Au coeur même de la région sahélienne, le Niger est l'ultime allié de l'ancienne puissance coloniale qui entend poursuivre le «combat» contre la vague terroriste qui submerge la partie subsaharienne du continent, malgré les récentes déconvenues au Mali et au Burkina Faso où la force Barkhane a été contrainte de plier bagage. Prenant acte d'une puissante montée de la contestation dans plusieurs pays, Paris a annoncé, voici quelques mois, une refonte de sa stratégie diplomatique et militaire afin de maintenir et de conforter, tout à la fois, sa présence «plus que nécessaire» dans cette partie du continent même si elle demeure minée par l'instabilité, la précarité et les assauts sanglants des groupes extrémistes comme l'Etat islamique du Grand Sahara (EIGS), proche de Daesh, et Aqmi, liée à Al Qaïda. Comme le Mali en 2020 puis le Burkina, un an plus tard, le Niger est donc le troisième pays du Sahel à succomber à la tentation du coup d'Etat, au motif que la lutte contre le terrorisme n'a pas donné les résultats escomptés. Cet argument vient s'ajouter à d'autres qui ont trait au blocage persistant des économies sahéliennes, malgré d'importantes richesses. Celles-ci, disent les partisans des insurrections, profitent aux forces étrangères chargées de préserver leur pré carré par les pays mandataires. Comme au Mali, au Burkina et en Guinée, le Niger est ainsi secoué par une onde de choc dont on a observé les effets lors de la manifestation de soutien aux putschistes qui a vu la foule agiter des drapeaux russes pour signifier leur colère et leur refus de la persistance d'un ordre révolu. Sauf que les choses sont loin d'être aussi simples, au plan de la jurisprudence comme à celui de la légalité internationale. C'est pourquoi la Cédéao a fixé un ultimatum de 7 jours pour que le Niger retourne à cette légalité, brandissant l'épée d'un «recours à la force» et un blocus économique immédiat. Avant elle, l'Union africaine avait, elle aussi, donné un délai de 15 jours pour le retour à la normale, intensifiant la pression sur les militaires qui gardent la mainmise sur l'Etat nigérien. Contrairement aux autres pays du Sahel, le Niger est, avec le Tchad voisin, une des clés de voûte du système politico-militaire français dans la région sahélienne, surtout qu'il fournit à l'Union européenne et, principalement, à l'ancienne puissance coloniale 20% de l'uranium dont elles ont besoin. On voit mal, dans ces conditions, comment le général Tiani et ses partenaires peuvent résister indéfiniment aux pressions de plus en plus pesantes qui émanent aussi bien de la Cédéao et de l'UA que de l'UE et des alliés occidentaux, au moment où la Russie est confrontée à un bras de fer persistant en Ukraine.