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INTERVIEW D�ALAIN RUSCIO
"L'esprit colonial que nous croyions chass� par la porte est revenu par la fen�tre"
Publié dans Le Soir d'Algérie le 24 - 01 - 2008

Histoire de la colonisation* , sous la direction d�Alain Ruscio et S�bastien Jahan, est un ouvrage collectif qui rassemble les r�flexions, les recherches et les enqu�tes de terrain r�alis�es par dix-sept contributeurs d�horizons diff�rents. Un cri d�alerte. Un droit de riposte aux tentatives de r��criture de l�histoire que les r�habilitateurs de la bonne conscience coloniale tentent d�imposer en France aujourd�hui. L�ouvrage identifie et analyse les enjeux mettant en garde contre les d�rives n�gationnistes et leurs cons�quences sur le devenir de la soci�t�. C�est un appel � la vigilance des citoyens pour qu�ils prennent en main leur destin. Alain Ruscio r�pond � nos questions.
Le soir d�Alg�rie : Votre Histoire de la colonisation, r�habilitations, falsifications et instrumentalisations, est un ouvrage collectif regroupant les r�flexions de diff�rents contributeurs, universitaires, journalistes, acteurs de terrain, militants associatifs. Si, comme vous l�affirmez, l�Histoire n�est pas la propri�t� des historiens, � qui appartient-elle et comment s��crit-elle ?
Alain Ruscio : Une pr�cision pr�alable : nous sommes effectivement 17 co-auteurs ; notre collectif a vu son travail coordonn� par mon jeune coll�gue S�bastien Jahan et moi. Alors, m�me si nous sommes d�mocrates, je n�ai pas la possibilit� de soumettre mes r�ponses � chacun. Je n�engage donc ici que moi. Je vois deux aspects � votre question : � qui l�histoire appartient- elle ? comment s��crit-elle ? A la premi�re, nous avons r�pondu par la composition m�me de notre �quipe. Nous avons, certes, des historiens �professionnels � � et de renom � mais �galement des observateurs du tr�s contemporain, sociologues, militants et/ou journalistes. Je dirai que, pas plus que la politique n�appartient aux politicien(ne)s, l�histoire n�est la propri�t� des sp�cialistes. C�est une question qui d�passe de loin un quelconque corporatisme : il s�agit de la pluralit� des opinions et des apports, il s�agit ni plus ni moins de la d�mocratie ! La multiplication des angles d�observation de la r�alit� est, � mon avis, une garantie de l�approche de la v�rit�. Mais � et c�est la r�ponse � la seconde partie de votre question � je ne souhaite pas non plus tomber dans le relativisme. Il y a bel et bien une sp�cificit� de la science historique. La recherche des sources �de premi�re main�, la critique de toutes sortes de documents, toutes, en y incluant des genres �nobles� et �populaires�, �majeurs� et �mineurs�, la confrontation de tous les t�moignages, tous, y compris ceux qui pourraient d�ranger une th�se pr��tablie, sont l�ABC du m�tier. Disant cela, je suis conscient qu�il y a des historiens renomm�s qui n�appliquent pas ces r�gles, et des citoyens, non universitaires, qui sont d�excellents historiens !
On assiste en France � certaines formes de r�habilitation de l�id�ologie coloniale. Qui sont ces r�habilitateurs ? Quels sont leurs objectifs ?
Dans les ann�es 1960, au moment de la grande vague de d�colonisation, il a sembl� � beaucoup que �l�Histoire avait tranch�, que les valeurs v�hicul�es par le colonialisme avaient d�finitivement �t� balay�es par les peuples vainqueurs et par leurs alli�s dans les m�tropoles. Pure illusion ! C��tait une grave sous-estimation de l�impact qu�avaient pu avoir dans les esprits des femmes et des hommes d�Occident des si�cles de racisme, de m�pris ou, dans le meilleur des cas, de paternalisme. L�esprit colonial, que nous croyions chass� par la porte, est revenu par la fen�tre. Ajoutons-y un aspect : beaucoup, de par le monde, ont cru, � tort, que la d�colonisation ouvrait l��re des lib�rations totales et d�finitives des pays anciennement domin�s. Or, le moins que l�on puisse dire est que l�enthousiasme de cette �poque a subi des chocs en nombre ! Les pi�tinements �conomiques et les errements politiques de certains pays d�Afrique et d�Asie ont sonn�, au-del� des malheurs des peuples concern�s, le glas d�un certain tiers-mondisme en Occident. Aussi certains sont-ils pass�s du triomphalisme � l�abattement. Bien � tort, � mon avis, la position juste se situant probablement � mi-chemin des deux : la reconstruction nationale et sociale des pays nouvellement lib�r�s est un processus long, qui se fait, ne l�oublions jamais, dans un environnement hostile, domin� par l�imp�rialisme, ce mot que tant d�intellectuels aujourd�hui h�sitent � employer ! Il est bien �vident qu�une frange du monde politique et des opinions, en Occident, a profit� de ce d�sarroi pour tenter de prendre sa revanche, au moins id�ologique. Les Anciens d�Indo, les partisans, nagu�re, de l�Alg�rie fran�aise, les racistes rentr�s, la frange non n�gligeable de la droite qui a des tendresses pour l�extr�me-droite, ont instrumentalis� cette situation.
Quand l�histoire est �crite par les acteurs, et c�est souvent le cas concernant les rapports alg�ro-fran�ais, il y a un risque de partialit� que seule l�objectivit� de l�historien peut d�passer. L��criture de l�Histoire par ces acteurs ne risque-t-elle pas de r�pondre � des enjeux politiques du pr�sent ?
