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CHAHID ABDELKADER HAMIDA
Le militant au long cours
Publié dans Le Soir d'Algérie le 03 - 01 - 2018


Par Farouk Zahi
«Parce qu'un homme sans mémoire est un homme sans vie,
un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir.»
(Ferdinand Foch, militaire et académicien français)
Qui de nos jours pourrait nous dire qui était Abdelkader Hamida, sauf peut-être quelques-uns de ses contemporains encore en vie ? Dans la cité qui l'a vu naître, ce nom se résume à un établissement scolaire ou à une rue, il fait partie de ces innombrables sacrifiés de la cause nationale placés dans la pénombre de l'oubli. Né en 1919 dans une famille traditionaliste, soit au lendemain de la fin du premier conflit mondial où commençaient les premiers frémissements nationalistes portés par le jeune Khaled, petit-fils de l'Emir Abdelkader, il se distinguait par un esprit vif. Bou Saâda, la cité oasienne d'alors, petite bourgade de quelques milliers d'âmes, avait accueilli en ses murs l'Emir El Hachemi et sa famille en 1894, où il y séjourna jusqu'à sa mort en avril 1900. Ce bref séjour a marqué la communauté autochtone et durablement. Il organisait autour de lui des halaqate (cercles) où, sous le couvert de la spiritualité cultuelle et la lutte contre l'illettrisme, il incitait à l'éveil nationaliste. Le giron du clan Hamida foisonnait d'hommes d'érudition religieuse dont certains parmi eux, tels que Belkacem Hafnaoui, père fondateur du réformisme religieux, selon l'historien Mohamed El Korso, Abderrahmane Dissi, maître à penser de Abderrahmane Djillali, Mohamed Bisker et bien d'autres encore furent de véritables timoniers dans la houle de ce statut inique de l'indigénat, de la déculturation et de la misère. Faisant ses débuts initiatiques coraniques au koutab de la mosquée de Sidi Attia, l'enfant Abdelkader fréquentera l'unique école de garçons connue sous la dénomination Lucien Chalon, du nom de son premier directeur colonial. La communauté oasienne, loin d'être inculte, ayant compris que la nuit coloniale s'annonçait longue et éprouvante, se résigna à apprendre la langue de l'occupant, de la pratiquer et de l'enseigner à ses membres pour se prémunir des vexations et autres dénis que le fait colonial charriera dans son aveuglement dominateur. C'est ainsi que Attia Baiod sera le premier normalien à accéder, sur concours, à l'Ecole normale d'instituteurs de Bouzarèah (Enib) dès l'ouverture de l'établissement pour l'année scolaire 1865-1866. Les indigènes admis au concours ne seront que trois sur la trentaine d'Européens que comptera la promotion.( cf www.bouzarea.org). Le second instituteur autochtone fut Madani Chérif de la promotion 1879- 1882. Ce dernier, en poste dans un hameau des environs de Tizi-Ouzou, préparait concomitamment le concours d'entrée à l'Ecole supérieure d'interprétariat et, tout comme son aîné cité précédemment, il terminera sa carrière professionnelle en qualité d'interprète judiciaire. Pourquoi un tel choix pour ces deux lettrés ? La réponse est, à notre avis, en rapport avec les conditions que subissait la population dite indigène et qui vivait de durs moments dans les arcanes des tribunaux coloniaux à cause justement du handicap majeur de la langue. Ces deux premiers instituteurs firent des émules qui, au fil des années, seront au nombre de 15, de quoi encadrer une grande école de l'époque. Nous nous astreindrons à évoquer ceux qui ont chevauché les XIXe et XXe siècles. Il s'agit, notamment, de Ahmed Chemissa, dit Ben Jeridi, né en 1876 et admis à l'Ecole normale d'instituteurs sus-citée de 1891 à 1894. Après plusieurs affectations dans diverses régions du pays, il rejoint Bou Saâda en 1900. De 1907 à 1916, il sera, tour à tour, affecté à Duperré (Aïn-Defla), Aumale (Sour El-Ghozlane), Ouled Khaled (Saïda). Il réintègre sa ville natale en 1916. Décoré du Nichan El Iftikhar (distinction beylicale tunisienne), il sera admis à la retraite en 1934. Ali Chennouf, né en 1877, est admis au Cours normal de Bouzaréah de 1891 à 1894. Il est nommé en 1895 à El Hamel, sanctuaire maraboutique de la tariqa Rahmania ; dès 1896, il fera plusieurs haltes à travers le pays pour enfin rejoindre le bercail en 1909. Moussa Chennouf, né en 1875, est admis à l'Ecole normale entre 1893 et 1896. Après avoir officié à Brarcha (Tebessa), Ras El-Aïn (Sedrata), Guelaa (Akbou), il rejoindra Bou Saâda en 1918 jusqu'à sa mise à la retraite en 1939. Mohamed Benaziez, dit Ben El Mehdi, né en 1898, est, sans doute, le dernier de cette lignée de lettrés qui a investi l'école française à quelques décennies à peine du début de la colonisation. Admis en Cours normal de Bouzaréah de 1914 à 1917, il sera respectivement affecté à Ghardaïa, à Dréat (Sétifois), ensuite à Eddis (Ouled Sidi Brahim) et enfin à Bou Saâda à partir de 1931 jusqu'à son admission à la retraite. Eu regard au déficit en enseignants, on fera appel à lui, au lendemain de l'indépendance, lors de la rentrée scolaire de 1962/1963. Kireche Ahmed, dit Ben Jeddou, cadet des premiers cités, émerge, cependant, du lot grâce à une flamboyante carrière universitaire. Admis au cours normal de Bouzaréah de 1923 à 1926, il sera nommé à Djelfa de 1926 à 1929 avant d'exercer à Bou Saâda de 1929 à 1930 pour rejoindre plus tard Blida où il officiera en qualité de professeur dans le secondaire. Agrégé ès lettres, il était l'un des fondateurs de l'Ecole supérieure d'interprétariat de l'université d'Alger. Dans les activités religieuses et de bienfaisance, il se distinguera par un dynamisme marqué ; il fut de ceux qui auront initié la réalisation de la mosquée Khoulafa-Rachidine d'El Biar. Grand mécène, il recevait en post-indépendance en son domicile le célèbre récitateur du Saint Coran, Cheikh Abdelbasset Abdessamad. Pour perpétuer son souvenir, beaucoup d'enseignants, toutes générations confondues, et nombreux lettrés souhaitent donner au Centre universitaire en réalisation à Bou Saâda le nom de cet authentique intellectuel. En dépit de leur nouveau statut acquis de haute lutte, il n'était nulle question pour ces «semeurs de lumière» de troquer leur port vestimentaire traditionnel contre un quelconque complet veston à l'européenne. Une forme de résistance culturelle clairement assumée. Et c'est à la moitié des années trente (1930) que l'adolescent Abdelkader Hamida fera ses classes au mythique Cours complémentaire annexé à l'école Chalon. Il y fréquentera Mohamed Boudiaf, Ali Abdelkrim, Amar Benmebkhout, que Dieu lui prête vie encore, qui sera plus tard envoyé en Irak par le FLN, Aïssa Baiod, futur militant du PCA et l'un des fondateurs de la future Munatec (Mutuelle de l'éducation) et bien d'autres encore. Ils auront Aïssa Bisker pour illustre professeur de mathématiques, autre produit de la cité qui, après un passage à l'école Sarrouy de La Casbah et Aïn El Hadjel, sera affecté en 1936 à ce qu'on appelait alors Cours complémentaire d'enseignement général (CCEG). Il était établi comme une règle immuable que, pour la plupart des collégiens indigènes ayant accompli un deuxième cycle, seules les voies de l'Ecole normale, de l'Ecole des adjoints techniques de la santé ou de la Médersa leur été ouvertes. Le jeune Hamida optera pour la Thaâlibia de l'antique Casbah. Nourri, à la fois, aux valeurs de 1789 portées par les Robespierre, Mirabeau et de Talleyrand et celles balbutiantes de la Nahda arabo-islamique d'émancipation portées par Djamal Eddine El Afghani, Mohamed Abdou et Chakib Arslane, il quitte la Médersa deux années après avoir y été admis pour se consacrer à l'activisme politique. C'est ainsi que dès 1940, il participera activement, en compagnie d'anciens compagnons de route tels que Ali Abdelkrim, Abderrahmane Terfaya, Abdelkader Benmakhlouf et Ali Harkat, sous la bienveillante protection du capitaine Salem Hattab (ancien officier de l'armée française à la retraite), à créer le premier groupe de Scouts musulmans dénommé Faoudj El Fadhila. Voilà ce que dit de cette période épique le défunt Ali Abdelkrim dans un écrit intitulé «Une singulière école indigène... un des terreaux du nationalisme» in El Watan du 30-4-2009. Nous citons : «C'est à l'occasion d'un déplacement, alors âgé de 20 ans, à Sétif, au mois d'août 1940, que j'ai fait la connaissance d'un jeune scout, Benmahmoud Abdelkrim, et devant mon désir de connaître le mouvement Scout, il m'a accompagné au siège où j'ai été bien reçu. Durant mon séjour à Sétif, j'ai assisté aux activités et participé à deux sorties avec mes nouveaux compagnons. C'est ainsi que j'ai pu m'initier au scoutisme selon les principes de Baden Powel, créateur du mouvement, en apprenant son mode d'organisation, les chants patriotiques, les sketchs, etc.» Ammi