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A chacun sa tragedie
LA SHOAH JUIVE OU LA NAKBA PALESTINIENNE
Publié dans L'Expression le 12 - 02 - 2005

«Si vis pacem para bellum» «Si tu veux la paix, prépare la guerre»
Il y a 60 ans, le 27 janvier 1945, les soldats de l'Armée rouge soviétique libérèrent les survivants encore reclus dans l'immense complexe concentrationnaire nazi d'Auschwitz-Birkenau. Ils découvrent un monde meurtri dont l'horreur dépasse tout ce qu'ils avaient imaginé. Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, le meurtre de plusieurs millions de personnes, juifs, tsiganes, roms, opposants au nazisme fut minutieusement industrialisé.
«...On laisse vivre les animaux, exister les choses, mais les handicapés mentaux, les tziganes et les juifs, dont l'existence retarderait l'avènement du règne des races supérieures, il faudrait en délivrer à jamais nos sociétés. Le débat sur le caractère unique du génocide, sur cette singularité observée et bientôt sacralisée qui a conduit à lui donner le nom spécial de Shoah - la «catastrophe» en hébreu - est terriblement et infiniment délicat. Est-ce la barbarie et le nombre des victimes qui caractérise l'unicité du génocide nazi? En aucun cas. Il y a eu d'autres monstruosités collectives auparavant. Il y en a eu ensuite. Il y en aura plus tard .(1).
Prévenant la saturation possible par médias interposés de cet évènement, Jean Daniel tente de nous convaincre qu'on n'en fait pas trop. Ecoutons-le: «Aujourd'hui, plutôt que de s'attarder sur l'éternelle persécution des juifs, on met l'accent sur l'irruption, dans une nation civilisée, d'une démence meurtrière et planifiée dont l'exécution, avec des moyens modernes, a eu pour but d'éliminer du royaume des vivants tous les individus d'un peuple. Et cela, on ne l'a vu ensuite ni à Hiroshima, ni au Cambodge, ni au Rwanda». Jean Daniel, bardé de certitudes, nous assène, ainsi, le fait que les génocides qui ont eu lieu par la suite, ce n'est rien comparé à la Shoah. Je ne sais pourquoi il fait ce distinguo entre deux exterminations qui ont la même finalité : la destruction de l'homme. Il pschychanalyse à sa façon, l'imaginaire de l'Europe à qui, au passage, il rappelle sa culpabilité et convoque pour son plaidoyer Edward Saïd intellectuel palestinien, tout en regrettant que les Arabes ne soient pas présents à Auschwitz pour «expier, comme les autres, leur faute». (1).
L'Occident ou le mythe de l'homme
Pour comprendre comment les tragédies de conquête du nouveau monde, des colonisations inhumaines et enfin de tentatives de génocides des juifs, des tsiganes et autres «races inférieures» dans la terminologie allemande, la patrie de Goethe, il faut remonter aux racines de ce complexe de supériorité qui tient sa double légitimité, à la fois, de l'Eglise : la prééminence du christianisme sur les autres religions. Souvenons-nous de la célèbre phrase: «Extra cathédra, nullum salutem» et plus tard, du siècle des Lumières reponsable de la laïcisation du mythe de la «race supérieure».
A ce titre, L'Occident et les autres de Sophie Bessis représente un vertigineux questionnement qui oblige à relativiser et à remettre en cause «un système depuis si longtemps établi qu'il se confond avec l'ordre naturel des choses». Sophie Bessis postule que l'identité occidentale est indissociable d'une culture de la suprématie: «La crainte, de devoir abandonner la position hégémonique qui a forgé leur relation au monde est synonyme, dans les consciences occidentales, de la peur de voir se dissoudre leur identité».(2). Sophie Bessis fait remonter la naissance de l'Occident à 1492, date qui voit coïncider la «découverte» de l'Amérique et l'expulsion des juifs et des musulmans d'Espagne. C'est alors que se met en place une «formidable machine à expulser les sources orientales ou non chrétiennes de la civilisation européenne». Au début du XVIe siècle, l'Espagne invente le mythe de la «pureté de sang» («limpieza de sangre»). (3).
