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L'Algérie face au défi (1e partie)
EVANGELISATION DU MONDE
Publié dans L'Expression le 29 - 08 - 2004

«Je ne suis ni chrétien, ni juif, ni farsi, ni musulman. Je ne suis ni d´Orient ni d´Occident. Ma place est ce qui est sans place.
Ma trace est ce qui est sans trace [....] J´ai écarté la dualité. J´ai vu que les deux mondes ne font qu´un. Je cherche l´Un, je connais l´Un, je vois l´Un, j´invoque l´Un. Il est le Principe, Il est la Fin. Il est l´Extérieur, Il est l´Intérieur». (Djallal Eddine Erroumi)
Depuis quelques mois, l'annonce récurrente d'une «évangélisation de la Kabylie», nous a incité à tenter de comprendre ce qui se passe. Pour cela, nous avons tenté de reconstruire, à grand trait, l'histoire religieuse du Maghreb et de ses habitants. Nous nous sommes aperçus que le phénomène d'évangélisation était planétaire sous-tendu par la puissance de l'argent et du messianisme américain. Il n'est pas spécifique à l'Algérie. La plupart des pays africains, même musulmans, vivent la même situation.
Malgré toutes les hypothèses faites, l'état des connaissances ne nous permet de faire que des conjectures sur l'origine des Berbères. L'essentiel des mouvements se serait réalisé à la fin du paléolithique et au néolithique. L'une des hypothèses faites est que pour certains auteurs, l'origine des Berbères remonterait à une époque bien antérieure à 3300 ans avant-Jésus-Christ. Les Egyptiens eurent à repousser des luttes avec les Libyens, vers 1227, avant-Jésus-Christ. Ce peuple unique parait avoir habité, dés la plus Haute Antiquité, l'Afrique septentrionale. Cette race autochtone se retrouve encore intacte sur le littoral de la mer Rouge et les oasis du Maroc, de l'Algérie, de la Tunisie, de la Tripolitaine et de la Cyrénaïque. Elle y porte différents noms: Berbère, Tibou, Imouchar, Touareg, Chleuh, Kabyle, Chaouia, Maure.(1)
Pour Ibn Khaldoun, l'origine des Berbères est orientale: «...Les Berbères sont les enfants de Canaan , fils de Noé ; leur aïeul se nommait Mazir, ils avaient pour frères les Gergésiens et étaient parents des Philistins, enfants de Kalashulim, fils de Mesraïm. Le Roi, chez eux, portait le titre de Goliath».(2)
Les cultes berbères au Maghreb
Les multiples sépultures trouvées au Maghreb, témoignent de l'existence d'un «rite» ou d'une sorte de religion avec l'idée de l'Au-delà. Déjà, il y a près de 20.000 ans, les habitants du Maghreb avaient le respect des morts. S.Hachi a retrouvé, comme nous l'avons écrit plus haut, des sépultures dans les grottes de Mechta Affalou . C'est ainsi que les morts étaient enterrés avec soin sous différentes sépultures, telles que les dolmens aux couverts monolithiques ou comme le rapporte Kaddache, sous des chouchets (sorte de calotte, tour cylindrique).(3).
Les sites rupestres font encore, de nos jours, comme beaucoup de sites archéologiques, l'objet de croyances populaires demeurées vivaces. Comme l'écrit F.K.Kadra au sujet des Djedars, monuments funéraires berbères, ces croyances (...) relèvent d'un fond traditionnel commun à l'ensemble du Maghreb.(4).
Bien avant la venue des Romains, les Berbères avaient des pratiques religieuses qui ont, d'une certaine façon, été «enrichies» par les cultes barbares et sanguinaires des Phéniciens. Par la suite, les Berbères ont adopté les dieux phéniciens dont les plus importants furent Bal Hammon et Tanit Péné Baal, la déesse. Ils passèrent ainsi, sous l'influence possible de Carthage, de l'animisme agraire à un polythéisme plus organisé.(5).
A la même période, une religion naissait, au coeur du Moyen-Orient, il s'agit du judaïsme. La révélation de cette religion est en fait l'histoire des tribus d'Israël, et s'étale sur plusieurs siècles. Cette population juive, venue vraisemblablement par la mer, habitait le littoral libyen, il y avait une autre population à l'intérieur du pays, berbère d'origine qui, elle aussi, a été graduellement gagnée à la religion juive. Une tradition locale attribue l'arrivée des juifs dans l'île de Djerba, à l'époque du premier exil sous Nabuchodonosor. Il y existait au début du siècle (1913), une synagogue «Lalla Ghriba» dont on fait remonter la construction à cette époque.(6).
