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«Mohammed VI a lié son destin au sionisme»
Jacob Cohen, auteur et critique politique, à L'Expression
Publié dans L'Expression le 07 - 06 - 2023

Jacob Cohen considère que c'est de bon augure que Riyadh et Téhéran veuillent sortir de ce qu'il qualifie d'engrenage militaire ourdi par l'axe américano-sioniste. Le rétablissement des relations irano-saoudiennes est annonciateur d'un apaisement des tensions dans la région, selon Cohen. Sur la normalisation du Maroc avec l'entité sioniste, l'analyste pointe «l'hypocrisie totale» de Rabat. «Non seulement le Maroc, je dirais plutôt le monarque qui a imposé sa vision et gare à celui qui renâcle, lie son destin à celui du régime sioniste advienne que pourra, mais il s'est entiché de réécrire l'histoire du pays, d'en faire un modèle d'harmonie judéo-musulmane», fait-il observer. À propre du nouvel ordre mondial qui s'esquisse et dans lequel le groupe des BRICS tiendra un rôle central, le spécialiste a estimé que le phénomène était en gestation depuis de nombreuses années. Les circonstances n'ont pas permis sa manifestation. Survint alors la guerre en Ukraine qui a donné un coup d'accélérateur à ce mouvement. Pour Jacob Cohen, nous assistons à un retournement extraordinaire dans les relations internationales.
L'Expression: La région du Moyen-Orient a été marquée ces derniers mois par le rétablissement des relations entre l'Arabie saoudite et l'Iran. Quelle signification donnez-vous à cette réconciliation entre Riyadh et Téhéran? Sera-t-elle d'un grand appui pour la cause palestinienne?
Jacob Cohen: L'Arabie saoudite - ou faut-il rendre hommage à MBS génie politique - a échappé au piège dans lequel est tombé Saddam Hussein. À l'image de Zelensky, le dirigeant irakien a servi de proxy pour mener une guerre meurtrière et stupide contre l'Iran pour le compte des Américains, et on a vu comment il a été remercié. Depuis au moins une vingtaine d'années, le régime sioniste crie au loup à propos des Iraniens, leur attribuant des visées hégémoniques et l'objectif de devenir une puissance nucléaire. Ce qui est faux puisque l'Iran n'a aucune revendication territoriale et s'est engagé dans un accord international le soumettant à des contrôles stricts sur ses capacités nucléaires, accord dénoncé par les Américains sans aucune justification légale autre que faire plaisir au lobby sioniste. Le fait que ces deux pays veuillent échapper à l'engrenage militaire ourdi par l'axe américano-sioniste est de bon augure pour l'apaisement des tensions dans la région, et surtout détruit le fondement des «normalisations» avec les monarchies du Golfe qui reposait sur la «protection» offerte par Israël contre les menaces iraniennes. Et cela donnera un petit plus à la cause palestinienne.
La Ligue arabe a organisé récemment son sommet à Djeddah avec un invité encombrant, en la personne de Zelensky. Quelle lecture faites-vous du déroulement de ce rendez-vous et de ses résolutions?
La présence fugace de Zelensky a pu dérouter nombre d'observateurs. D'autant que la Ligue arabe, de manière générale, tente de ne pas s'impliquer dans le conflit russo-ukrainien. Il semble que ce geste, aussi spectaculaire que vain, ait été motivé par le désir de paraître dans le «camp du bien» et surtout, pour MBS, de faire passer plus facilement les quatre pilules amères à destination de l'Amérique: sa volonté de rejoindre les BRICS, la réconciliation avec l'Iran, la réintégration de la Syrie, et l'acceptation du yuan dans ses relations commerciales avec la Chine. C'est beaucoup dans un laps de temps aussi court. D'ailleurs, le président ukrainien est reparti sans avoir rien obtenu. L'intérêt de ce sommet a donc résidé dans le fait qu'il ait eu lieu avec tous ses membres dans un esprit de résoudre pacifiquement les conflits et d'entrevoir une espèce de non-alignement, mais loin de l'Occident et plus proche de l'axe qui se forme entre la Russie, la Chine et l'Inde.
Ne pensez-vous pas que le sommet de Djeddah a fait du surplace, sinon un bond en arrière comparativement au sommet d'Alger qui a, notamment rappelé aux dirigeants arabes la centralité de la cause palestinienne comme il a ouvert la voie au retour de la Syrie au sein de la Ligue arabe?
À propos de la Syrie, rien n'aurait pu se faire sans la volonté de l'Arabie saoudite, et sa réintégration est dans le prolongement des dernières évolutions mentionnées dans la question précédente. Tout cela a résulté de la nouvelle dynamique à l'oeuvre dans la région.