Ali raconte plus loin son retour à Bou Saâda où il avait pris contact avec ses camarades par l'entremise du cercle de la fraternité de l'Association des Oulémas, qui avait mis à sa disposition un modeste local. L'administration, qui surveillait les faits et gestes de ces jeunes, exigeait des statuts d'association qui ne pouvaient être évidemment accordés que difficilement. Pour contourner la pierre d'achoppement que constituait l'agrément de leur association, Si Ali et ses camarades prirent la décision d'adhérer aux SMA d'Alger ; leur lieu de résidence relevait à l'époque de ce département préfectoral. Il continue son récit en écrivant : «Nous avons pris contact avec Bouzar qui dirigeait le groupe scout de la Pêcherie, qui nous avait mis en contact avec Bouras qui s'était rendu à Bou Saâda à deux ou trois reprises. Celui-ci a animé quelques-unes de nos activités et nous a accompagnés pendant les deux premières sorties et les nuits passées en pleine nature. Il nous a mis en contact avec le groupe El-Falah de La Casbah où activaient, si ma mémoire est bonne, Abderrahmane Aziz, Kaddache et d'autres dont je ne me souviens plus du nom. Instruits de la culture scoute et renforcés dans notre conviction après ce séjour, nous avons organisé des activités culturelles, pièces de théâtre et participé aux fêtes religieuses au sein des mosquées, etc. Nous participions aux conférences des Oulémas, tels cheikh Bachir El Ibrahimi et cheikh Bayodh.»
Ammi Ali nous apprend que la population autochtone acquise à la cause a aidé matériellement le groupe scout naissant, pour l'achat de tenues réglementaires, de livres sur le scoutisme et sur l'histoire d'Algérie ainsi que des instruments de musique. Il continue son récit : «Nos amis du cercle de la fraternité, Harkat Ali, Bisker Mohamed et Nadjoui Ali, nous ont servi d'instructeurs et de mourcheds dans les principes religieux et historiques. D'autres personnalités de la ville telles que Hattab Salem, Terfaia Abderrahmane, nous ont couverts au regard de l'administration coloniale qui s'interrogeait sur nos activités. En 1941, je conduisais la délégation de Bou Saâda composée de Benhamida Abdelkader, Ghiouèche Ali et moi-même à un important camp de jeunesse qui s'est tenu à El-Riadh, aux environs d'Alger, avec la participation des SMA, des scouts et éclaireurs de France. L'activité de notre dynamique groupe s'est étendue rapidement à l'ensemble des agglomérations de Bou Saâda et a rayonné sur plus de 100 km autour de la ville. Par la suite et sur instructions de Bouras, nous avons participé à la création des scouts de M'sila et de Djelfa. Suite aux relations de confiance tissées avec lui et au dévouement de notre groupe à la cause nationale, le regretté Bouras m'a invité, à titre personnel, à son domicile à Alger, pour un entretien privé au cours duquel il m'a informé de son activité patriotique, de ses sorties à l'étranger et de sa manière de s'informer. Après sa lâche exécution par le régime colonial en mai 1941, l'activité de notre groupe, douloureusement secoué, s'est quelque peu ralentie. Elle reprenait vigoureusement au lendemain du pogrom du 8 mai 1945, et ce, jusqu'au déclenchement de la lutte armée.» Fin de citation. L'activité scoute permit au jeune Abdelkader d'élargir ses horizons lui permettant ainsi de s'inscrire naturellement à la Judma, cette organisation juvénile de l'Union démocratique du manifeste algérien (Udma) de Ferhat Abbas. Cet excellent bilingue se distinguera par sa prise de parole lors du premier anniversaire de la disparition de Ali El Hammami. L'oraison sera prononcée devant une foule nombreuse, le 17 décembre 1950, au cimetière de Sidi M'hamed de Belcourt. Dans son édition n° 249 du 29-12-1950, le journal La République algérienne restitue l'évènement : «(...) Ce dimanche 17 décembre 1950, c'est un cadre de la Judma, Abdelkader Hamida, qui prononcera une allocution à la mémoire du disparu dont voici la conclusion : ‘‘Frère El Hammami, nous sommes là en cet anniversaire pour te pleurer. Nous jurons par Dieu, sur l'Algérie et sur ta tombe de poursuivre la lutte jusqu'à la victoire finale. Ce jour-là, nous viendrons à cette tombe, non pas pour te pleurer, mais pour chanter l'hymne national et te dire que le drapeau de l'Emir Abdelkader flotte sur le fronton des édifices de la République algérienne''.» Ali El Hammami ou «l'homme de Karachi» est cet immense militant que le trou noir de l'oubli a failli engloutir n'était le flair du défunt Amar Belkhodja qui lui a consacré un ouvrage de plus de 300 pages intitulé «Ali El Hammami, 1902- 1949 : Toute une vie pour l'Algérie». Le bouillonnant Abdelkader, qui était de tous les combats, fédérait l'hostilité aussi bien des supplétifs que de l'administration coloniale elle-même, représentés par le caïd et par l'administrateur de la commune mixte. Son activisme politique affiché s'exprimait à travers des articles de presse publiés régulièrement dans Egalité, le journal de l'UDMA. Lors du pogrom de mai 1945 au lendemain de la victoire des alliés sur l'Allemagne nazie, il écopa de 9 mois de prison entre la prison civile de Bou Saâda et la maison d'arrêt de Barberousse (dénomination coloniale du pénitencier de Serkadji) pour délit de distribution de tracts. Correspondant du journal La République algérienne, organe de l'UDMA, entre 1950 et 1954, il ne manquait jamais de lancer des banderilles aux tenants de l'ordre colonial. Nord-africaniste convaincu, il effectuera, lors de son retour des Lieux saints de l'Islam, en 1951, des incursions en Egypte, Libye et Tunisie. Au pays de Saâd Zaghloul, il sera reçu par le grand chanteur et compositeur Mohammed Abdelwahab. Mélomane, il joignait l'utile à l'agréable en ouvrant un commerce de disquaire sur la mythique place de Ramlaya, centre de la cité oasienne que l'ordre colonial avait baptisée du nom de Canrobert, un des sinistres enfumeurs du Dahra. Si Hamida considérait l'acte culturel comme un acte de résistance aux brimades de l'acculturation et de l'obscurantisme. Il ne serait pas inintéressant de rappeler que cette place a été longtemps l'agora de la ville. Entourée par le Café d'Alger, dont le gramophone délivrait des complaintes moyen-orientales en vogue à l'époque comprenant des métaphores lyriques telles que Ahib ychat el houria, la salle de cinéma Odéon où se tenaient les meetings et autres conclaves politiques, elle était le siège privilégiée des rencontres. A un pâté de maisons plus loin, la mosquée libre des Ouled Hamida, conduite par Cheikh Zerrouk Lograda, éveilleur de consciences, enseignant et imam, était le prolongement naturel de l'Ecole réformiste des Oulémas. Son illustre correspondant n'était autre que Cheikh Nouaïm Naïmi. D'ailleurs c'est en sa présence, un certain Ramadhan de 1953, en la demeure de Si Slimane Djoua, que fut décidé le lancement d'une souscription publique pour la réalisation de la médersa libre qui deviendra, à l'indépendance, Institut d'enseignement originel et bien plus tard lycée Abi Mizrag. Il est d'ailleurs rapporté à titre anecdotique que lors de la première collecte de fonds, le défunt Amar Kheidri dit Hadj Benkheira, riche négociant de l'époque, voulait connaître le montant collecté. On lui répondit qu'il s'élèvait à 100 000 francs. Ouvrant sa bourse, il annonce la même somme comme contribution personnelle. Nous ne manquerons pas d'évoquer à l'occasion du 32e anniversaire de la disparition de ce grand homme d'Etat qu'a été Ferhat Abbas, que la cité a été un bastion incontournable de son action politique où il comptait de nombreux militants et sympathisants. Homme de cœur, il n'omettra pas après le recouvrement de la souveraineté nationale de rendre visite à la famille du chahid Hamida. Au déclenchement de la glorieuse révolution de Novembre, Si Abdelkader prit langue avec le défunt Belmahdi Dehimi Lakhdar, cadre de l'ALN, et sillonnera en sa compagnie les pistes poudreuses du maquis naissant des monts du Hodna. Arrêté, encore une fois, il sera incarcéré au pénitencier de Berrouaghia de 1956 à 1957. A peine libéré, il se retrouve à «Haouch Lihoudi», centre d'internement et de torture au cœur de Bou Saâda, et ce, pendant cinq mois. Amoindri par la détention et harcelé par la machine répressive coloniale, il se rend à l'évidence qu'il ne lui sera plus possible d'activer au grand jour et décide de rallier le maquis de Djebel Boutaleb où Lamouri Fakani, camarade d'enfance, en était un des responsables de l'ALN. Fait prisonnier, il sera interné, en 1959, dans le sinistre camp d'internement d'El Djorf, situé à Ouled Derradj (M'sila). Disparu comme tant d'autres suppliciés, son corps ne sera jamais retrouvé. Allah yarham echouhada.


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