Quels impacts le classement du GAFI (Groupe d'action financière) sur la liste grise et noire dans la lutte contre la corruption ?    La technologie Oled décryptée pour les journalistes algériens    Vers une régulation moderne des importations et exportations    « Lorsque l'intérêt d'Israël est en jeu, l'Amérique oublie tous ses principes »    Le site nucléaire iranien de Natanz subit des dommages superficiels    La Palestine salue le rôle pionnier de l'Algérie    Entre modernité et modalités d'accession et de relégation    Gattuso devient l'improbable homme providentiel    La première journée des épreuves marquée par une bonne organisation dans les wilayas de l'Est du pays    Une date célébrée à travers plusieurs wilayas de l'est du pays    Ligue 1 Mobilis: l'USMA stoppe l'hémorragie, l'USMK enchaîne    APN: les textes adoptés renforcent l'assise législative et institutionnelle de secteurs stratégiques    Les ministres des Affaires étrangères de plusieurs pays arabes et musulmans condamnent les attaques sionistes contre l'Iran    Iran: la télévision d'Etat annonce une nouvelle salve de missiles contre l'entité sioniste    La nouvelle loi sur les mines, une avancée qualitative dans les réformes structurelles du secteur    Bentaleb reçoit le ministre jordanien de la Santé    Abaissement de l'âge de la retraite pour le personnel de l'Education, une "reconnaissance de son rôle central dans la formation des générations"    Futsal: dernier module de la formation fédérale du 28 juin au 2 juillet à Tipasa    La Direction générale des Archives nationales, un partenaire-clé de la stratégie nationale de transformation numérique    El-Oued: Quinze œuvres sélectionnées pour le 4e festival international du monodrame féminin    APN: adoption de la loi relative à la mobilisation générale    Sortie d'une nouvelle promotion du Centre de formation des troupes spéciales de Biskra    Journée mondiale de l'enfant africain: le ministère de la Solidarité nationale organise une cérémonie au Jardin d'essai du Hamma    Agression sioniste contre Ghaza: le bilan s'alourdit à 55432 martyrs    APN: adoption à la majorité du projet de loi portant règlement budgétaire pour l'exercice 2022    Conseil supérieur de la Jeunesse: une caravane pour la préservation de la biodiversité fait une halte dans la wilaya d'Illizi    Festival national du théâtre comique: 7 pièces sélectionnées pour décrocher la "grappe d'Or"    Foot/CAN féminine 2024 (décalée à 2025) : début du stage des Algériennes à Oran    C'est parti !    Ghaghaa, la fontaine oubliée... ou l'art d'assoiffer la mémoire    Du football pour le plaisir des yeux    Les lauréats de l'édition 2025 couronnés    Des chercheurs ont créé un outil pour repérer les ouvrages toxiques    L'Autorité nationale indépendante de régulation de l'audiovisuel met en garde    L'Algérie est en mesure de relever toute sorte de défis !    Une série d'accords signés entre l'Algérie et le Rwanda    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Nous souhaitons obtenir la nationalité algérienne»
Une journée avec les réfugiés maliens au camp de Timyaouin :
Publié dans Le Temps d'Algérie le 29 - 03 - 2013

Au camp des réfugiés maliens de Timyaouin, une localité se trouvant à 160 km de la ville de Bordj Badji Mokhtar, une fillette donne naissance à un bébé. La sixième naissance dans ce camp depuis son implantation il y a un peu plus d'une année. Les nouveau-nés souffrent dès leur naissance. Ici les réfugiés demandent la nationalité algérienne. Les nouvelles en provenance de la ville malienne de Tombouctou font état de l'assassinat de proches de nombre de réfugiés.
C'est mercredi que nous avons pris la route vers 7h en direction de Timyaouin, à partir de Bordj Badji Mokhtar. La chaleur est imposante. 160 km séparent les deux localités. Un chemin parcouru en trois heures de temps. La route n'est pas facile, pas tout le temps commode et surtout encore risquée du fait de tentatives d'incursions terroristes, mises en échec fort heureusement par l'armée nationale populaire (ANP), les forces et les services de sécurité algériens.
Sur cette route, tout peut arriver à n'importe quel moment. Difficile de contrôler, tout le temps, ces vastes étendues dans le désert. Au bout de 50 km, la route goudronnée prend fin. Le reste du chemin doit être parcouru en piste, c'est-à-dire sur le sable. Sur cette route, il ne faut pas s'étonner si aucun autre véhicule n'est croisé ou dépassé des heures durant. En cours de route, nous apercevons des travailleurs de l'entreprise Hydro Technique occupés par les travaux d'adjonction de canalisations et autres taches.
