Certains auteurs de coups et blessures pointent l´index sur Satan. Celui-la désigne l´alcool. Il est rare que sur cet espace, l´on vous conte une rixe opposant des citoyens à des policiers. Pourtant cela arrive fréquemment. Or, certains officiers de police ou même des chefs de Sûreté urbaine de daïra, réussissent à calmer le jeu sur place, au poste. Malheureusement, il y en a d´autres qui ficellent un solide dossier, direction le chef de la police judiciaire, i.e le représentant du ministère public dont la mission première est l´opportunité des poursuites avec, en toile de fond, la prise de responsabilités, soit en accordant la liberté provisoire, soit la détention préventive ou une position intermédiaire: le contrôle judiciaire, de mise dorénavant à Chéraga! L´accueil au commissariat se doit d´être un modèle du genre. Du côté est de Bordj El Kiffan, un citoyen de 31 ans, avale un demi de rouge et se rend pour s´enquérir de la situation signalée sur une convocation. Puis c´est le malentendu, le flou, la rixe. Maître Benouadah Lamouri défend Nasser A., inculpé de rébellion...et qui plus est, faisant et causant des dégâts à l´encontre d´un agent en service qui traîne une blessure «pausée» par un certificat médical. «Quel est le sot des plus avertis qui puisse croire qu´il y a des citoyens qui se rendent dans les postes de police en vue d´y créer des problèmes? Aucun. Quel est le plus sot des plus renseignés qui puissent croire qu´il n´y a pas d´agents de police "hagarine"? Personne.» allait, d´emblée, s´écrier l´avocat de Dar El Beïda qui était visiblement en superforme. Et pourtant, la plaidoirie de Maître Lamouri a été plus que remarquable puisqu´elle a démarré «du respect des droits de l´Homme et a fini à celui des Algériens chez eux, simplement», marmonne le défenseur qui a flétri toute forme de violence même face à une provocation. Nasser A., 31, un blond au visage émacié, livide, sans teint, s´est vaillamment défendu d´avoir brisé l´avant- bras d´un policier qui a décliné sa responsabilité: «Je tape sur la machine à écrire lors des auditions. Donc, je ne pouvais pas être au milieu de la rixe.» La mine mi-figue, mi-raisin, sans sourire, le juge fait une mise au point que nous nous faisons un plaisir de vous transmettre: «C´est l´officier de police qui entend sur PV les convoqués». Le flic réplique qu´à treize heures, on déjeune...Puis, il raconte comment Nasser lui a fait une prise de judo menant vers une grave blessure au bras. L´inculpé jure qu´il a chuté du bureau où il avait grimpé «pour mieux m´agresser. C´est Allah qui l´a puni», a crié le détenu désespéré par la détention préventive et l´angoisse née de l´attente de son procès. Ici, il convient de noter que lors de certaines déclarations, le greffier ne suit pas...Monsieur le président a, après avoir entendu l´année de prison ferme requise par la charmante Moumrati, la procureure, relevé que la police effectue beaucoup de travail utile. «Malheureusement, nous avons devant nous un policier qui a pris la grave résolution de mal accueillir un citoyen qui s´est rendu de son propre gré, pour en savoir un peu plus sur sa fameuse convocation», a balancé Faïza Mousrati qui est allée errer dans les limites de l´inculpation, jouant à fond la solidarité avec le ministère public et donc de l´indivisibilité du siège. Opportunisme, quand tu nous tiens... D´ailleurs, dans ce «sillon», Maître Lamouri ne rate jamais une occasion pour défier un représentant du ministère public d´étaler des preuves en effectuant des demandes assommantes. Le rôle d´un procureur est avant tout, de nos jours, de montrer la voie à des étourdis, des abrutis, pas nécessairement de réprimer. Heureusement qu´il y a vous, Monsieur le président pour mettre en branle les plateaux de la balance avant d´aller au-devant de vos décisions que la défense accepte avec plaisir car, quand bien même votre verdict serait indésirable, le prévenu a, lui aussi, l´opportunité d´interjeter appel. Le juge garde son sérieux. Il connaît très bien le plaideur surtout lorsqu´il intervient haut et fort et gestes à l´appui: «J´admire ce qu´il fait», confie le sympathiaque avocat, Maître Abdelaziz Djedaâ qui attendait le début de l´audience du civil pour défendre un justiciable, victime d´une méprise... A la barre, Adlane T., un jeune témoin présent au poste, a été entendu à titre indicatif et a réussi à éclairer un tant soit peu le tribunal, agacé par les trous de mémoire de ce témoin. Et Monsieur le juge, réputé pour sa droiture lorsqu´il y a un doute, relaxe. Cette fois, il inflige six mois assortis du sursis, sans doute ayant pris en considération le fait que le demi-litre de rouge a peut-être joué dans et sur le plateau de la balance de la justice. L´avocat laisse échapper un franc sourire qui éclaire son visage aux traits las par une dure journée d´attente, avec, évidemment un rôle fou, fou, fou...