La tension monte entre le Soudan et son voisin immédiat, le Tchad, qui a expulsé plusieurs diplomates. Mais le feu couve également avec les Emirats arabes unis, financiers et parrains de l'engagement soudanais dans la guerre au Yémen avant de devenir un acteur conséquent du conflit qui oppose les généraux al-Burhane et Hamdane Daglo. Là aussi, des diplomates émiratis ont été expulsés, des échanges virulents d'accusations se multiplient, chacun dénonçant l' «Etat-mafia» auquel il fait face, l'armée soudanaise du général Abdel Fattah al-Burhane dénonçant le soutien qu'apporteraient les Emirats arabes unis aux Forces de soutien rapides (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo. Fin novembre, le général Yasser Atta, numéro deux de l'armée soudanaise, n'a pas été avec le dos de la cuillère dans son procès envers les Emirats qui, non contents d'être un «Etat-mafia», ont pris «le chemin du mal» avec des financements et des livraisons d'armes aux FSR, par ailleurs responsables de nombreuses exactions envers la population civile soudanaise. Selon lui, ces livraisons d'armes lourdes ont été opérées à partir de l'Ouganda et de la Centrafrique avec le concours du groupe Wagner présent dans ces pays, notamment à Bangui. «Avec l'affaiblissement du groupe russe Wagner, leurs avions sont passés par le Tchad. Depuis une semaine, ils se posent même à l'aéroport de N'Djamena», a ainsi révélé le général Atta qui a également souligné le rôle «néfaste» joué dans cette partition par le maréchal libyen Khalifa Haftar, homme lige des Emirats arabes unis dans la crise qui mine le pays maghrébin depuis plus d'une décennie. Le fait est que toutes ces accusations ont été étayées depuis plusieurs mois déjà par des experts qui pointent, nommément les EEmirats, par ailleurs discrets sur leur ingérence dans cette région cruciale du continent. Et en août dernier, le Wall Street Journal avait évoqué la découverte par les autorités ougandaises de stocks d'armes dans un avion-cargo officiellement mandaté par les Emirats pour apporter une «aide humanitaire» aux réfugiés soudanais présents au Tchad. Il aura fallu le risque flagrant d'une défaite consommée face aux FSR pour que le général al-Burhane et ses hommes décident de s'en prendre ouvertement aux défis conjugués de Haftar, Wagner et des Emirats arabes unis. D'où la sortie tapageuse du général Atta qui fait abstraction de l'engagement commun de Haftar et d'al-Burhane dans la guerre au Yémen où ils ont fourni des milliers de mercenaires au chef de l'Etat émirati très actif dans la coalition emmenée par l'Arabie saoudite contre les rebelles Houthis. Au Soudan mais aussi dans d'autres pays du Sahel, les EEmirats ont développé depuis une décennie, au moins, une stratégie axée sur un travail de sape discret mais effectif, tout en profitant des réserves en or d'un Soudan où la population risque une catastrophe humanitaire.