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"Macron dépassera les contraintes mémorielles"
AISSA KADRI, PROFESSEUR EMERITE DES UNIVERSITES ET ASSOCIE AU CNAM, À L'EXPRESSION
Publié dans L'Expression le 07 - 05 - 2017

L'Expression: Quelle lecture faites-vous de l'élection présidentielle française?
Aïssa Kadri: Il y a là un basculement générationnel historique. Macron s'inscrit dans un mouvement plus large où l'exercice classique de la politique a vécu. En se déliant de ses appartenances politiques, il a eu l'intuition du moment. Il est en phase avec des demandes nouvelles. Nous sommes depuis plus d'une décennie en face d'un mouvement plus large d'expressions de nouvelles exigences citoyennes.
Cela s'inscrit dans le cadre d'une crise de l'Etat-nation, de crises des identités, de processus d'individuation dans un moment d'hégémonie de l'idéologie libérale et d'une globalisation du monde qui injoncte et contraint.
On observe que l'internationalisation du capital sous ses nouvelles formes se fait de plus en plus et de manière concomitante avec des exigences territoriales locales ou régionales de plus en plus fortes. Mondialisation et exigences locales se répondent comme en écho. Cela se développe soit sous la forme de revendications identitaires, sociales et économiques territorialisées soit sous la forme d'imposition de règles, de politiques et d'actions exogènes, sinon soumettant les logiques locales, du moins leur assignant une place définie.
Dans ces processus, les différents groupes sociaux, les différents acteurs et institutions sont interpellés dans leurs adaptations à ces tensions qui peuvent s'analyser comme une dénationalisation de l'Etat social, comme un affaiblissement de l'Etat ou comme des compétitions territoriales visant à travers des processus compétitifs de valorisation auprès des instances centrales ou supranationales, la recherche de nouveaux équilibres socioculturels, économiques, financiers, de nouvelles responsabilités.
Les réponses varient allant de populismes sous différentes formes à des positionnements d'adaptation à ce qui serait une mondialisation inéluctable et heureuse. Aussi bien cela se traduit par de nouvelles exigences de faire de la politique de participer à la vie de la cité, de peser sur les décisions au niveau local. L'émergence de Macron, concomitante par ailleurs de réponses populistes, apparaît par la plasticité de ses réponses, souvent traduites comme opportunistes - ni droites, ni gauches- en rupture avec la vieille politique, en affinités avec ces demandes nouvelles portées par de nouveaux acteurs.
Que l'on songe à tous ces mouvements sociaux comme ceux des indignés, de Syrisa, des bonnets rouges, des «nuit debout» et même chez nous de In Salah et plus largement du Sud ou des jeunes youtubers. On verra Macron à l'épreuve et nul ne doute que certaines de ses décisions surprendront.
Emmanuel Macron a parlé de crimes de guerre en parlant de l'Algérie. A votre avis a-t-il déjà esquissé l'avenir des relations algéro-françaises?
Macron est très jeune, il est donc de cette génération qui s'inscrit dans le monde qui s'émancipe du nationalisme. Vous avez remarqué qu'il a parlé de patriotisme et dénoncé les nationalismes étriqués. Sa définition de la culture française est également emblématique de ses engagements d'ouverture au monde. Il souhaite sortir de la guerre des mémoires et s'inscrire dans l'avenir en phase avec la génération portée par les nouveaux moyens modernes de communication.
Il parle du modèle franco-allemand pour ce qui est du dépassement du contentieux mémoriel algéro-français. Il parle d'un office de la jeunesse pour dynamiser les relations franco-algériennes. Je pense que s'il est élu il fera encore le pas pour dépasser les contraintes mémorielles à travers un geste fort.
Dans le cadre idéologico-politique où il se situe, la dynamisation des relations économiques envisagées à travers une autre démarche que celles qui ont prévalues jusque-là lui apparaîtront comme une modalité de sortie des enfermements mémoriels. Cependant, la question reste posée à notre pays de la sortie d'une situation de statu quo, voire de fossilisation du débat politique, situation qui est en porte-à-faux total avec le moment historique. Je dirais que pour que les choses avancent il faut également que notre jeunesse accède aux responsabilités. Ce qui n'est apparemment pas encore à l'ordre du jour!
Le «dossier Algérie» s'est réinvité au débat télévisé entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron. Comment jugez-vous les réponses apportées à ce dossier par les deux candidats à la présidentielle?
Il n'y a aucune surprise du côté de la candidate de la revanche, de la haine anti-immigrée de manière générale et de l'Algérie de manière particulière. Elle est la porte-parole des nostalgiques, représentés par certaines catégories de vieux coloniaux rassis et racistes qui n'ont jamais digéré l'indépendance algérienne. Macron quant à lui a renouvelé courageusement sa position mais en l'inscrivant dans une problématique interne prônant la réconciliation des mémoires françaises où l'immigration algérienne est importante.
Et je ne pense pas que ce soit électoral. Ce qui montre qu'une large partie de la population française est réceptive.
Là aussi, il s'inscrit dans une volonté de dépassement du contentieux mémoriel franco-algérien. Je pense personnellement qu'il ira encore plus loin, vers une reconnaissance des crimes coloniaux.
Mais c'est aux jeunes générations algériennes qui sont déjà dans ce mouvement de participation aux bruits du monde de donner une réponse qui, s'inscrive dans les fondamentaux d'une révolution qui a participé à l'émancipation des peuples coloniaux, de montrer qu'ils seront dans la lignée de leurs prédécesseurs en permettant au pays de retrouver son rôle émancipateur africain et méditerranéen.
Les rapports entre les pays maghrébins et la France vont-ils subir une mutation après cette élection?
Sans vouloir être dans la prédiction et les sciences sociales nous permettent d'envisager seulement les tendances lourdes et encore avec les réserves que les logiques sociales peuvent toujours produire des surprises avec notamment des effets pervers des politiques publiques les mieux intentionnées, je dirais que oui, il y a aura sûrement et pas seulement du fait de la politique de Macron, mais aussi de comment le Maghreb va évoluer, des évolutions notables dans les relations franco-maghrébines. Un premier élément a été déjà me semble-t-il avancé par quelqu'un de proche de Macron qui est Montebourg qui a parlé de délocalisation des activités économiques dans l'espace maghrébin. Ce qui a d'ailleurs commencé à se faire ici ou là avec des contraintes et pesanteurs. Je pense donc que la politique de Macron, dans le cadre politico-idéologique où elle est située, visera à définir et mettre en place une espèce d'hinterland économique français au Maghreb à l'image de ce qu'a fait l'Allemagne avec ses voisinsm des pays anciennement communistes. Il y a là une direction qui sera me semble -t-il approfondie. Cette tendance ira dans le sens de la reproduction de la domination si le Maghreb de son côté n'avance pas dans les réformes politiques et ne dépasse pas ses contradictions qui l'affaiblissent, face aux grands espaces qui se construisent à l'échelle du Monde. Je pense que là aussi, il n'en prend pas la direction et on aura beau jeu de sortir dans le moment de crise aiguë la thèse du complot!


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