Cette entreprise participe au projet d'alimentation de Timyaouin en eau potable à partir de Bordj Badji Mokhtar. Un projet dont les travaux se poursuivent même sous une chaleur torride. On nous informe que plusieurs véhicules tout-terrain appartenant à cette entreprise ont été volés.
Un peu plus loin, nous apercevons des agents de sécurité armés. Il s'agit, nous dit-on, d'éléments d'une société de gardiennage travaillant pour le compte de Sonelgaz, se trouvant sur place pour la protection des travaux entrepris par cette société nationale. Aux termes de trois heures de voyage, nous arrivons à Timyaouin, ville de quelque 12 000 habitants, selon le président de l'APC. Quelques locaux commerciaux sont ouverts. La chaleur torride dissuade toute sortie dans la rue. Des chameaux rassemblés autour d'un puits étanchaient leur soif. Des habitants vaquaient à leurs occupations.
«Je suis heureux que l'Algérie ait battu le Bénin»
Arrivés au camp des réfugiés maliens de Timyaouin, nous apercevons un campement de la Gendarmerie nationale juste à l'entrée. L'Algérie protège ces réfugiés. Des enfants jouaient au ballon, les femmes étaient à l'intérieur des tentes, ou juste devant alors que d'autres lavaient des vêtements dans des bassines alimentées en eau à partir de citernes. Des personnes âgées, femmes et hommes, étaient regroupées ça et là, plongées dans la discussion.
Un enfant vient vers nous. «Je suis content car l'Algérie a battu hier (mardi, NDLR) le Bénin par trois buts à un. Je suis Aita Mohamed, et je viens de Tombouctou (ville du nord du Mali)», nous dira-t-il. «Dites, pourriez-vous nous aider à avoir des ballons et un terrain de foot ?», ajoute cet enfant de 16 ans.
«Fadimata, âgée de 2 mois, fait déjà face à la mort»
Peu à peu les réfugiés maliens de Timyaouin viennent vers nous, leur nombre augmentant au fur et à mesure. Une femme se présente : «Je suis Aït Halimatou, âgée de 70 ans et je viens de Tombouctou, moi également.» «Venez voir», lance-t-elle, en s'engageant entre des tentes. «C'est Fadimata. Une fille née il y a deux mois et qui se trouve dans un état de santé difficile. Elle ne prend même pas le lait de sa maman», nous dit-elle, nous montrant une jeune fille tenant un bébé au milieu d'autres femmes.
La maman, Makaltoum, nous dit être âgée de 18 ans. Assise près de sa mère et de sa belle-mère, à l'entrée d'une tente, elle regarde son bébé dans ses bras. La santé très fragile de ce nouveau-né est la conséquence directe des conditions de vie extrêmement difficiles vécues par cette famille malienne à Tombouctou. «Le bébé est né très faible», nous a dit la grand-mère paternelle. «Ce bébé est votre fille. C'est la fille de l'Algérie puisqu'elle est née ici. Viendra le jour où l'Algérie sera fière d'elle», poursuit-elle. Le père comme la mère sont de Tombouctou. «Nous sommes en majorité de Tombouctou, dans ce camp, même s'il y a des gens de Gao et d'autres localités du Mali», nous diront nombre de réfugiés.
La belle-mère de Makaltoum raconte pourquoi les enfants naissent très faibles. «Nos enfants naissent très faibles parce que nous souffrions de la misère et de la famine à Tombouctou. Il n'y a rien là-bas. Nous ne pouvions calmer notre faim à cause de la guerre qui s'y déroule. Nous avons choisi l'Algérie pour nous réfugier et nous souhaitons y rester», dira-t-elle. «Tombouctou est dévasté par la guerre», ajoute-t-elle.
«Ce que nous demandons, c'est que l'Algérie nous garde ici et nous accorde la nationalité algérienne. Fadimata est née ici, elle est donc Algérienne et nous souhaitons nous également devenir Algériens. Nous ne voulons pas retourner à Tombouctou», nous a-t-elle expliqué.
Le bébé de deux mois garde toujours les yeux fermés, comme plongé dans un long sommeil. «Ce bébé est très fragile et n'arrive même pas à prendre mon lait», dira Makaltoum. La grand-mère paternelle de ce bébé n'est pas la seule personne réfugiée à souhaiter rester en Algérie. «Vous croyez que l'Algérie acceptera de nous garder ici ?», nous disent Aita Mohamed, 16 ans, et Aita Mouloud, 15 ans. Les enfants nous tenant par la main ajoutent : «Pourriez-vous les convaincre de nous laisser vivre en Algérie ?» «Je ne demande rien à part un ballon et un terrain de football», ajoute cet enfant.