C'est cette «double appartenance» fondée sur la chrétienté et sur la race qui va légitimer la conquête de l'Amérique, puis les colonisations. Suivra ensuite l'apparition du discours antinégriste, destiné à légitimer l'esclavage - jusqu'à ce que la rhétorique scientifique, au XVIIIe siècle, prenne le relais du religieux pour nourrir l'argumentaire de l'infériorité de la race noire. Bossuet «l'Aigle de Meaux», conseillait «aux esclaves d'accepter leur condition et de ne pas se révolter car telle est la volonté divine...» «La Renaissance marque donc une période où l'Europe, « en même temps que son horizon s'élargit aux dimensions du monde entreprend de réduire le territoire du genre humain à ses seules frontières, une fois son identité construite sur le rejet de tout ce qui altère l'image qu'elle veut avoir d'elle-même».
Les Lumières, plus tard, ne proclameront les droits inaliénables de l'être humain que pour aussitôt les limiter: l'universel abstrait s'incarne dans le seul homme blanc (et mâle !). La théorie scientifique de la supériorité de la race blanche viendra résoudre la contradiction: elle permettra à l'Occident de défendre ses intérêts et de satisfaire ses appétits de puissance en toute bonne conscience. Les Lumières laïcisent ce que le discours religieux désignait comme : «the white man burden», «le fardeau de l'homme blanc» - la mission de civiliser le monde, d'être le flambeau de l'humanité.
A ce titre, citons Renan un intellectuel «organique au sens d'Antonio Gramsci». Dans une lettre datée du 28 juin 1856, Ernest Renan -qui, souvenons-nous écrivit à propos de l'islam que c'est une religion arriérée provoquant la réponse appropriée de Djamel Eddine El Afghani- répond à Arthur de Gobineau, auteur de «Essai sur l'inégalité des races humaines» paru en 1853. Vous avez fait un livre des plus remarquables plein de vigueur et d'originalité d'esprit. Sans doute si les élements nobles mélés au sang d'un peuple arrivaient à s'effacer complétement ; alors ce serait une avilissante égalité analogue à celle de certains Etats de l'Orient et à quelques égards de la Chine. Mais c'est qu'en réalité une très petite quantité de sang noble mise dans la circulation d'un peuple suffit pour l'ennoblir au moins quant aux effets historiques. «En mettant à part les races tout à fait inférieures dont l'immixtion aux grandes races ne ferait qu'empoisonner l'espèce humaine, je conçois pour l'avenir une humanité homogène». L'essai sur l'inégalité des races d'Arthur de Gobineau n'a pas été ignoré en France. Souvenons-nous de Jules Ferry, le père de l'Ecole républicaine, parlant du «devoir des races supérieures de civiliser les races inférieures». Renan disait parler au nom de la science, la hiérarchie des races est clairement affirmée.(4).
En énonçant l'universel, l'homme occidental s'est proclamé en même temps son gardien et son propagateur. La colonisation, «cet arbitraire sanglant à mission civilisatrice», va pouvoir se poursuivre - la fin justifie les moyens. Tant et si bien que lorsque adviendra le nazisme, il sera, affirme Sophie Bessis, «le résultat d'une filiation, et non une rupture»: «Ni l'obsession de la pureté, ni la conviction de faire partie d'une humanité supérieure, ni la volonté de se tailler un espace «vital» ne peuvent être portées au crédit des inventions hitlériennes. (...) Le racisme étant désormais à bannir (on en laisse la responsabilité à l'extrême droite dans chaque pays d'Europe, sans s'interroger sur un passé où il «était la norme», le champ de la supériorité de l'Occident se recentre au vingtième siècle «sur ses dimensions techniques, scientifiques, économiques et culturelles».(3).
L'avènement de l'antisémitisme.
