Nous n'avons pas de postes, mais nous avons maintenant une… agence postale itinérante. Elle vient d'être lancée par l'administration d'Algérie Poste, dans la wilaya de Tizi Ouzou. Nous n'avons pas de postes, non pas en termes de murs, mais surtout en termes de services. A l'heure de la poste banque et d'autres prestations qui en fait un service public par excellence défendu y compris par les plus irréductibles partisans du libéralisme, la poste nationale peine à assurer le plus élémentaire de ses attributs. Pourtant, l'administration postale peut très bien lancer une «agence postale itinérante» sans susciter de dérision et sans qu'on le rappelle à ses fondamentaux. Il y a deux façons, ou plutôt deux raisons de le faire. Ou el'initiativee est envisagée comme moyen de promotion. Même si vous allez à la poste, la poste peut aussi venir à vous. Mais pourquoi, diable, la poste aurait-elle besoin de promotion dans une situation de quasi-monopole ? Seconde raison d'organiser une poste tournante, une situation d'urgence, un état d'exception qui rendraient les infrastructures permanentes inopérantes. On pense bien évidemment aux cas de catastrophes naturelles, de conditions climatiques anormales et de situations sociales ou politiques insurectionnelles. En donnant le coup d'envoi à cette poste itinérante à l'université, la tutelle donne même l'étendue de son sous-développement caractéristique : non seulement elle va vers une catégorie de la société qui est loin d'être représentative de ses usagers, mais en plus elle explique le «succès de l'opération» par le fait que des étudiants aient pu à l'occasion retirer leurs bourses sans avoir à se déplacer dans les bureaux de poste de la ville ! Pour une réussite, c'en est vraiment une. On comprend mieux à présent les raisons et les motivations de l'opération : on n'a pas besoin de promotion puisque personne ne vient disputer le terrain, il n'y a aucun produit nouveau à faire connaître et il n'y a aucune situation d'exception. Alors on organise une poste itinérante pour faire semblant de faire quelque chose, alors qu'il y a tant de choses à faire pour de vrai. Et faute d'innovation, on évalue son propre succès par le seul service qui «compte», même si on n'arrive pas encore à l'assurer correctement : le retrait de l'argent. Ce ne sont sûrement pas les étudiants qui en ont le plus besoin, mais il faut bien «lancer le schmilblick» quelque part. A moins que ce ne soit pas vraiment un hasard, la maigreur des bourses pouvant cacher une toujours problématique disponibilité du liquide. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir