Encore une fois, Mesdames, vous vous �tes laiss� avoir par leurs beaux discours. Ils vous ont fait d'�ni�mes promesses qu'ils ne tiendront pas. Ils vous ont roul�es dans la farine, comme on dit. Pauvres petites sardines qui fr�tillent d'aise le 8 mars et passent � la po�le le jour d'apr�s. La Journ�e internationale de la femme, c'est peut-�tre bon pour les autres, celles de cet Occident d�cadent qui leur fait de plus en plus de place. Pour ces femmes, qui en sont au dernier quart d'heure de leur mouvement de lib�ration, le 8 mars signifie vraiment quelque chose. Tous les ans, elles font le bilan de leurs conqu�tes, de leurs succ�s et de leurs rares �checs. Elles ne laissent aucun homme, si providentiel soit-il, se refaire une sant� politique � leur d�triment. Elles sont n�es sous une belle �toile, me direz-vous ? Eh bien, il vous suffit juste de d�placer les �toiles, vous en �tes capables, je le sais. Vous pouvez le faire et vous en avez fourni la preuve avant 1962. Vous n'avez pas besoin de figurer aux gesticulations officielles, de servir d'alibi � des d�monstrations dont les partitions sont d�j� �crites. Que vous a-t-on dit, Mesdames, qui n'ait pas �t� ressass� et rab�ch� depuis l'ind�pendance, et m�me un peu avant. Avec le m�me langage tortueux, on vous a fait part de la difficult� du parcours, des obstacles qui entravaient votre qu�te de l'�galit�. Pour �tre s�r de vous voir repartir bredouilles, on a appel� la providence � la rescousse. A ce moment-l�, vous avez rajust� vos hidjabs, ramen� vos jambes sous vos si�ges et vous avez r�cit� la pri�re de la r�signation. Pour ne pas vous voir retourner � vos fourneaux compl�tement d�sesp�r�es, d�courag�es au point de ne plus avoir la force de glisser �le� bulletin dans l'urne, on vous a encore fait des promesses. Celles-ci pourront �tre tenues mais dans une certaine limite. Vous aurez plus d'ambassadrices, c'est certain, parce que notre corps diplomatique est plut�t vieillissant. Mais ce sera toujours dans la limite des places disponibles, comme ils disent dans les concours, sujets � caution. Si vous avez �t� d�j� ministre, et que vous avez montr� des pr�dispositions � l'emploi, vous aurez plus de chances d'obtenir des postes gratifiants et/ou convoit�s, comme Paris ou Londres. Ni trop loin, ni trop pr�s mais juste � la bonne distance, pour ne pas effaroucher les gardes-chiourme de la morale et de la tradition. On vous nommera ministres, avec obligation de tenir votre rang et de respecter strictement la discipline gouvernementale. Laissez � vos coll�gues hommes le triste privil�ge de se lancer, sous la table du conseil, les reliquats de p�tards du �Mouloud�. Ne vous m�lez pas de leurs semblants de pugilats, retransmis en direct ou en diff�r�. Ils ne font que r�citer une le�on bien apprise, ou lancer des piques et des r�pliques �crites ailleurs. Mais avant d'�tre P-dg, d�put�e ou s�natrice, m�re au foyer r�pudi�e cohabitant avec un ex-conjoint remari�, ne confondez pas abstinence et abstention. Allez voter et faire voter, si vous le pouvez, l'essentiel n'est pas de gagner ou de faire gagner mais de participer. On vous prend vraiment pour des truffes � vous marteler ce slogan : �Quand on aime l'Alg�rie on vote.� Et si vous choisissez de rester chez vous le 9 avril, cela voudra dire que vous n'aimez pas votre pays. Le jury du brevet �l�mentaire de patriotisme chauvin (BEPC en abr�g�) a des verdicts sans appel : malheur aux abstentionnistes ! (Ah, ces mots en �iste�). Bon, �a fait quand m�me pr�s d'un demi-si�cle que les m�mes bonimenteurs vous vantent leurs produits p�rim�s. Il serait temps, sans doute, d'ouvrir les yeux sur ces pratiques qui font hurler de rire le monde entier. �� nation devenue la ris�e des autres nations�, formule attitr�e des chroniqueurs arabophones pour dire leur d�sesp�rance. Nous sommes la ris�e des peuples et des nations du monde et nous nous ent�tons � conforter cette image n�gative que l'opinion mondiale a de nous. Ce qui est le plus navrant dans cette course au maintien, c'est