Si l'on remonte à la Bible ou au Coran, les Arabes et les Hébreux sont les enfants d'Abraham. Ils sont donc sémites ils ne peuvent donc pas être accusés d'antisémitisme. Pourtant, certains juifs ou Israéliens ou sionistes - la frontière est floue - dénient aux Arabes d'être des sémites. Pour eux, l'antisémitisme ne sert qu'à les désigner exclusivement. «Tout d'abord, écrit Robert S. Wistrich le concept de «sémite» fait référence à une classification linguistique et non pas à une classification raciale ou nationale. Etre sémite c'est appartenir à la famille des langues sémitiques qui englobe l'hébreu, l'arabe et l'araméen. En second lieu, le terme «antisémitisme» a été imaginé en Allemagne en 1879 par Wilhem Marr et n'a jamais concerné les Arabes. Il visait clairement et exclusivement les juifs afin de lutter contre leur émancipation. Sa coloration manifestement raciste était en fait un substitut pseudo-scientifique pour désigner la haine traditionnellement réservée aux juifs religieux».(5).
Les pogroms ont de tout temps jalonné l'histoire du peuple juif ; il faut se ouvenir que les premiers bûchers furent édifiés en Espagne. L'Inquisition avec Torquemada arriva à ses fins. En 1392, c'est le début des expulsions de juifs d'Espagne vers le Maghreb où ils trouvèrent un gîte, un couvert et la liberté de suivre leur religion (Ahl al Kitab). Plus tard, et à titre d'exemple, les Juifs n'avaient pas le droit d'enterrer leurs morts à Paris. Bien plus tard encore, toute une littérature antijuive vit le jour. A ce titre, Les Protocoles des Sages de Sion, ouvrage sur la stratégie que projette de mettre en place le peuple juif pour dominer le monde est attribué, nous dit-on, à la police tsariste, est un produit fin de siècle, typique de l'antisémitisme russe et européen.
Le «barbare», depuis la fin de la guerre froide et son exigence d'un «Satan de rechange», c'est le plus souvent le musulman, «autrefois conquérant, naguère dominé et aujourd'hui revanchard», d'autant plus effrayant qu'il est proche - à la fois historiquement et à travers la présence des communautés immigrées. L'islam sert de clé pour expliquer tous les conservatismes, toutes les pratiques inhumaines et barbares. «L'Etat d'Israël n'a cessé de se vouloir occidental, s'attachant avec constance à conjurer tout risque d'orientalisation. Ses élites ont fidèlement intériorisé, pour ce faire, un discours de la suprématie élaboré pour d'autres dominations».
Cet opprobre jeté sur l'islam oblige à gommer son influence sur la civilisation occidentale. Il explique la vogue de l'adjectif «judéo-chrétien», qui permet à la fois de se dédouaner en un clin d'oeil de siècles d'antisémitisme, de «censurer l'existence historique du judaïsme oriental», et d'expulser l'islam de l'histoire occidentale, en faisant de lui «le tiers exclu de la révélation abrahamique». D'ailleurs, il a fallu attendre l'an 2000 pour que l'Eglise reconnaisse sa faute vis-à-vis du peuple juif. Ecoutons le pape: « En tant qu'évêque de Rome et successeur de l'Apôtre Pierre j'assure le peuple juif que l'Eglise catholique, motivée par la loi évangélique de la vérité et de l'amour et non par des considérations politiques, est profondément attristée par la haine, les actes de persécution et les manifestations d'antisémitisme exprimées contre les juifs par des chrétiens en tous temps et en tous lieux. L'Eglise refuse toute forme de racisme comme une négation de l'image du Créateur intrinsèque à tout être humain.» (6).
On l'aura compris, l'Eglise n'a nullement, dans un mouvement de pardon urbi et orbi, inclus dans la charité chrétienne le pardon pour les croisades contre l'islam!! C'est dire si quelque part l'antisémitisme chrétien sélectionne dans la famille sémite le plus vulnérable. En fait, le chrétien, s'il déteste foncièrement les juifs; il déteste encore plus les autres Sémites que sont les Arabes. Il fait, cependant, allégeance au quotidien vis-à-vis de cette communauté qui a su et sait exploiter la détresse de ceux qui sont morts; comme le montre la détestable et ignomigneuse «affaire Marie L.». qui a secoué en été 2004, le landerneau français qui comme un seul homme s'est écrié «haro sur le baudet, beur, arabe et en définitive musulman».