Quant à la centralité de la cause palestinienne, que dire? Il m'est pénible de constater que cette rhétorique débouche sur une impasse et reflète l'impuissance du monde arabe à empêcher la mainmise brutale, cynique, constante, impitoyable, irréversible, de l'ogre sioniste contre ce qui reste des lambeaux de la Palestine historique. Et cela pour une raison fondamentale dont je m'étonne que les Arabes n'en fassent pas largement état. Les accords d'Oslo, signés il y a 30 ans - trente années d'illusions qui ne sont pas près de finir - ont incrusté dans les esprits, cyniquement ou lâchement, que l'Etat palestinien est à portée de main et, d'ailleurs, il en compte formellement la plupart des paramètres et des institutions. Israël s'offre même le luxe, inoui, de ne plus paraître l'occupant puisqu'il y a une Autorité palestinienne avec ses ministères, ses forces de sécurité, sa diplomatie, etc, bref, il y a une fiction d'Etat palestinien qui arrange la communauté internationale. Tant que l'on continuera dans cette illusion, on se réveillera un jour avec un banthoustan appelé Palestine, une espèce de réserve comme celle que les yankees ont réservée aux survivants indiens. Car aujourd'hui, penser qu'il y aura une solution à deux Etats réellement indépendants relève de la naïveté ou de la complaisance.
La réconciliation irano-saoudienne, à laquelle on peut, désormais, ajouter le retour de la Syrie à la Ligue arabe, est-elle de nature à donner un coup de pouce diplomatique pour la cause palestinienne?
Je ne crois pas que ces éléments influeront de manière décisive sur la cause palestinienne. Comme je l'ai dit plus haut, le rêve d'une solution juste est illusoire. Le conflit russo-ukrainien a mis en lumière la notion de «fait existentiel». Pour la Russie, la Crimée est de nature existentielle, et elle utilisera tous ses moyens, même nucléaires, pour la défendre. Pour le régime israélien, indépendamment de sa configuration politique, le Golan, Jérusalem, les grands blocs des colonies (près d'un demi-million de colons) et le contrôle du Jourdain (qui élimine ipso facto toute perspective d'une entité étatique palestinienne réellement souveraine) constituent des questions existentielles. Ce qui signifie qu'il utilisera tous ses moyens militaires, y compris l'arsenal nucléaire (et il n'hésitera pas à le faire) pour les défendre. La communauté internationale le sait, toutes les grandes puissances le savent. Ce conflit est entré dans une logique où la seule issue, dramatique et injuste, mais l'Histoire est chargée de multiples exemples, devra aboutir à une espèce de protectorat israélien sur un banthoustan palestinien. À moins de compter, ce qui n'est pas si irréaliste, sur un effondrement de l'intérieur de l'entité sioniste.
Ces changements de position atténuent-ils les méfaits de la normalisation Maroc-Israël sur la cause palestinienne?
Pas du tout, ou de façon très superficielle, je dirais même mensongère. Le régime marocain fait comme s'il se préoccupait toujours de la cause palestinienne. Il ne pourrait pas faire autrement d'ailleurs, tant les sentiments de la population sont globalement favorables à une paix juste et digne. Mais c'est de l'hypocrisie totale. Non seulement le Maroc, je dirais plutôt le monarque qui a imposé sa vision et gare à celui qui renâcle, lie son destin à celui du régime sioniste advienne que pourra, mais il s'est entiché de réécrire l'histoire du pays, d'en faire un modèle d'harmonie judéo-musulmane. Rien n'est trop beau pour caresser dans le sens du poil tout ce qui a un rapport, de près ou de loin, avec le judaïsme. Même les Israéliens, dont on connaît le cynisme et leur mépris vis-à-vis des Arabes, n'en reviennent pas de tant de soumission, de collaboration, d'empressement. Alors que même la réalité historique déjoue une telle vision idyllique. Rappelons que 99.5% des 350 000 juifs vivant au Maroc ont préféré s'expatrier. Mais cela n'est pas surprenant lorsqu'on sait que le Mossad a réussi à imposer un de ses agents, André Azoulay, banquier international d'origine marocaine, au poste de conseiller spécial du roi depuis plus de quarante ans.
À l'échelle internationale, on parle de plus en plus d'un nouvel ordre mondial qui s'esquisse avec la montée en puissance du club des BRICS. Sommes-nous devant une nouvelle séquence dans les relations internationales et les enjeux de puissance?
Incontestablement. C'était un phénomène en gestation depuis de nombreuses années, mais il semblait ne pas vouloir décoller ou les circonstances ne le permettaient pas. Mais la guerre en Ukraine a tout chamboulé. La Chine a découvert qu'elle sera la prochaine cible sur la liste et que son intérêt se trouvait dans la victoire de la Russie. L'Inde a fait le même raisonnement. Tous les pays qui ont une raison, valable ou non, de craindre l'impérialisme yankee et ses méthodes de voyou, comme de saisir unilatéralement des réserves monétaires, ou un boycott illégal ou même un bombardement meurtrier, ou de se faire juger par la CPI, profitent des circonstances favorables pour adhérer aux BRICS, changer d'alliances, se débarrasser des réserves en dollars. L'Occident se retrouve isolé, avec un déficit énorme en énergie, une désindustrialisation massive, des crises sociales énormes, soumis à une nouvelle religion du climat et du genre, complètement déboussolé. Et incapable de relever le défi stratégique que lui impose la Russie. On assiste à un retournement extraordinaire dans les relations internationales.


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