«Je ne perds pas espoir. Je connais quelqu'un qui est resté 22 ans au chômage et qui est devenu président de la République algérienne.» Aziz Smati (paraplégique après avoir échappé à un attentat en 1994) Depuis l'annonce de l'ouverture audiovisuelle aux privés, il y a quelques-uns qui suivent avec un grand intérêt la nouvelle donne du petit écran en Algérie. C'est le cas du trio Aziz Smati, Sid Ali Allalou et surtout Kamel Dynamite. Le magazine Jeune Afrique leur consacre même un vibrant hommage, mais dans les coulisses des nouvelles télévisions privées personne n'a pensé à eux. Les créateurs de Bled Music et Rock Rocky sont même considérés par certains nouveaux producteurs comme «has-been», un anglicisme généralement donné pour des artistes dépassés par la mode. Il faut le reconnaître, notre beau trio a quitté la télévision après le départ de l'Entv d'Abdou B dans les années 1990. C'est lui qui leur avait ouvert les portes du 21 boulevard des Martyrs, mais par la suite ils n'ont pas eu accès à la caméra de l'Unique. Ils ont été purement et simplement bannis de l'écran durant plus de 20 ans, de 1992 à 2012. Pour quel crime? Celui d'être créatifs, d'être des génies et des fous des Beatles et Boutaïba Sgheir. Sid Ali Allalou et Samia Benkheroubi se sont exilés à Marseille, alors qu'Aziz Smati, producteur et réalisateur de la Radio, a été victime le 14 février 1994 d'un attentat terroriste qui l'a laissé paraplégique.... à vie. Il s'installe en France et crée avec son ami Allalou «Bled connexion». Seul Kamel Dynamite, n'a pas eu cette chance, il est resté en Algérie. Après avoir fait tous les boulots à Béjaïa, il se réinstalle à Alger, décroche une pige dans un quotidien en espérant revenir à la télévision, sa véritable et grande passion. Son tort: refuser l'arabe «fosha» et parler une derdja très engagée et surtout s'habiller en militaire, ce qui n'est pas une tenue correcte exigée au 21 boulevard des Martyrs. Kamel Dynamite est un animateur explosif, comme son pseudonyme, car il ne correspond plus au standard des animateurs recrutés depuis le départ d'Abdou B. Du coup, Kamel était aux larmes et se sentait orphelin de perdre son père spirituel, son mentor, Abdou B, l'homme qui s'est battu contre les caciques et les conservateurs de l'Unique, pour ouvrir une fenêtre audiovisuelle sur le monde, puisque «Bled Music» l'émission qui s'inscrit dans la même lignée du TOP 50 de Canal+ dans les années 1980, avait ouvert la voie et donné la voix à de nombreux artistes algériens restés dans les bacs de la Chaîne III, l'occasion de sortir enfin de l'anonymat et devenir des stars dans le Maghreb et plus tard en France comme Moh KG2, Baaziz, Djalti, Moh Polyphène, T34, ou encore Mohamed Lamine ou Hassiba Amrouche. A cette époque, l'émission «Bled Music» et un peu plus tard, l'agence AVP, produisait gratuitement des clips pour ces chanteurs qui deviendront plus tard des marques déposées de l'Entv. Terrible et ingrate cette vie artistique, qui te permet de donner la voie à des artistes et de fermer un peu plus la porte de sa propre voie. «Bled Music» n'est peut-être aujourd'hui pas d'actualité, mais le trio Aziz, Allalou et Kamel a encore quelques beaux tours dans son sac, il suffit seulement de regarder vers eux. [email protected]