Auschwitz vu par un arabe-chrétien-israélien
Témoignage capital et atypique sur Auschwitz et sa mémoire, que celui d'Emile Shoufani, curé palestinien de Nazareth et apôtre infatigable du dialogue judéo-arabe. Pour la première fois, des juifs et des Arabes de tous horizons se sont réunis à Auschwitz ... 500 personnes se recueillent, venues de France, de Belgique, de Tunisie, d'Israël surtout. Des rescapés, des intellectuels, des jeunes, des religieux, de simples anonymes, hommes de bonne volonté, la majorité d'entre eux musulmans - israéliens ont participé à ce voyage de recueillement. Pour la première fois, des Arabes israéliens ont voulu pénétrer la mémoire juive pour placer le dialogue sur un plan spirituel, moral et philosophique plutôt que politique. «Si tu veux la paix, prépare la paix. On ne peut pas comprendre l'Autre, sans comprendre sa souffrance, ses peurs, ses appréhensions», affirme avec insistance le père Shoufani. (7).
«Aujourd'hui, écrit-il, je ne peux pas avancer dans le dialogue avec le monde juif si je ne me plonge pas avec le frère juif, dans son histoire. Si je ne vais pas dans sa souffrance. Si je fais le chemin d'Auschwitz, ce n'est pas seulement pour exprimer mon indignation pour ce qui a été fait et ma condamnation du nazisme, de tout esprit de racisme, d'antisémitisme, mais aussi pour délivrer un message que je tiens à exprimer fortement : je porte le monde juif avec moi et je veux saisir quelque chose de la réalité dans laquelle il se trouve. Le conflit est aujourd'hui stationnaire, non dans le sens qu'il y aurait la Shoah d'un côté et la Nakba de l'autre, les tanks qui démolissent les maisons d'un côté et les attentats de l'autre. D'ailleurs, c'est une attitude fausse que de vouloir quantifier la douleur, de vouloir comparer la souffrance d'un homme à celle d'un autre, la souffrance d'un peuple face à un autre.
«De fait, ni les Palestiniens, ni le monde arabe, ni le monde musulman, ne sont pas directement responsables de la Shoah. Si on étudie l'histoire du monde arabe et musulman, on constate qu'il a toujours existé une reconnaissance du statut du Juif. Il n'y a jamais eu de campagne pour les islamiser ou pour les exterminer. Certes, il y a eu des actions ponctuelles d'individus, des émeutes ici ou là mais, dans l'ensemble, le monde musulman n'a jamais accepté le principe de forcer à la conversion le Juif, contrairement à l'Eglise qui l'a toléré durant des siècles en l'obligeant à se convertir, ou avec la nostalgie de le convertir. En ce sens, le monde arabe est donc plus libre puisque dégagé d'une responsabilité directe». (8).
L'accusation d'antisémitisme arabe
Bien que les Juifs aient toujours vécu en relative bonne intelligence pendant près de vingt siècles ; l'avènement du sionisme et sa traduction dans les faits par la création de l'Etat d'Israël d'aucuns pensent que «l'antisémitisme est devenu en fait une partie intégrante et organique ; ont amené les intellectuels et les politiques israéliens à détourner l'attention du monde occidental du problème de la sopliation de la terre palestinienne ; par la création ex nihilo d'un antisémitisme arabe!»
«Les Juifs et les Musulmans, ont coexisté sans discontinuité depuis l'émergence de l'Islam au septième siècle de l'ère chrétienne. Il y a eu des périodes de tolérance relative durant lesquelles les Juifs ont pu prospérer intellectuellement et économiquement de façon significative et exercer une influence politique certaine au sein des gouvernements islamiques. En fait, l'«Age d'Or» des Juifs sépharades qui a coïncidé avec l'apogée de la civilisation de l'islam au Moyen Age n'a pas été sans provoquer envie et hostilité parmi les musulmans face à l'influence croissante des Juifs et à leurs succès socio-économiques notables. «Il faut dire toutefois que le sort des Juifs soumis au statut de dhimmi, malgré toutes ses conséquences douloureuses, était, somme toute, plus enviable que celui de leurs coreligionnaires vivant en terres chrétiennes». Les premiers signes du «révisionnisme» moyen-oriental s'étaient en fait déjà manifestés dans les années 1980. En 1983, Mahmoud Abbas (plus connu aujourd'hui sous le nom de Abu Mazen), qui se révéla par la suite être, au sein de l'OLP, le principal architecte des accords d'Oslo, est l'auteur d'un livre négationniste intitulé: L'autre face: les rapports secrets entre le nazisme et le mouvement sioniste. Pour lui, le nombre de victimes juives de la Shoah «fut même inférieur à un million». Pour sa part, le mufti de Jérusalem, Cheikh Ikrima Sabri, déclarait en mars 2000 au New York Times: Nous pensons que le chiffre de six millions est exagéré. Les Juifs exploitent cette question de plusieurs manières, en faisant notamment un chantage financier aux Allemands... L'Holocauste protège Israël, l'Etat juif est considéré comme existant et prospérant avant tout grâce au «mensonge de l'Holocauste». (9).
Comment les Juifs et les Arabes palestiniens justifient-ils les uns par rapport aux autres leur prétention sur cette terre? «En ce qui concerne Israël, écrit Dan Diner professeur à l'université hébraïque de Jérusalem ; sa légitimité n'est pas évidente, mais se partage en variantes différentes. On peut appeler la promesse divine». Une telle prétention ne peut guère obliger les Arabes, qui sont ses adversaires directs dans le conflit. C'est pourquoi elle doit être pour ainsi dire imposée physiquement, par la poursuite de la colonisation des territoires occupés au nom de la Bible. Les frontières de 1948 sont d'une certaine façon sacro-saintes. Il s'agit après tout des «frontières d'Auschwitz», comme les appela Abba Eban, l'ancien ministre israélien des Affaires étrangères, après la foudroyante victoire militaire de 1967. Il voulait dire par là qu'un repli sur les frontières de 1948, en raison de leur précarité militaire, n'entrait pas en ligne de compte. Abba Eban forgea l'expression «frontières d'Auschwitz». Mais cette image pourrait, en un tout autre sens, fonder «une légitimité puisée dans les horreurs de l'Holocauste». Israël tire de l'anéantissement des Juifs le droit impérieux de protéger ces «frontières d'Auschwitz», y compris par la menace de destruction au moyen de l'arme ultime. La légitimité des frontières d'Auschwitz n'est pourtant que partiellement universelle. «En effet, l'Holocauste n'oblige catégoriquement que le monde occidental. Il est étroitement solidaire de l'antisémitisme, lequel appartient à une tradition noire de la chrétienté».(10).
Voilà l'état d'esprit d'un Israélien ; la vraie réalité des choses: la création ex nihilo de l'Etat d'Israël 25 siècles après la disparition du royaume d'Israël et l'appropriation ensuite des territoires en 1967 sont «le tribut que doit payer l'Occident pour sa faute originelle entretenue à la fois savamment par l'Eglise - le déicide du Christ par Caiphe le grand Rabbin du temple d'Israël- et aussi mise en oeuvre par l'Allemagne durant la période du troisième Reich». Il serait injuste alors, d'imputer à l'Allemagne hitlérienne sa seule responsabilité dans le calvaire des Juifs. La représentation dégradée du Juif était latente dans toute l'Europe. Souvenons-nous des pogroms russes; polonais des émeutes antijuives en 1898; en France et colportées en Algérie. Souvenons- nous, aussi, avec quelle ferveur le pétainisme s'est propagé en France ; souvenons-nous des Croix de Feu du colonel Laroques. Souvenons-nous du celèbre «J'acccuse!!» d'Emile Zola une des rares personnalités lucides lors du procès du capitaine Dreyfus.
En fait, bien qu'une vie humaine de perdue est une tragédie pour l'humanité - celui qui tue une personne est comme celui qui a tué l'humanité toute entière - est-il écrit dans le Coran, on ne sait pas quel est le chiffre exact des victimes du nazisme toutes nationalités confondues. On parle en tout de 50 millions de morts pendant la Seconde Guerre mondiale. Cependant chaque fois qu'une tentative est faite de faire la lumière, on traite son auteur de «révisionniste». Souvenons-nous du sort injuste qui est fait à l'Abbé Pierre qui a eu une amitié coupable avec Roger Garaudy, que la vindicte militante a réussi à faire condamner en 1988 pour «révisionnisme».