encore une fois le manque de pudeur de nos soi-disant �lites. Ils vous regardent droit dans les yeux, la honte (1) camoufl�e derri�re des lentilles de contact sp�cial opportunistes, et vous r�citent : �Il nous faut un pouvoir omnipotent, omniscient, transcendant et p�renne. Dans dix ans, et je les soup�onne de pouvoir survivre encore au-del�, ils viendront nous dire que tout le monde a le droit de se tromper. D'accord, mais pas au point d'en faire un m�tier, voire un sacerdoce, sinon il y a un mot arabe pour �a : �tnoufiq� (2). Il regroupe tous les d�fauts en un : duplicit�, hypocrisie, dissimulation, tartufferie, et j'en passe. Il y a deux vendredis, un journaliste du quotidien londonien Al-Quds, Kamel Za�t, s'est pench� sur cette cat�gorie tr�s recherch�e d'hommes politiques qui survivent aux avanies et aux humiliations. Il se demande comment ces hommes, expuls�s parfois sans m�nagement du s�rail, ont la force de revenir et de crier encore leur attachement � leur impitoyable suzerain. Pour le quotidien, la recette pour revenir au pouvoir c'est d'avaler encore et toujours les couleuvres de la f�ale ob�issance et de la soumission. Des exemples, en veux-tu en voil�, il cite Ouyahia, d�pit� par son premier renvoi et qui a quand m�me souhait� une bonne sant� (3) au pr�sident qui venait de le flanquer dehors. Figurent aussi dans la revue des �humili�s mais fid�les� des gens comme Abdelaziz Belkhadem ou l'in�narrable Abdelkader Hadjar. Mais, ces gens-l� ont, au moins, le m�rite de rester apparemment loyaux � leur pr�sident. Que dire alors de ceux qui affectionnent les vestes retournables, acquises aux boutiques du pr�t-�-porter du FLN ? Seulement, ces vestes-l� ont tellement r�tr�ci qu'on les entend craquer de loin lorsque des �trop vite grandis� essaient de s'engoncer dedans. Un autre journal, le libanais Al-Moustakbal en l'occurrence, se charge de les mettre � nu. Evoquant ce qu'il appelle �les paradoxes de la vie politique alg�rienne �, Tahar Benyahia expose le cas des adversaires de Bouteflika en 2004, devenus ses plus chauds partisans en 2009. Il cite notamment le cas du g�n�ral Mohamed Lamari, oppos� � la r��lection de Bouteflika en 2004 et figurant au premier rang lors du show �lectoral de la Coupole en f�vrier dernier. Viennent ensuite les cadres du FLN comme Messaoud Chihoub, avec Benflis en 2004, et qui proclame ensuite que la limitation du mandat pr�sidentiel est un affront � la volont� du peuple. Il y a aussi Abderrahmane Belayat, ex-pilier central de la campagne de Benflis, et qui d�clare que seul le programme de Bouteflika peut sortir le pays de la crise. Belayat qui se retrouve en 2009, aux c�t�s de Hadjar, l'un des rares responsables du FLN � anticiper l'�chec de Benflis. Ce � quoi son ami Belayat avait r�pliqu� en affirmant qu'il ne fallait pas donner foi aux propos d'un homme, Hadjar, qui �tait �capable de sauter d'un avion en oubliant son parachute�. Voil� ce que nous offre � contempler le paysage politique de ce tardif printemps 2009, avec en filigrane l'alternative du pire. Alors, entre celui qui se jette d'un avion sans parachute et le calculateur � l'airbag, � qui vont nos sympathies, selon vous ? A. H. (1) Je n'utilise pas l'expression �toute honte bue�, parce qu'ils ne boivent plus, de peur de d�plaire au chef, ou s'ils le font, c'est en catimini et apr�s les g�nuflexions d'usage. (2) A tout hasard, j'ai commenc� � archiver tous les propos et tous les �crits, portant d�clarations d'all�geance, de cette p�riode. �a servira au moins � d�courager les biographies rafistol�es. (3) Personnellement, j'ai per�u beaucoup de ranc�ur et de cynisme dans ces v�ux de bonne sant�. En politique, on peut dire une chose et penser son contraire. CONDOL�ANCES J'ai appris avec beaucoup de peine le d�c�s de mon ami Abdelaziz Belazoug, l'a�n�, le journaliste exemplaire qu'il est rest� � mes yeux. En ces p�nibles circonstances, que sa femme Hanifa, ses enfants, Karim et Safia, et tous les membres de sa famille trouvent ici le t�moignage de ma profonde sympathie.