«Les militaires nous aiment et nous protègent»
D'autres enfants arrivent. Des femmes et des personnes âgées également. «Nous sommes contents aussi parce que l'armée nous aime et nous protège. Ils nous donnent des ballons et nous offrent des cadeaux», nous dira Aita Abdallah. Ces enfants parlaient des gendarmes postés à l'entrée de ce camp et des militaires d'une caserne se trouvant tout près de ces lieux. «Ici, ce n'est pas comme à Tombouctou.
Là bas, on a cherché à nous tuer, ici on assure notre sécurité», ajoutent Aita Mohamed et Aita Mouloud. «A Tombouctou, nous serions morts si nous y étions restés. Ils tuent des gens et volent leurs biens», disent-ils. Le sentiment de sécurité fait renouer ces enfants et leurs familles avec la vie. Le sourire revient à Aita Mohamed, Mouloud et Abdallah. Cependant, la crainte du retour à Tombouctou et d'y retrouver la même situation qu'ils ont fuie hante leur esprit.
Aït Tahar Bensalah, 80 ans : «Regardez la trace de balle sur mon épaule»
Durant notre présence dans ce camp, nous rencontrons Aït Tahar Bensalah, âgé de 80 ans. Les souffrances et la répression à Tombouctou, d'où il vient, semblent peser lourdement sur lui. Parlant difficilement, il fait descendre, côté droit de l'épaule, le léger tricot qu'il portait. «Regardez, j'ai reçu une balle à l'épaule. J'ai failli mourir. Ce sont des militaires maliens qui m'ont tiré dessus. C'est terrible ce qui se passe là-bas», nous dira-t-il.
Un autre homme nous dit : «A Gao, c'est pas mieux. Les gens étaient tués sans distinction d'âge.» Les larmes aux yeux, Tahar Bensalah tente de se relever, difficilement, avant de se rasseoir, faute de force. Les événements extrêmement douloureux vécus par lui et les autres réfugiés leur ont laissé des séquelles. Notre présence leur faisant grand plaisir, Aita Mohamed, Mouloud et Abdallah arrêtent de jouer au ballon et nous accompagnent partout dans ce camp.
Ils nous ont même servi d'«interprètes» quand nous discutions avec des réfugiés qui ne parlent ni l'arabe, ni le français. C'est eux, justement, qui traduisent les propos qui nous ont été tenus par la maman de Mama Ben Sidi, un enfant de 5 ans, né lui également très faible, alors que cette famille vivait à Tombouctou. La maman nous dira se trouver dans ce camp avec sa famille depuis une année et demie.
Lançari Abdachakour Ben Mohamed : «Mon fils est resté à Tombouctou, il a été égorgé»
Rencontré, lui également, dans ce camp, mercredi, Lançari Abdachakour Ben Mohamed, âgé de 60 ans, nous parle du deuil qui a frappé sa famille comme il a frappé de nombreuses autres au Mali. «Je suis ici avec ma famille depuis une année et deux mois. Je suis avec mon épouse, mes six fils et mes trois filles. Mon fils Lançari El Wali Mohamed, âgé de 40 ans, marié et père de 4 enfants, a préféré rester à Tombouctou. Il m'a dit qu'il veut rester dans son pays. Il a été égorgé par l'armée malienne trois jours après le lancement de l'offensive militaire française au Mali», nous dit ce réfugié.
«Ma famille est sauvée en venant en Algérie que je considère comme étant mon deuxième pays, mais j'ai perdu mon fils à jamais», lance-t-il, en sanglots. Cette scène à laquelle ont assisté Aita Mohamed, Mouloud, Abdallah et d'autres enfants est d'une tristesse indescriptible. Les enfants restaient silencieux devant le drame que Lançari Abdachakour Ben Mohamed racontait. Une scène intenable. Le premier à avoir quitté le groupe est Lançari Abdachakour Ben Mohamed, probablement pour aller pleurer en cachette, loin des regards de ces enfants.
Sixième naissance dans ce camp
La vie continue et l'espoir entretenu par ces réfugiés est toujours vivant, comme en témoignent les naissances enregistrées dans ce camp depuis son implantation. Rencontré sur place, Babouzid, membre du Croissant-Rouge algérien (CRA) mobilisé pour ce camp, nous apprend que «depuis son installation, ce camp a enregistré six naissances parmi les réfugiés maliens».
«D'autres femmes sont enceintes et donc d'autres bébés viendront au monde», l'occasion à ces familles de renouer avec le sourire et souhaiter des lendemains meilleurs. Avant de quitter les lieux, de nombreux enfants maliens viennent nous dire : «Vous croyez qu'ils accepteront de nous laisser vivre ici ?»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.