En définitive, s'agissant de la perception qu'a le monde arabe de la tentative de génocide par l'Allemagne du IIIe Reich, il faut être prudent. Il est évident que le monde arabe et musulman ne doit pas expier pour une faute commise par l'Occident sur injonction lancinante de la chrétienté. Le monde arabe et musulman ne fait que redécouvrir pour les besoins de sa «cause» et devant les humiliations journalières subies par les Palestiniens; en différé le sort fait aux Juifs pendant des siècles et notamment depuis la fin du XIXe siècle. Cet «antisémitisme préfabriqué» -on ne peut pas être antisémite contre sa race-,il vaut mieux parler d'antisionisme, est l'une des faces de la «théorie du complot» des dirigeants arabes pour canaliser la colère de «la rue arabe» vers l'adversaire commode: Israël. D'autant que ce dernier ne perd pas une occasion de bafouer d'une façon impunie les résolutions internationales. Que les Juifs se rassurent, le ressentiment arabe n'est plus, de nos jours, qu'un «pétard mouillé». Rien à voir avec la détermination de la machine de guerre allemande qui a tenté de faire seule la sale besogne de l'extermination d'une race. Il est heureux qu' Hitler ait été arrêté dans sa folie. Pour autant, il est injuste que les Palestiniens vivent depuis 1948, une «nakba» une catastrophe équivalente sans que l'opinion internationale ne s'émeuve.
S'il n'y a pas d'échelle de mesure de l'horreur et de la barbarie combien de tentatives de génocides ont eu lieu avant et après Hitler. Pour la période récente; et justement si on parle d'anniversaire n'est-il pas, Monsieur Jean Daniel vous qui dites qu'on n'en fait pas trop, s'agissant d'Auschwitz, indiqué de se recueillir devant la mémoire des milliers de disparus un certain 8 mai 1945 à Sétif, Guelma Kherrata et dans tant d'autres villes qui ont vu la fureur des colons et de l'armée trop longtemps contenue sous l'occupation hitlérienne; se retourner contre un peuple sans défense et dont les enfants qui ont défendu la France coloniale découvrent, avec horreur, comment la France a récompensé leurs parents coupables d'avoir fêté la libération du pays, du joug allemand.
Pour terminer, rappelons que lors de la «conférence contre le racisme» de Durban en Afrique du Sud le 9 septembre 2001, boycottée par les Etats-Unis et Israël, les organisations non gouvernementales (ONG) réunies à Durban, accusèrent à plusieurs reprises Israël de «génocide envers le peuple palestinien», de pratiquer la purification ethnique et d'être un pur «Etat raciste d'apartheid». Ce qui est appelé la «Nakba»; «la Catastrophe» palestinienne perpétrée par Israël, fut qualifiée de «troisième holocauste» par le forum des ONG réunies à Durban.
La culpabilité ad vitam eternam de l'Occident
Savons-nous que depuis une cinquantaine d'années les pays occidentaux n'ont pas cessé de dédommager les victimes de l'holocauste; les derniers en date furent les Suisses coupables d'avoir entreposé les fonds des Nazis arrachés semble-t-il aux Juifs. Les indemnités au-delà du fait qu'elles sont tout à fait confortables et indexées sur l'inflation depuis soixante ans, ne sauraient en fait remplacer les vies perdues de ces Juifs ; Tziganes ; Roms ; Polonais et autres Algériens qui contrairement aux précédents n'ont jamais fait l'objet d'un quelconque dédommagement pour leurs descendants!
Cependant dans l'imaginaire occidental, les Juifs, sous l'impulsion lancinante des élites communautaristes et de certains grands médias, sont assimilés à l'Etat d'Israël et de ce fait il y a un transfert de culpabilité: l'Occident se sent coupable vis-à-vis de l'Etat d'Israël qu'il a légitimé en 1948 sur le dos des Arabes palestiniens.
