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BOIRE ET MANGER EN M�DITERRAN�E AVEC PAUL BALTA
La mer des miracles et son art culinaire
Publié dans Le Soir d'Algérie le 05 - 02 - 2013

Beaucoup connaissent Paul Balta pour avoir �t� le correspondant � Alger du journal le Monde , de 1973 � 1978. Pour �tre �galement l�auteur de nombreux ouvrages. Son dernier livre (en pr�paration) promet d�ailleurs un int�ressant chapitre consacr� � cinquante heures d�entretiens avec le pr�sident Houari Boumedi�ne...
Mais ce que nombre de lecteurs ignorent, c�est que cet ami de l�Alg�rie (un pays qu�il conna�t bien et qu�il consid�re sa �troisi�me patrie�) est un �rudit pour tout ce qui concerne les deux rives de la M�diterran�e. Par exemple, Paul Balta sait donner des le�ons d�histoire qui vous mettent l�eau � la bouche. Au cours de ce dernier s�jour en Alg�rie, il vous invite non pas � (re) d�couvrir l�actualit� ou le pass� r�cent, mais � un voyage culinaire autour de la M�diterran�e. C��tait samedi dernier, � l�occasion d�une conf�rence intitul�e Boire et manger en M�diterran�e. La rencontre s�est d�roul�e � l�espace Plasti d� Alg�rie News, elle �tait organis�e en partenariat avec l�Institut fran�ais d�Alger et dans le cadre du cycle �Le monde m�diterran�en�. Apr�s Constantine et Annaba, c��tait donc Alger (en attendant Tlemcen) qui accueillait le journaliste et homme de culture venu pr�senter son ouvrage Boire et manger en M�diterran�e (�ditions Sindbad-Actes Sud, 150 pages, ann�e 2004). Lors de ce p�riple d��rudition gourmande, Paul Balta a entra�n� l�assistance sur les chemins de la gastronomie et des nourritures terrestres, sans oublier le vin, la bi�re et autres sources d�ivresse. �Un fabuleux voyage dans l�espace et dans le temps� o�, dit-il, �je raconte une histoire de la M�diterran�e � travers la nourriture et la boisson �. Ce voyage, il l�a effectu� par passion car, rappelle-t-il, d�s l�enfance il a �t� initi� � la cuisine �gyptienne, syro-libanaise, grecque, turque, fran�aise, italienne... Parce que, tout simplement, il est n� � Alexandrie, une ville cosmopolite, il y a de cela 83 ans. Il y a v�cu jusqu�� l��ge de 18 ans avant de commencer � sillonner les deux rives de la M�diterran�e. Et comme Paul Balta est issu d�une famille elle-m�me aux origines cosmopolites, il ne pouvait que s�impr�gner de diff�rentes cultures et devenir un �passeur entre les deux rives�. Dans son r�le de �passeur�, il nous invite � naturellement partager l�art de bien manger. Pour cela, il souligne dans sa le�on d�histoire : �Essentiellement p�rissable, pr�caire, �vanescente parce que quotidienne, la cuisine est, paradoxalement, l�art qui perdure par excellence. Dans cette M�diterran�e, berceau des trois religions monoth�istes r�v�l�es, le boire et le manger sont pr�sents dans les livres sacr�s � ancien testament, Evangiles, Coran � comme dans les ouvrages profanes. Ins�parables de la musique et de la danse, ils inspirent la plupart des autres arts. Expression d�une culture enracin�e dans l�histoire, la gastronomie est fille de la civilisation�. Mieux encore, la M�diterran�e est la �mer des miracles et de toutes les migrations�. Pour Paul Balta, �fruits et fleurs venus de mondes lointains se sont acclimat�s si parfaitement sur ses rives qu�ils y poussent, croit-on, de toute �ternit� ou presque, � l�instar du figuier, de l�olivier et de la vigne�. Et pourtant, fait-il savoir, ce sont les Arabes qui, par exemple, ont introduit au VIIe si�cle melons, past�ques, naring et oranges am�res. �C�est au Portugal, pr�cise-t-il, que les Arabes ont greff� l�orange am�re pour en tirer la douce qu�ils ont appel�e bortucal, terme toujours en usage.� Autre exemple : nombre de plantes originaires de Chine (comme l�amandier, le p�cher et l'abricotier) ont d�abord �t� acclimat�es dans divers pays d�Asie centrale avant de parvenir autour du bassin m�diterran�en. Quant au bl�, il nous vient du Kurdistan, le caf� d�Ethiopie, les diff�rentes �pices ont de multiples origines. Apr�s 1492, ann�e o� Christophe Colomb d�couvre l�Am�rique, il y a eu d�autres apports : les figuiers de Barbarie, les haricots rouges, la pomme de terre, les tomates, le manioc, les courges et les piments (transform�s par les M�diterran�ens en courgettes et en poivrons), les annones, l�ananas, le cacao... En 1869, l�eucalyptus �tait import� d�Australie. Paul Balta rappelle que, n�anmoins, �notre h�ritage oriental est le plus consid�rable�. D�j�, en 1226, Baghdadi (le petit neveu de Saladin) avait �crit Le livre de cuisine, un ouvrage monumental de plus de 1 000 pages. Dans cet art culinaire, il y avait �une interp�n�tration grecque, arabe et persane. L�Europe occidentale a suivi les r�gles di�t�tiques arabes elles-m�mes h�rit�es des Grecs�. Poursuivant son voyage gastronomique, il �voque la m�sopotamie o� la bi�re ferment�e remonte � 3200 ans avant J-C., �les M�sopotamiens �tant les inventeurs des tavernes�. Les Grecs, eux, ont �t� les premiers � consacrer le vin (le culte dyonisiaque). Par la suite, il y a eu des restrictions et des interdits, notamment par le juda�sme et l�islam, �la religion chr�tienne devenant moins rigoriste � partir de la renaissance�. Parmi les sp�cialit�s m�diterran�ennes, le foie gras (les anciens �gyptiens �taient les premiers � savoir le pr�parer), le couscous (il remonterait � plus de 3000 ans, au Maghreb), les grillades (barbecue), les desserts, les drag�es, la p�te feuillet�e (Turquie), le bouillon et les soupes, le chawarma et le kebab (transmis par les Ottomans), la friture (d�velopp�e par les Arabes), les falafels (invent�s en Egypte), etc. Apr�s une parenth�se sur le r�gime cr�tois (garant de long�vit� et devenu c�l�bre aux Etats- Unis depuis 1991), Paul Balta estime que �la di�te m�diterran�enne et le repas de la gastronomie fran�aise doivent �tre inscrits au patrimoine mondial de l�humanit�. D�autre part, en ces temps actuels de fast-food et de mondialisation, �nous devons d�fendre l�art culinaire et pr�server le patrimoine�. Aussi souhaite-t-il que l�Alg�rie int�gre le CICM (Conservatoire international des cuisines m�diterran�ennes), cr�� � Marseille en 1998 et qui comprend sept pays (Maroc, Espagne, Liban, Gr�ce, Tunisie, Italie et Turquie). Au terme de ce voyage autour de la M�diterran�e, l�un des berceaux de la gastronomie et de l�art de vivre, notre fin gourmet propose comme dessert ces mots savoureux : �M�me s�il vous a laiss�s sur votre faim, je souhaite que ce p�riple gastronomique vous ait mis en app�tit.� Un livre qu�il serait bon de d�guster.

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