L'avortement, consenti ou non, entraîne une peine d'emprisonnement ou de réclusion à temps si la mort survient... Brahim Kherrabi, le président du tribunal criminel d'Alger n'avait pas éprouvé de difficultés devant un dossier d'avortement, fait prévu et puni par l'article 304 alinéa II, un article de loi si précis que durant les délibérations de l'affaire c'est le fil qui passe dans le chas sans trop de difficultés. Du monde, il y en avait à la barre, entre accusés, témoins et avocats tant ceux de la défense que de la partie civile. Le drame c'est qu'il y a eu mort de femme sur la table d'opération surtout que le résumé de l'autopsie assumée par le Dr Derouche bien assistée du Dr Guerfi et Tahraou, a fait état de blessures au niveau de la région vaginale, blessures occasionnées par des manoeuvres et surtout l'injection de plusieurs médicaments cardio-respiratoires ayant provoqué le décès. L'avocate de la partie civile, elle, a mis l'accent sur le crime commis par un groupe de «malfaiteurs», en l'occurrence les Youssef S., Karima M., Hadda. H., sa soeur Samira H. et Zineb M. 65 ans l'instigatrice des manoeuvres d'avortement et Mohammed M. que regardait avec beaucoup de...pitié. Ali B. le père de Hanane B., la victime qui s'est éteinte à l'hôpital de Baïnem (Bab El Oued). Plus tard, à l'issue du prononcé du verdict, l'avocate réclamera cinq millions de dinars à titre de dommages et intérêts. Et Maître Samia Charabi de prendre acte que les condamnés devaient verser cette somme solidairement et conjointement comme l'a décidé le tribunal criminel. Il faut dire que comme à l'accoutumée, Kherrabi a mené les débats haut la main, refusant toute dérive du procès. Il faut aussi souligner que sa tâche a été grandement facilitée par le fair-play des avocats qui ont été à la hauteur de leur réputation. Maître Attoui, Maître Cherif Chorfi, Maître Charabi et Maître Djamel Boulefrad sont à louer pour leur positive participation car aucune image n'a plané au-dessus des débats. La victime qui résidait à Bachdjarah, son fiancé de Baraki a été un important acteur du procès avec ceux qui étaient derrière le crime. Selon la maman de Samira N. cette jeune femme de 36 ans, était partie dans une voiture en 2011 avec Mohammed H., un ex-employé de l'hôpital de Béni-Messous pour obtenir un rendez-vous pour un avortement. Et c'est «Ammi Mohamed», un habitué d'opérations d'avortement, qui a été chargé d'inciter Zineb H., une sage-femme adepte d'avortements. Cette dernière avait pris attache avec un certain Djamel K. lequel avait fourni des cachets dont le Zeytotek pour avorter clandestinement. Mais tout ne roulera pas sur les rails avec le décès de Hanane. Durant les plaidoiries, les avocats ont tenu au respect des procédures et de la loi. Ils ont admirablement posé la problématique de l'avortement ayant entraîné la mort. Magistralement, pour Samira H., née le 7 Mai 1977 à Bologhine (Alger) poursuivie pour avortement, Maître Djamel Boulefrad a développé la certitude que «les deux femmes accusées, Jamila H. et Hadda Soued M., étaient absentes au moment des faits». Et l'avocat de poursuivre qu'il n'y a aucun relation de cause à effet entre le moment de l'opération fatale et la présence des deux femmes incriminées par on ne sait quel détail troublant! «Maître Boulefrad a réussi à envelopper l'attention soutenue des membres du tribunal criminel surtout celle des deux jurés à qui le conseil avait recommandé de bien revenir, lors des délibérations, «sur le rôle de chacun des accusés». Avant de réclamer un verdict qui fait honneur à la justice, surtout celle renommée d'Alger, le défenseur a voulu mieux inspirer les trois juges en entamant un véritable cours magistral autour des crimes et délits surtout lors de l'absence d'éléments constitutifs de l'article 254 et rien ne démontre que ces éléments vont droit sur l'avortement.» Les avocats se sont éreintés à vouloir restreindre le «couloir» de l'aggravation des peines réclamées par le procureur général qui a été plutôt offensif lors des débats et au réquisitoire qui aura été plus qu'incitatif. A l'issue des délibérations, Zineb H. a écopé de trois ans de réclusion ferme et les deux clientes de Maître Boulefrad ont été acquittées comme l'espérait leur défenseur qui quittera aussitôt la capitale pour un autre procès en criminelle face à Malika Djabali en superforme ce mercredi gris.