Après la destruction de Carthage en 148 avant-Jésus- Christ, les Romains envahirent progressivement l'Africa Nova puis, la Numidie et les trois Maurétanies (sétifiennes, césariennes, et tingitanes). La conduite des Romains, en matière religieuse, une tolérance pour les cultes autochtones. Le règne de la dynastie romaine des Sévère, au début du troisième siècle marque l'apogée de l'Afrique romaine. Septime Sévère était d'ailleurs un Africain originaire de Tripolitaine (Libye actuelle), et sa soeur ne parlait que berbère quand elle arriva à Rome. L'Eglise a commencé à s'établir, graduellement, avec la disparition des rites païens. En 411, date de la conférence épiscopale de Carthage, celle-ci réunit catholiques et donatistes. La date de 553, est la dernière qui témoigne de Cuicul chrétienne.(7).
On est en droit de penser que si les Berbères se convertirent facilement au christianisme, ils le firent parce que cette religion était, à ses débuts, la religion des faibles et des opprimés. De plus, elle prônait la justice sociale. C'était alors pour les indigènes un moyen d'expression de leurs revendications. Les Berbères se détachèrent de l'Eglise «officielle», représentée par saint Augustin le jour où elle devint l'alliée du pouvoir. Ils prirent fait et cause pour le donatisme. Donat mena une vie simple et pauvre, vêtu d'une simple robe de laine, il parcourt tout le pays; la Numidie et l'Aurès pour prêcher, former et organiser la résistance.
Masqueray, parlant de la «foi tactique» des Berbères, écrit: «Ces derniers avaient embrassé le christianisme d'autant plus volontiers qu'ils trouvaient là une nouvelle manière de protester contre leurs maîtres païens». Les Chefs donatistes étaient des révoltés par rapport à l'autorité romaine, alliée de l'Eglise officielle. Quant aux Indigènes (les Berbères ), Mesnage écrit: «C'était toujours des vaincus frémissant sous le joug; on proteste comme on peut contre le joug qui oppresse; ne point parler la langue du maître, c'est déjà se séparer de lui par quelque chose d'essentiel, mais, prier autrement que lui, est beaucoup plus encore, car cela constitue une révolte morale qui satisfait bien mieux les sentiments de nationalité».(8).
En définitive et comme conclut Mesnage: «On éprouve deux impressions contraires: on voit en effet dans le premier tiers du Ve siècle, une Afrique romaine, l'Afrique officielle en majorité chrétienne, surtout après 411, ses évêchés s'élèvent au chiffre fantastique de 700 et ses évêques, à 8 ou 900. Mais à côté de cette Afrique romanisée, il y a une autre, que je pourrais appeler l'Afrique indigène, c'est-à-dire cette partie de l'Afrique romaine, que la civilisation du peuple conquérant n'a pas encore soumise. Et puis, même la partie de l'Afrique christianisée qui paraît si brillante, est-elle, au fond, aussi chrétienne, qu'elle le paraît?».(9).
El Yacoubi nous a laissé un tableau de la Berbérie du IXe siècle qui montre que les anciennes populations ne sont pas encore fondues dans la masse. On distingue les descendants des Byzantins, les Roum, des Afariq, «Berbères latinisés ou Latins africanisés» et des métis. Les fouilles de Tripolitaine, nous ont livré des tombes des Xe et XIe siècles. Une inscription de Kairouan révèle, au même moment, l'existence d'un noyau chrétien jusque dans la ville sainte.(10).
Ainsi en apparence, continue Courtois: «L'Afrique est profondément romaine». En apparence aussi, rien ne menace cette partie de l'Empire... Et pourtant la menace est immense. C'est pour parler comme E.F.Gautier, la vitalité irréductible du monde berbère. Ce monde est un curieux mélange de docilité et de résistance... De résistance parce que sous le vernis de civilisations successives, il demeure à peu près intact... le schisme a permis aux Berbères convertis, d'avoir un christianisme de résistance(10). Cette phrase de Courtois, concernant la résistance, au début des années quarante est quelque peu prophétique. Elle est de même, dans cette Algérie du début du vingt et unième siècle, d'une brûlante actualité.
Il demeure donc un fait: la majorité des Berbères a refusé de se romaniser, puis de recevoir de l'Europe et de l'Orient, le christianisme, en tout cas, à partir du moment où l'Eglise a quitté la cause des faibles et des déshérités. «A la civilisation romaine, à la civilisation chrétienne, la Berbérie a dit en fin de compte: non . A l'Islam, elle finira par dire oui».(11).
Avec l'arrivée de l'Islam vers 643 , la religion chrétienne disparaîtra progressivement sans laisser de place majeure dans la structure sociologique du Maghreb. Les seules traces sont les ruines de basiliques et d'Eglises. Le christianisme ne s'éteignit cependant pas totalement, puisque ce n'est qu'au XIe siècle que disparaissent les dernières communautés chrétiennes. La tolérance des premiers conquérants musulmans avait laissé subsister dans toute l'Afrique, depuis l'isthme de Suez jusqu'au détroit de Gibraltar 145 évêchés. Al Bakri, mort en 1094, nous apprend que de son temps, parmi les monuments antiques que l'on remarquait à Tlemcen, il y avait des églises encore fréquentées par des chrétiens.(12).