Auschwitz et le génocide juif dans la conscience universelle de l'humanité est plus qu'une tragédie; c'est maleureusement, devenu au fil du temps, aussi, un fond de «commerce» juteux pour l'Etat d'Israël. Pour ses dirigeants, il faut entretenir la flamme de la culpabilité par humiliation des Arabes interposée. Ainsi, des phrases telles que plus jamais ça; le Monde ne doit pas oublier la souffrance du peuple d'Israël ; on ne parle pas de peuple juif, les livres, les émissions doivent «chauffer à blanc» des opinions européennes. Ainsi, lors de cérémonies du 60e anniversaire de la libération d'Auschwitz -on ne sait d'ailleurs qu'elle est la force occulte qui a décidé de leur tenue- parmi les 45 pays représentés c'est à celui qui va faire le plus démonstration d'allégeance vis-à-vis, non pas du peuple juif mais de l'Etat d'Israël. Seul, le président russe, Vladimir Poutine, a fait un discours dans lequel, selon la tradition soviétique, il n'a pas prononcé les mots juif, Shoah, ou Holocauste, adressant son hommage aux «victimes du nazisme» de façon indéterminée. Il a, d'autre part, fait un parallèle entre «le fascisme» et «le terrorisme», assez déplacé quand on songe aux exactions auxquelles l'armée russe s'adonne en Tchétchénie. Enfin, la participation insolite de l'Etat d'Israël aux cérémonies du 60e anniversaire est une preuve de «la récupération de la détresse des Juifs» par l'Etat d'Israël. «Il me semble qu'en écoutant bien, on peut encore entendre les cris d'horreur des gens assassinés», avait déclaré peu avant à la tribune le président israélien, Moshe Katsav.(11)
On s'aperçoit que graduellement le monde occidental s'est vu investi, sans le savoir, de la douleur du peuple juif pour en faire celle de la civilisation judéo-chrétienne. On ne parle plus de religion abrahmique pour exclure l'islam. La «rédemption» passe, entre autres, par un soutien inconditionnel à la politique désastreuse d'un Ariel Sharon impuni. Il n'est que de voir le nombre de rappels à l'ordre des Nations unies sans effet. Au nom de la culpabilité «ad vitam eternam» l'Occident qui recèle en son sein «un antimémitisme latent entretenu par son extrême droite», laisse Israël libre de détenir l'arme atomique. Si certains Européens n'aiment pas les Juifs, ils aiment, encore moins, les Arabes.
En définitive, il nous semble injuste de culpabiliser le monde arabe pour une faute faite par l'Occident. S'il est indéniable qu'il y a eu tentative de génocide du peuple juif, l'histoire nous apprend tous les jours que les victimes d'hier sont aujourd'hui les bourreaux des Arabes. Méditons cette phrase de De Gaulle: «Le peuple juif est un peuple sûr de lui et dominateur», nous comprendrons pourquoi alors, il n'est pas permis au peuple palestinien de vivre sur 18 % de sa terre, «promise, une seconde fois», par un certain Lord Isaac Balfour....
1. Jean Daniel : Non, on n'en fait pas trop. Le Nouvel Observateur 26.01.05
2. Mona Chollet : La confiscation de l'universel Périphéries, août (2001).
3. Sophie Bessis : L'Occident et les autres. Histoires d'une suprématie, La Découverte, (2001).
4. E. Renan : Qu'est-ce qu'une nation ? par Joel Roman ; p 221. Press Pocket. (1992).
5. R. S. Wistrich : L'Antisémitisme musulman : un danger clair et actuel, American Jewish Comittee 23.05.2002.
6. Jean-Paul II : Mémorial Yad Vashem.Avril 2000.
7. J. Mouttapa : Un Arabe face à Auschwitz : la mémoire partagée. Editions A. Michel, 2004. H. Prolongeau : Sur les traces de l'horreur. Plus frères qu'ennemis. Le Nouvel Observateur. n°2013 semaine du jeudi 5 juin 2003
8. Jean-Marie Allafort : Un entretien avec Emile Shoufani, curé de Nazareth,
9. . [RTF bookmark start: _Hlt95204955]htpp : / /www.ajc.org/languages/French.asp ? [RTF bookmark end: _Hlt95204955]
10. Dan Diner : Les trois légitimités d'Israël. Traduit de l'allemand par Denis Thouard. Le Monde 18 Août 2002.
11. G. Bensoussan : Auschwitz en héritage. D'un bon usage de la mémoire -Ed. Mille et Une Nuits Paris 2004.


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