Je vous l�ai dit : l�Histoire n�appartient pas � l�historien. Il est normal, il est sain que les acteurs �crivent. Je dirais m�me : il est indispensable. D�abord parce que c�est pour nous une source, ensuite parce que l��volution m�me des conceptions des auteurs-t�moins est en soi int�ressante. Car, bien s�r, nous ne sommes pas dupes : aucun auteur n�est neutre� encore moins lorsqu�il met � nu sa vie. Aussi l�historien doit-il �tre constamment sur ses gardes, avoir une lecture encore plus critique lorsqu�il s�agit d�ouvrages de M�moires. Un peu comme lorsqu�un policier interroge un t�moin : il ne le croit pas sur parole� et il a bien raison ! Mais, l� encore, le pluralisme est une b�n�diction pour la connaissance. Imaginez qu�un historien de la guerre d�Alg�rie, puisque vous prenez cet exemple majeur, a � sa disposition plusieurs centaines d�ouvrages de M�moires d�acteurs-t�moins des deux pays !
Pourquoi, selon vous, cinquante ans apr�s la fin de la guerre d�Alg�rie, cette r�habilitation de la m�moire coloniale ?
Je vous ai d�j� r�pondu en partie : parce que les enjeux sont actuels, parce que les v�rit�s oppos�es s�affrontent dans la m�me logique qu�en 1954-1962. J�y ajoute un ph�nom�ne g�n�rationnel : les plus jeunes des acteurs-t�moins de la guerre d�Alg�rie avaient entre 20 et 30 ans � cette �poque. Ils sont donc largement dans leur �ge m�r. Le temps des bilans est venu, et ils �prouvent le besoin naturel de faire le point, pour eux, pour leurs proches, pour l�opinion.
Votre ouvrage est une riposte aux glorificateurs de la colonisation. Vous pr�cisez qu�il ne s�agit nullement de repentance. En quoi ce terme et ce qu�il recouvre est-il contestable ?
Ce surgissement du th�me de la repentance est, je p�se mes mots, une grave l�g�ret� de la part de certains � je pense � des coll�gues universitaires � une v�ritable escroquerie de la part d�autres � et l�, j�ai en t�te des intellectuels qui courent de plateau t�l� en studio radio � . Lors d�un d�bat, � la radio, j�ai dit � l�un d�eux : �Vous enfoncez des portes ouvertes��. J�aurais pu, et m�me d�, ajouter : �Ne vous �tonnez pas de vous casser la figure, intellectuellement parlant�. On assiste � ce ph�nom�ne vraiment extraordinaire : aucun chercheur ou politique critique sur l�histoire du colonialisme ne se r�clame de la repentance (Christiane Taubira, par exemple, ne cesse de d�noncer, comme nous, ce th�me)� et l�on continue � nous la jeter � la figure. Ici, deux solutions : soit nous sommes accus�s de mensonge, de dissimulation, soit nous sommes tax�s de na�vet�. Eh bien, nous r�cusons les deux ! En quoi la repentance est-elle �trang�re � nos conceptions, � nos demandes ? Elle est un th�me moral, voire moralisateur, religieux, absolument pas une cat�gorie politique, historique. Demander la repentance signifierait que nous pensons qu�une demande de pardon effacerait l�Histoire ! Or, on n�efface pas le pass�, on l�analyse, on le critique, afin de mieux comprendre le pr�sent. Mais nous demandons, oui, que l�homo occidentalis perde de sa morgue, qu�il cesse de se draper dans sa bonne conscience d�goulinante de formules creuses, type �France pays des Droits de l�Homme�, d�menties par la r�alit� du pass� et du pr�sent. La France n�est ni le pays des Droits de l�Homme, ni le pays des crimes de masse incessants. Elle est un pays comme les autres, avec une histoire faite de zones d�ombre et de lumi�re. Que l�on cesse de se gargariser ! Et que l�on r�fl�chisse aux �effets collat�raux� de cette id�ologie. Nous demandons que les d�fenseurs des �aspects positifs de la colonisation� s�interrogent sur les effets catastrophiques des th�mes qu�ils d�fendent sur l��tat d�esprit de plusieurs millions de Fran�ais, de nos compatriotes, qui s�appellent Ali, Mourad, Diallo, Nguyen� En ce sens, le livre que nous avons fait est une contribution au maintien de la coh�sion de notre soci�t�, un appel � la d�finition d�une nouvelle� identit� fran�aise, celle du XXIe si�cle !
Propos recueillis par Meriem Nour
* Histoire de la colonisation, R�habilitations, Falsifications et Instrumentalisations, sous la direction de S�bastien Jahan et Alain Ruscio, Les Indes savantes, novembre 2007
Bibliographie
Alain Ruscio, historien, Dr �s Lettres, chercheur ind�pendant, consacre depuis des ann�es ses travaux � l�histoire de l�Indochine coloniale. Il a dirig� une �quipe internationale qui a publi� une somme bibliographique, La guerre fran�aise d�Indochine : les sources de la connaissance. Mais il travaille �galement, dans un esprit comparatiste, sur la colonisation fran�aise dans d�autres parties du monde. Il a particuli�rement port� son attention sur la notion de regard colonial : Le Credo de l�Homme blanc ; Que la France �tait belle au temps des colonies. Anthologie de la chanson coloniale fran�aise. Il dirige un Centre d�Information et de Documentation sur le Vietnam contemporain (CID Vietnam)


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