oreille de sa fille de six ans : �Tu sais, aujourd�hui, c�est la F�te des p�res.� Maria, toute heureuse, affiche un large sourire faisant d�couvrir de ravissantes perles blanches. Elle saute au cou de son papa et le couvre de baisers au point de lui en couper le souffle, et lui dit : �Bonne f�te papa ch�ri ; je t�aime.� Emu, Mohamed serre sa fille dans ses bras, il a les larmes aux yeux. Eh, oui ! nous sommes dimanche 17 juin, et c�est en effet ce jour-l� que nous f�tons les papas. Naziha a compl�tement oubli� cette date, papa aussi, du reste. C�est sa coll�gue, alors qu�elle consultait ses messages sur le net, qui lui a souffl� un mot. - Zut ! �a m�est compl�tement sorti de la t�te. - Figure-toi que moi aussi. C�est quand m�me bizarre, la F�te des m�res, on ne l�oublie jamais, en revanche, celle des p�res, on a tendance � la zapper. M�me autour de nous, on n�en parle pas beaucoup. - J�ai int�r�t � me rattraper, sinon Mohamed prendra la mouche. Il faut dire aussi qu�il n�y a plus l��cole pour nous le rappeler. Naziha, avec la complicit� de sa gamine, tentera, en catimini, de marquer le point. La maman fera mine d�avoir pr�par� le coup depuis d�j� une semaine, que c�est une date qu�elle ne pourra jamais oublier, qu�elle avait l�intention de concocter un d�ner sp�cial aux chandelles, pourquoi pas. Que sa fille l�aidera � dresser la table, qu�elle aura l�id�e toute seule de placer des bougies sur le chandelier qu�elle mettra au centre en attendant que maman l�allume, comme papa l�a fait pour elle ce dernier dimanche du mois de mai. Ensuite, on passera au salon, et autour d�un th� � la menthe fumant, on ouvrira le cadeau que Maria offrira � son papa. Mais il n�en sera rien. Ce jour-l�, papa n��tait pas de bonne humeur, il avait d�autres chats � fouetter, et n�a m�me pas remarqu� tous les efforts qu�aura fait Naziha pour rectifier le coche. Elle a r�ussi, enfin, presque. Mohamed, lui, n�en a cure, trop pr�occup� par une r�union de travail, qui ne l�aurait pas satisfait. Les bisous de sa petite lui ont fait plaisir. Du pur bonheur ! Le reste, il n�y pr�tera m�me pas attention. Les nerfs � fleur de peau, l�apr�s-midi qui se voulait joyeuse � la hauteur de l��v�nement, s�est cl�tur�e par une dispute. De retour � la maison, le couple ira chacun de son c�t�. Lui, le t�l�phone accroch� � son oreille contactera ses amis pour pr�parer une rencontre tr�s importante ; elle, en face de ses fourneaux, triste et d��ue, mettra en route sa cocotte minute o� elle y jettera des morceaux de poulet qui accompagneront des p�tes. Maria, quant � elle, est trop occup�e avec sa p�te � modeler qui, dure comme de la pierre, n�arrive pas � en tirer quoi que ce soit. - Maman, cette p�te � modeler est de tr�s mauvaise qualit�, il faudra la rendre au magasin et en chercher une autre. - Tu as raison ma ch�rie, remets-l� dans son emballage, je m�en occuperai demain. Le poulet est cuit, les p�tes aussi, la table est dress�e dans la cuisine. Point de d�ner aux chandelles dans la salle � manger ni de cadeau surprise pour papa. La f�te, cette foi-ci a, bel et bien �t� g�ch�e. Mohamed n�en fera pas un fromage. Pour lui, les baisers de sa petite Maria, le �bonne f�te papa, je t�aime� avec son sourire ang�lique valent les plus beaux cadeaux du monde.
