L'Algérie, la Tunisie et la Libye tentent de trouver ensemble le moyen d'obtenir une solution politique et inclusive à la crise libyenne. Les ministres des Affaires étrangères des trois pays se sont rencontrés, hier, à Tunis, avec à l'ordre du jour, le dossier libyen, mais aussi la situation qui prévaut à l'échelle régionale et internationale. Le ministère tunisien des Affaires étrangères, qui a évoqué cette rencontre dans un communiqué rendu public, a mis l'accent sur l'intérêt pour les trois pays de dégager une position commune sur l'ensemble des questions qui interpellent l'Algérie, la Tunisie et la Libye. Et pour cause, la rive sud de la Méditerranée est confrontée à une nouvelle réalité géostratégique et il devenait nécessaire de travailler à unifier les points de vues, face à une Europe dont les intérêts peuvent diverger avec ceux du Maghreb, notamment depuis l'éclatement de la guerre en Ukraine. Les trois pays qui, faut-il le souligner, ont trouvé le moyen de conserver des contacts permanents au plus haut niveau ne sont en aucune manière des alliés de l'Occident, dont les pressions exercées sur la Tunisie ne sont pas innocentes. De même que les propos de l'Union européenne en rapport avec la crise algéro-espagnole, ou encore l'ingérence caractérisée dans les affaires de la Libye, depuis 2011. C'est bien l'Occident qui a mis ce pays dans cet état de crise politico-sécuritaire majeure. L'unité des rangs des pays du Maghreb s'impose comme une nécessité de l'heure, face aux enjeux actuels qui font de la région un lieu d'intérêt stratégique pour les Occidentaux, Israël et d'autres puissances mondiales, à l'image de la Chine et de la Russie. La richesse énergétique de l'Algérie et la Libye et la perspective de voir le sud des trois pays constituer la nouvelle source en énergies renouvelables pour l'Europe, en sus d'être un grand portail pour l'Afrique, future destination de la croissance de l'économie à l'échelle du monde, place le Maghreb au coeur d'une équation géopolitique mondiale, dont le caractère historique n'est plus à démontrer. Ce qui se préconise pour la rive sud de la Méditerranée est aussi important que l'ère des colonisations et des décolonisations. Le défi est énorme, historique et engage la survie des nations. La solidarité dont doivent faire preuve les autorités des trois pays est à la mesure des risques qu'ils encourent en cas d'échec de leur démarche unitaire. Il reste que si l'Algérie a su sauvegarder toute sa souveraineté, il n'est pas dit que les deux autres pays disposent d'une marge de manoeuvre à même de résister aux assaut de l'Occident et du FMI. D'où, estiment les observateurs, l'urgence de permettre à la Tunisie de sortir de l'enfer de l'endettement et donner à la Libye un plan de sortie de crise inclusif. Aussi, la rencontre d'hier est, à ce point, importante qu'elle devrait déboucher sur un Sommet regroupant les chefs d'Etat des trois pays. L'intérêt d'une unité maghrébine est d'autant plus cruciale que l'on ne s'interdit pas de penser que le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, en a certainement parlé avec le président tunisien Kaïs Saïed qui l'a reçu en audience, hier après-midi. Les tentatives de saborder la parfaite entente algéro-tunisienne interpelle les consciences et donne le caractère de l'urgence à un rapprochement historique entre l'Algérie, la Tunisie et la Libye. Il reste que la crise libyenne pose un défi de taille aux dirigeants maghrébins. Sans une issue au conflit fratricide dans le pays de feu Khadafi, la région souffrira de sa fragilité. La question a été au centre de l'audience accordée, ce jeudi, par Ramtane Lamamra à la conseillère spéciale du secrétaire général de l'ONU pour la Libye. Mme Stéphanie Williams, qui effectue une visite de travail en Algérie, a évoqué avec son hôte «les développements politiques et sécuritaires en Libye», rapporte un communiqué du ministère des Affaires étrangères. Il a souligné «la nécessité d'éviter la multiplicité des processus et des initiatives au détriment des intérêts supérieurs du peuple libyen, des processus n'ayant abouti à aucun résultat si ce n'est que de perturber la médiation onusienne», ajoute le communiqué. Face à cette vérité crue établie par le ministre algérien, les pays du Maghreb devront trouver par eux-mêmes la solution au problème libyen.