L'Algérie a-t-elle une classe politique capable de prendre la relève de l'ancienne équipe dirigeante dont la mission libératrice du pays a été prolongée jusqu'à nos jours. Les partis politiques algériens, nés en majorité dans le sillage de la révolte d'octobre, qui se voulait un début de rupture avec un système politique, bâti sur les préceptes idéologiques du parti unique, ont-ils apporté un plus à la société? En d'autres termes, la classe politique, représentante de la nouvelle génération, a-t-elle su être à la hauteur des aspirations populaires et porter les espoirs de changement nourris par plusieurs générations? La floraison de partis politiques nés après 1988 a certes enclenché une dynamique qui a mobilisé presque la totalité des classes sociales sur des sujets touchant à différents thèmes sensibles allant du problème identitaire au projet de société. En voulant tout réformer et tout de suite la classe politique naissante s'est retrouvée piégée dans le cercle infernal des débats stériles et sans lendemains. L'intrusion dans le paysage politique d'apprentis sorciers et de candidats au recyclage en matière politique en plus d'acteurs téléguidés par de puissants centres du pouvoir sont les éléments qui ont travaillé en faveur de la décrédibilisation de cette classe politique. Des partis comme le FFS, le RCD, El Islah, Ex-FIS, PRA, Pnsd, MDA et autres regorgeaient de cadres politiques promus à prendre la relève de l'ancienne génération issue de la guerre de Libération nationale ayant fourbi ses armes sur les champs de bataille et dans le feu de l'action guerrière. Les années d'après indépendance et le règne de la pensée révolutionnaire et socialiste sont le parcours logique et le prolongement de leur «mandat» jusqu'à l'avènement d'une nouvelle génération qui a investi le terrain après avoir activé longtemps dans la clandestinité. C'est le cas, aussi bien, des militants de la gauche et de la cause identitaire amazighe que des islamistes. Sous la houlette de Hocine Aït Ahmed, une première promotion de cadres politiques, jeunes et enthousiastes, prend les commandes d'une protesta ciblant la Kabylie. La prison sera une halte obligée dans leur parcours de militants. Feu El Hachemi Naït Djoudi, Saïd Khelil, Saïd Sadi, Ferhat M'henni entre autres sont de cette école. Certains d'entre eux seront les fondateurs de partis politiques et d'autres promus à des porte-feuilles des différents gouvernements dirigés par Hamrouche et Ghozali. D'autres, moins chanceux, seront évacués de la vie politique, malgré leur talent, après avoir résisté au puissant courant du «suivisme politique» auquel ils ne se sont jamais identifiés. C'est presque le même scénario qui sera reproduit dans la maison des partis islamistes et autres modernistes. Ainsi, tour à tour, Benachenhou, Naït Djoudi, Mérani, Saïd Guechi, recrutés parmi les dissidents de leurs partis respectifs, seront enrôlés dans les staffs gouvernementaux successifs (voir l'article ci-contre de F.Djouadi). La «mode» fera recette et sera le passage recherché pour accéder à des postes de responsabilité au sein des institutions de l'Etat. Noureddine Boukrouh, Amara Benyounès, Khalida Messaoudi en sont les exemples frappants. L'alternative promise sera ainsi phagocytée par la machine politique du système et les tentations miroitées par l'exercice d'une partie du pouvoir. Mais qu'a-t-elle produit cette élite politique issue de la génération post-indépendance? Mis à part le fait de se recycler dans la défense de thèses politiques longtemps combattues. La nouvelle carte politique a donné lieu à l'émergence de nouvelles forces politiques sur la scène nationale telles que le HMS de feu Mahfoudh Nahnah qui a fait de sa stratégie politique de «l'entrisme» un cheval de bataille qui a permis à ses jeunes cadres de s'adonner à l'exercice de la gestion des affaires de la cité au sein des hautes instances de l'Etat. C'est le cas du dynamique ministre des Travaux Publics, Amar Ghoul, qui marque son passage actuel par le lancement des grands chantiers dans son secteur. La participation du HMS à l'Alliance présidentielle aux côtés du FLN et du RND, qui sont les deux grands pourvoyeurs des institutions étatiques en cadres, a permis à son leader Boudjerra Soltani de créer une passerelle qui permettra d'arrimer le réservoir des cadres de son Mouvement à l'organigramme des structures étatiques. En attendant de trouver une véritable alternative au pouvoir actuel et à son personnel politique puisé dans les rangs de partis politiques suivant des procédés traditionnels basés sur des calculs ou de quotas, mettant de côté de véritables compétences faute d'avoir une chapelle politique, on est en droit d'espérer une réelle réforme qui donnera à l'Algérie les hommes qu'il faut pour relever les défis.