La Lutte de la croix contre le croissant
Passions ou fanatisme religieux, intérêts commerciaux, désir d'utiliser les circonstances exceptionnellement favorables, tout cela a contribué à la détermination de l'Espagne mettant en oeuvre sa Reconquista, qui a de ce fait rendu ces expéditions inévitables. En l'espace de 20 ans de 1494 à 1516, l'Espagne a réalisé l'essentiel de ses conquêtes. Ainsi, en 1505, une armada espagnole s'empare de Mers El Kébir. Le marquis de Comares dirige l'expédition et après avoir fait nettoyer la Grande Mosquée, la fit bénir le jour de son entrée comme Eglise sous l'invocation de Saint Michel Archange.(13). En Espagne, les musulmans et les juifs durent se convertir au christianisme sous peine d'inquisition. Comme l'écrit H.Tincq: «L'inquisition fera si bien ses preuves au Moyen Age que tous les Torquemada de la terre n'auront qu'à recopier les recettes de Guillaume Raymond, Pierre Durand, inquisiteurs à Narbonne, de Bernard Guy, maître général des Dominicains, inquisiteurs à Toulouse».(14).
La procédure concernant les musulmans et les juifs, ne s'éteignit qu'avec les dernières expulsions, entre 1609 et 1614, des Andalous et des Tagarins vers le Maghreb, principalement l'Algérie: Alger, Bédjaïa, Tlemcen, Constantine. L'inquisition n'était pas un phénomène marginal; c'était tout le peuple espagnol qui était conditionné par les Dominicains à l'intolérance et au mythe de la pureté de la race, sous le regard indifférent, voire complaisant et complice de l'Eglise.(15). Cependant, on aurait pensé que, passé le XVIe siècle, siècle des confrontations par excellence, des deux spiritualités véhiculées par le christianisme et l'islam, il y aurait par la suite un statu quo du fait de la stabilisation des lignes de confrontation, il n'en fut rien. A titre d'exemple encore, les rapports de la Régence avec la France n'ont jamais été sereins; Louis XIV sut, certaines fois, joindre l'utile à l'agréable... à Dieu. Comme l'écrit C. A. Julien: «La grande habileté de Louis XIV fut de faire sa croisade à peu de frais, en se plaçant au point de vue national. Les expéditions contre les Barbaresques, inspirées pour des raisons purement commerciales, lui permirent de répondre aux voeux de la chrétienté, qui murmurait, en se posant en champion de la foi contre les musulmans.» (16)
1. M. L. Maougal : Le syndrome identitaire ou le subterfuge moderniste. Revue : Réflexions Elites et questions identitaires. p.67. Editions Casbah .(1997).
2.Ibn Khaldoun : Histoire des Berbères. Traduction du Baron de Slanes. Paris (1865).
3. M.Kaddache. L'Algérie dans l'Antiquité. p 37. Ed. ENAL. Alger,(1992).
4. F.K. Kadra : Les Djedars .Monuments funéraires berbères de la région de Frenda. P. 13 .Ed. O.P.U. (1983).
5. G.H. Bousquet : Histoire des Berbères, Ed. Que-sais-je ? P.U.F. (1974).
6. Eisenbeth. Les juifs en Algérie et en Tunisie à l'époque turque (1516-1830), vol. 96.p.127. (1952).
7. P.A. Février. Cahiers archéologiques ; Tome XIV, p.1, (1964), dans: Bull.d'arch.Alg. t.1,,(1962-1966).
8. J.Mesnage. Le Christianisme en Afrique. Revue Africaine .Volume 57.p.499.(1913).
9. J . Mesnage : Le Christianisme en Afrique Revue Africaine. Volume 57. p.657-658. (1913) .
10. C. Courtois. De Rome à l'Islam. Revue Africaine. Volume 86 . p.41. (1942).
11.G.H. Bousquet . Histoire des Berbères, Collection: Que Sais-je ?, Ed. P.U.F. (1974).
12. Al Bekri : Kitab al massalik oua-l - mamalik, trad. par le baron de Slanes (Description de l'Afrique septentrionale. p. 120 . Alger . (1913).
13. Suarez : Mers El Kébir. Revue Africaine. Vol.9.P.345. (1865).Réédition O.P.U. (1985).
14. H.Tincq : Les milices de Dieu à l'assaut des nouveaux mondes. Courrier International. p.10. 22 juillet (1999).
15. H.A.F. Kamen. The spanish Inquisition. London (1965). Trad.Fr. L'inquisition espagnole .A. Michel.(1966)
16. Ch.A. Julien . Histoire de l'Afrique du Nord. Tome 2. p. 287Ed.Payot Paris. (1952).


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