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L'homme dans l'ombre de son ombre
MEMOIRES DE TALEB-IBRAHIMI
Publié dans L'Expression le 01 - 10 - 2006

Il est des parcours que la destinée trace depuis la naissance, sans que l'être ait l'infime pouvoir de changer leur cours.
«Peux-tu nier qu'en assumant la charge de l'Education nationale, tu perpétueras l'oeuvre de ton père? Dans chaque ville, dans chaque village que tu visiteras, on te dira: le Cheikh est venu ici telle année pour inaugurer telle medersa ou telle mosquée», lui dit feu Houari Boumediene pour le convaincre d'accepter le poste de ministre de l'Education en juin 1965. Mais Taleb vient de subir l'avilissement de la torture. Son grand tort est d'être le fils de Cheikh Ibrahimi, président de l'Association des Ulémas. Il répond par un «oui» car Boumediene a su toucher la corde sensible.«En prononçant ce oui, pouvais-je deviner que j'allais m'engouffrer dans une nouvelle ´´prison´´ qui allait durer près d'un quart de siècle?» Ainsi se termine le premier tome de Mémoires d'un Algérien, Rêves et épreuves (1932-1965) de Taleb-Ibrahimi, publié chez Casbah éditions.
Ecrit au présent narratif, le texte coule comme l'eau de source. Le lecteur ne rencontre aucun obstacle, aucun ressentiment; il est conduit par la main dans les sentiers escarpés de la mémoire. De Sétif où il est né au jardin féerique de Tlemcen puis à Alger puis à travers tout le pays puis au Caire puis en Palestine...il suit, pas à pas, son père jusqu'à se confondre avec son ombre. Quand on naît Ibrahimi, on trouve des difficultés énormes à redevenir Taleb. Pourtant le patronyme de Bachir Ibrahimi est, à l'origine, Taleb et, Ibrahimi n'est que son pseudo. En reprenant son nom d'origine, Taleb voulait s'émanciper, façonner sa propre identité. Il y est parvenu après une longue vie meublée de péripéties.
Le 1er novembre 1954, il débarque à Paris pour rejoindre la faculté de médecine. Dès l'arrivée, il est pris dans la nasse des événements qui se précipitent. La Révolution vient de se déclencher en Algérie. «Le séjour parisien qui débute le 1er novembre 1954 prendra fin le 27 février 1957 lors de mon arrestation par les services de la police française. Deux années d'une fécondité et d'une richesse incommensurables!», écrira-t-il dans ses mémoires.
«A partir de l'été 1955, le militantisme va prendre le pas sur tout autre considération; d'abord au sein de l'Ugema, ensuite à la Fédération de France du FLN», poursuit-il. «Je suis déjà en relation avec certains cadres de la Fédération qui, informés du projet de création d'une centrale estudiantine, me poussent à prendre la tête.» Il devient le premier président de l'Ugema, le 14 juillet 1955.
Le CCE, conduit par Abane, le somme de prendre attache avec la presse parisienne, avec les intellectuels, les hommes politiques influents pour les sensibiliser sur la question algérienne. Taleb le fait avec brio. Il tisse des liens. Grâce au journaliste Robert Barrat, il rencontre François Mauriac pour évoquer les fantasmes de Montherlant qui fabule dans L'Express. Il tente de le sonder sur la question algérienne mais la réponse de Mauriac est cinglante: «Voyez-vous, depuis mon enfance, on m'a toujours appris que l'Algérie c'est trois départements français. Il vous faudra, mon petit, beaucoup de temps et de patience pour me persuader du contraire.»
Taleb rencontre Camus. L'auteur de La Peste développe l'axe FLN-Le Caire-Moscou. Mais Taleb n'en démord pas. Il se fait inviter par Mme Gabriel Ardant, épouse du conseiller économique de Pierre Mendès-France, «dont le salon regroupe des parlementaires et des universitaires acquis aux thèses mendésistes et favorables à un dialogue avec le FLN». C'est finalement Barrat qui arrive à le faire entrer dans le bureau de Mendès-France. L'axe Moscou-Le Caire revient comme un leitmotiv dans le discours en vogue. «Le FLN est l'espoir des désespérés», lui lance Taleb en plein visage. Plus tard, Barrat lui dira que Mendès-France a été surpris par son «intransigeance».
Il rencontre le roi Mohamed V après son retour d'exil et qui connaît bien son père par le biais d'El-Bassair, Bourguiba auquel il demande de supprimer «rebelles algériens» de ses discours. Ce dernier consent à condition que les Algériens aient des relations «moins ostentatoires» avec son opposant Salah Benyoucef.
En mars 1956, Mouloud Belaouane prend la relève à la tête de l'Ugema. «A partir de cette date, j'entre dans une clandestinité totale qui va durer une année, c'est-à-dire jusqu'au 27 février 1957, date de mon arrestation», écrit Taleb. Il ressort de prison le 8 septembre 1961 pour se retrouver assigné à résidence surveillée. Les réseaux du FLN le prennent en charge. Il est conduit à Bruxelles puis à Dusseldorf où il est accueilli par Omar Boudaoud et Kaddour Ladlani. A ce moment, la crise couve entre le Gpra et l'état-major. La Fédération penche plus du côté du Gpra. Il se rend à Tunis. «Les alliances et les contre-alliances se nouent et se dénouent, au gré des affinités régionales et des intérêts claniques». Mais Taleb est atteint de leucémie. Fanon préfère l'envoyer se soigner aux USA. Krim lui demande de faire partie de la délégation officielle du Gpra, chargée de défendre le dossier devant l'Onu.
L'été 1962 sera chargé de passion, de haine, de joie, de crainte et d'angoisse. Ben Bella demande à Cheikh Ibrahimi de le rejoindre au Maroc pour l'accompagner jusqu'à Tlemcen. Ibrahimi refuse en essayant de se placer au-dessus de la mêlée. «Je suis prêt à rentrer aujourd'hui afin de les conjurer d'éviter la déchirure», écrit-il dans Al Djoumhouria. Le 3 juillet 1962, «Ben Khedda et le Gpra rentrent à Alger où ils reçoivent un accueil triomphal. Le 11 juillet, Ben Bella rentre d'Oujda à Tlemcen où il est reçu tout aussi triomphalement». La suite est connue. Taleb rejoint l'hôpital Mustapha pour se consacrer à son métier qui le passionne.
Curieusement, son nom figure parmi les congressistes, en tant que «porte-parole» de l'opposition. Sous la dictée de Cheikh Ibrahimi, il rédige la fameuse lettre adressée au congrès du FLN de 1964 où il leur demande de bâtir «ensemble une Cité de justice et de liberté, une Cité où Dieu aura sa place». Ben Bella rend visite au Cheikh, tente de le rallier à sa cause, mais rien à faire. Il tente alors de convaincre le fils en lui proposant des postes alléchants. Rien à faire. Taleb, culotté comme il est, dresse le réquisitoire du nouveau régime par le biais d'une note. Il est arrêté le 12 juillet 1964 chez lui par des policiers en civil. C'est la descente aux enfers.


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