Salah jure que le responsable de l'accident a pris la poudre d'escampette... A Réghaïa, un matin, le destin frappe. Ali S. a, dans sa voiture, des membres de sa famille. Soudain, l'auto bascule. La mort est là. Ali est écroué pour homicide involontaire. A la barre, il jure que quelqu'un l'avait surpris à l'arrière par une fausse manoeuvre avant de se fondre sur le goudron... Lorsqu'à la suite d'un accident de la circulation il y a mort d'homme, la justice juge, selon la loi et la loi estime que c'est un homicide involontaire, car cela peut arriver à n'importe qui. Devant Yassine Ouezaâ, le juge de Rouiba, chargé de la correctionnelle, Salah L. a causé mort d'homme, mais il jure qu'il n'y est pour rien. Il va droit au but devant la présidente: «Je roulais au milieu de la voie rapide lorsqu'un véhicule roulant à vive allure m'a envoyé dans le fossé. Je me suis vite aperçu de la mort de mon cousin et moi, n'avais que des bobos» a récité le pauvre inculpé qui avait du mal à aller plus loin car, généralement, lorsqu'on évoque un drame, la douleur l'emporte sur le vocabulaire... Le magistrat permet à Mohamed Riad Boularaoui, le procureur, de poser des questions dont les réponses pourraient le fixer définitivement sur les demandes à effectuer. Puis, comme pour tenter de sortir de la léthargie née du drame que l'on venait de remuer, la juge demande à l'inculpé s'il avait eu le temps de voir l'auto de «l'agresseur». Salah répond par la négative, mais signale au tribunal que son véhicule était complètement réformé. Comme quoi, la vie continue puisqu'il était là ce dimanche, debout, en train de témoigner (un comble) sur tout ce qui lui est arrivé. Maître Samira Boulahia, la jeune avocate du cabinet Ksentini, a tout fait et dit pour expliquer qu'une des questions du représentant du ministère public qui avait demandé à Salah s'il était en état d'ivresse n'avait aucun sens avec les faits: «Il avait les papiers en règle le jour de l'accident. Il n'était nullement responsable du sinistre et le mandat de dépôt ne se justifiait pas», a marmonné le défenseur qui a tout de même dit que le destin l'a voulu ainsi, que le disparu était un proche de son client, père de quatre enfants. «Les liens du sang jouent en faveur de l'inculpé. A-t-il fait exprès d'entraîner le cousin avec lui sur une route pourtant bien tracée pour...l'assassiner? Non, le destin l'aura voulu. Et puis, où est passé le chauffard responsable de la mort d'un citoyen? Mon client n'a commis aucune faute, même si le représentant du ministère public a parlé d'une absence de maîtrise du volant», a enchaîné la jolie avocate à la mine triste. Boularaoui, le parquetier, aura une pertinente réplique à propos de la maîtrise de la tenue de route. «Si l'inculpé avait respecté la limitation de vitesse, le véhicule ne se serait jamais renversé. C'est de la pure négligence!» avait articulé le procureur qui a requis la peine maximum prévue par la loi. L'avocat de la partie civile, Maître Ahmed Benantar, loi oblige, n'a pas plaidé, mais remis des demandes écrites à Ouazaâ qui a préféré temporiser et ne pas énoncer le verdict sur le siège. Elle le lit en fin d'audience. L'inculpé qui espérait la relaxe réclamée par son avocat, est condamné à une peine de prison assortie du sursis, car le tribunal a retenu la négligence et donc suivi la logique du représentant du ministère public surtout que ces derniers temps, les accidents de la route sont en tête des causes de décès de morts violentes, de disparitions de jeunes et surtout d'enracinements de deuils et de multiplications d'orphelins, de veuves souvent très jeunes et donc, ayant perdu un avenir plutôt rassurant. Sauf que sur nos routes, la mort rôde. Elle frappe sans discernement, notamment les amateurs de vitesse, ces «tueurs-involontaires» et souvent...volontaires lorsque ces automobilistes prennent un verre et le...volant! Catastrophe!.