Au moins 23 personnes ont été tuées hier dans des raids russes visant un marché dans la province d'Idlib, les forces armées syriennes pilonnant, depuis près de trois mois, avec leur allié russe, cette région qui échappe à son contrôle. Dominée par des terroristes et accueillant des groupes rebelles, la région d'Idlib et les territoires adjacents dans le nord-ouest de la Syrie en guerre sont depuis fin avril la cible de frappes aériennes et de tirs d'artillerie menés par Damas et des troupes alliées. En près de trois mois de bombardements, plus de 650 civils ont été tués, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) tandis que 330.000 personnes ont fui les violences, d'après l'ONU. Hier matin dans la ville de Maaret al-Noomane, plusieurs frappes aériennes russes ont visé un marché où étaient installés des grossistes de légumes, et où se situent aussi des immeubles d'habitation, selon l'OSDH. Au moins «23 personnes ont été tuées, dont 19 civils et quatre victimes qui n'ont pas encore été identifiées», selon un nouveau bilan fourni par le directeur de l'Observatoire, Rami Abdel Rahmane. Des Casques blancs, aidés par des habitants, transportent des blessés, évacués à bout de bras ou sur des matelas transformés en civières de fortune. Les Casques blancs ont déjà défrayé la chronique lorsqu'un certain nombre d'entre eux ont été évacués par Israël face à l'avancée de l'armée syrienne dans la partie nord du Golan. Les frappes ont aussi fait 45 blessés, selon l'OSDH, qui fait état de disparus et de personnes encore prises au piège des décombres. Dimanche dans la région d'Idlib, 18 civils, dont sept enfants, ont été tués. Parmi les victimes, se trouvait un journaliste citoyen de 22 ans. également un des bénévoles des Casques blancs. La région d'Idlib accueille trois millions de personnes, dont de nombreux déplacés, contraints au fil des ans à abandonner d'autres provinces à cause des combats et des reconquêtes du régime syrien. Idlib échappe toujours au contrôle de Damas. Le bastion est dominé par les terroristes du groupe Hayat Tahrir al-Cham (HTS, ex-branche syrienne d'Al-Qaïda), tandis que d'autres factions rebelles et terroristes y sont présentes. Face à l'ampleur de l'offensive, deux cardinaux du Vatican se sont rendus hier à Damas pour rencontrer le président Bachar al-Assad. Ils lui ont remis une lettre du pape François, «qui exprime sa profonde préoccupation pour la situation humanitaire en Syrie, en particulier pour les conditions dramatiques de la population civile à Idlib», selon un communiqué du Vatican. Cette recrudescence de violence intervient malgré un accord conclu en septembre 2018 entre la Russie et la Turquie, parrain de certains groupes rebelles, visant à éviter à Idlib une offensive d'envergure des forces loyales à Damas. L'initiative prévoyait une «zone démilitarisée» pour séparer les territoires tenus par les terroristes et les rebelles des zones gouvernementales attenantes. Les violences devraient se poursuivre jusqu'à ce que «la Russie et la Turquie arrivent à un accord établissant le calme sur le front», selon un observateur européen. En attendant, «chaque camp essaie de faire pression sur l'autre, à travers les partenaires syriens sur le terrain» ou bien «directement avec les bombardements russes sur des régions d'Idlib», ajoute-t-il. Ces derniers mois, le gouvernement syrien n'a eu de cesse de bombarder le bastion d'Idlib tandis que les terroristes et les rebelles tirent sporadiquement des roquettes et des obus sur les régions gouvernementales, ce qui a causé la mort d'une cinquantaine de civils.