«Les rumeurs sur cette question émanent de groupes d´intérêts que la stabilité dérange.» Le chef du gouvernement a définitivement tranché sur la rumeur qui le donnait partant à la tête de l'exécutif. « Je vous donne rendez-vous en janvier ou en février prochain pour faire le bilan», a-t-il déclaré jeudi à 3 heures du matin, lors d'une conférence de presse au siège de son parti à l'issue des travaux du sommet de l'alliance présidentielle, pour signifier qu'il restera en poste au moins jusqu' à 2006. Cette déclaration semble ordinaire, voire même rassurante, dans un pays qui aspire à une stabilité institutionnelle. Seulement, l'agitation qui s'en est suivie après le débat enclenché depuis quelques semaines au sein des instances du FLN, lui donne une signification et une épaisseur politique. Elle révèle que les partis de l'alliance réunis autour du programme du président ne renoncent pas à leur esprit strictement partisan, d'une part et de l'autre, elle met en relief la rivalité entre le RND et le FLN. Des voix insistantes s'élèvent en effet, au sein du vieux parti et réclament la tête de la chefferie du gouvernement qu'ils estiment leur revenir de droit en tant que parti majoritaire. Du coup, la déclaration du chef du gouvernement devient une précision de taille. Ahmed Ouyahia s'est montré volontiers «bavard» et la question lui a fait faire quelques commentaires. Refusant de personnaliser le débat entre lui et Belkahdem, entre son parti et le parti du FLN, Ouyahia a d'abord rappelé que cette prérogative est dévolue constitutionnellement au président de la République. «C'est une question qui concerne le président de la République». Puis il a affirmé que «le gouvernement n'est pas un manège» et «on ne peut pas se permettre un changement de staff à chaque fois». Cette affirmation est de nature à balayer la perspective d'un éventuel changement ou d'un remaniement gouvernemental prochain, comme il a été rapporté par certains titres de la presse nationale. Ensuite, il a révélé que ces rumeurs sont colportées par des groupes d'intérêts et des écoles politiques que la stabilité dérange: «Les rumeurs qui se font jour sur cette question émaneraient de groupes d´intérêts et d´écoles politiques, que la stabilité des institutions du pays dérange». L'allusion du chef du gouvernement demeure floue. Qui alimente la rumeur du départ d'Ouyahia et quelle «école politique» son départ va-t-il arranger? Il reste que la seule chose claire est que la tête de la chefferie du gouvernement est revendiquée par des militants du FLN. Cela dit, Ahmed Ouyahia a estimé que l'ambition nourrie par des militants pour voir leur parti driver la chefferie du gouvernement est légitime. De même que la révision de la Constitution a été sérieusement abordée au sein des instances du FLN, le RND estime son secrétaire général, ne considère pas cette question comme une priorité. «Chaque parti est libre d'ouvrir un débat sur une question qu'il juge intéressante et prioritaire. En ce qui nous concerne au RND, nous considérons que la révision n'est pas une priorité, elle n'est pas à l'ordre du jour». Mais encore une fois, Ouyahia s'en remet au chef de l'Etat: «Vous me concéderez que la révision de la Constitution n'est pas du ressort du RND ou d'un quelconque autre parti. C'est une prérogative du président de la République qui est le seul habilité à mettre en branle cette démarche qui évidemment appelle à un référendum.» Cette déclaration se veut, on ne peut plus clairement, une réponse à son camarade de l'Alliance présidentielle, Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général du FLN. En effet, le secrétaire général du RND s'oppose absolument à la révision de la Constitution. M.Belkhadem a avancé, depuis l'été dernier et surtout durant la campagne électorale pour le référendum sur la charte pour la paix et la réconciliation nationale, l'idée de la révision constitutionnelle afin de définir la nature du régime présidentiel du pays. L'écart de projection entre les deux principaux partis du pays est béant. Il traduit également la dualité politique entre le vieux parti et son rival, le RND.
