Joe Biden a tenté de souder les Américains derrière la défense d'Israël et de l'Ukraine afin d'arracher le consensus politique pour les financer. En campagne pour un second mandat, il s'adressait hier à la nation, depuis le Bureau ovale, insistant sur la «réponse aux attaques terroristes contre Israël et à la brutale agression de l'Ukraine par la Russie».»Il va faire le lien entre ces événements (...) et les vies des Américains ici, et expliquer pourquoi cela doit nous importer», a expliqué l'un de ses conseillers. Après son voyage à Tel-Aviv, le démocrate de 80 ans veut aussi renvoyer aux électeurs l'image d'un homme d'action et de décision. Joe Biden est le seul chef d'Etat à s'être rendu dans une zone de conflit à deux reprises: à Kiev en février et à Tel-Aviv. Dans l'avion du retour, le président, dont les échanges impromptus ne sont pas le fort, a fait une rare visite aux journalistes, pour bien appuyer son message.»Je suis venu pour obtenir quelque chose, et je l'ai obtenu», a-t-il dit en référence au soutien inconditionnel de l'entité sioniste. Selon une source proche des discussions, la Maison Blanche veut réclamer au Congrès une énorme enveloppe de 100 milliards de dollars pour l'Ukraine, Israël, Taïwan et la crise migratoire à la frontière avec le Mexique. Si les adversaires républicains de Joe Biden sont hésitants sur l'aide militaire à l'Ukraine, qui pourrait se tarir rapidement faute de fonds supplémentaires, ils sont les premiers à réclamer un appui massif à Israël, une posture musclée sur l'immigration et une attitude ferme face à la Chine. Mais les conservateurs sont aussi accaparés par leurs querelles internes. Le Congrès de la première puissance mondiale est paralysé, parce que la droite dure essaie d'imposer l'un des siens comme chef de la Chambre des représentants. Joe Biden prend un risque: s'il n'arrive pas à rassembler suffisamment de voix au Congrès, où il ne contrôle que le Sénat, les Etats-Unis vont droit, une fois de plus, à la paralysie budgétaire, le «shutdown», le 17 novembre prochain. Mais, sans doute, un accord jaillira in extremis, évitant le blocage de l'administration américaine. Le positionnement de Joe Biden sur Israël lui vaut certes des louanges jusque dans les sphères conservatrices. Richard Haas, ancien conseiller diplomatique dans l'administration de George W. Bush, a qualifié de «magistral» son discours à Tel-Aviv. Mais de là à rallier des élus républicains, à un an ou presque des élections, quand son grand rival Donald Trump est favori pour l'investiture du parti... La droite dure a déjà commencé à étriller l'annonce d'une aide humanitaire américaine de 100 millions de dollars pour la bande de Ghaza. A l'inverse, le positionnement très ferme du président américain, qui a parlé du «devoir» d'Israël de se défendre, crispe l'aile gauche du parti démocrate. Les jeunes Américains non plus ne s'y reconnaissent pas forcément. Selon un sondage de l'université Quinnipiac, les électeurs américains de moins de 35 ans sont majoritairement hostiles (à 51%) à des livraisons d'armes à Israël, alors que les électeurs plus âgés y sont majoritairement favorables. En 2020, c'est entre autres grâce à la forte mobilisation de jeunes électeurs que Joe Biden l'avait emporté.