Ces cas malades recensés sont des cas dus, en particulier, aux flux de mobilité de personnes des régions frontalières limitrophes de l'espace sahélo-saharien et aux bouleversements climatiques ayant favorisé la transmission des agents pathogènes de ces maladies issues d'une autre ère. Le plus grand nombre de cas malades aurait été relevé dans la commune de Timiaouine à l'extrême sud du pays et les zones voisines de l'espace sahélo-saharien. Aussi et selon un communiqué du ministère de la Santé, les wilayas de Tamanrasset, In Guezzam et Bordj Badji Mokhtar, ont signalé l'apparition de cas de maladies de la diphtérie et du paludisme. En termes d'analyse, l'Algérie subit les conséquences sanitaires des crises climatiques dans la région vulnérable du Sahel associées aux conflits de faible intensité impliquant des populations nomades qui poussent à une intensification des flux migratoires. Depuis 2020, les vagues de déplacements forcés dans la région dite des «trois frontières», qui regroupe le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Tchad, a porté à plus de 2,6 millions le nombre de personnes contraintes de fuir leur propre pays dans la région. Les femmes et les enfants sont les plus gravement touchés par cette crise. Selon les experts sanitaires, au Sahel, les changements climatiques et environnementaux peuvent avoir un impact direct sur la santé des populations (santé individuelle, manque d'eau potable, diminution de la production vivrière et aussi un impact indirect (action sur les pathogènes, les vecteurs et leur transmission, sur le milieu (sécheresse, inondation). Certaines maladies respiratoires, en particulier les infections respiratoires aiguës dues aux virus grippaux et autres virus respiratoires, sont fortement liées aux variations climatiques. Les facteurs climatiques influençant la transmission des infections sont la température, l'humidité, la pluviométrie et la vitesse du vent. Ces mêmes conditions climatiques conditionnent la survenance des épidémies de méningites. L'impact de ces maladies liées à la variabilité et au changement climatique est d'autant plus important au Sahel que les populations sont démunies et les infrastructures sanitaires insuffisantes. Des observateurs avertis indiquent qu'au- delà des effets des crises climatiques et des conflits de faible intensité, des menaces malveillantes d'acteurs non étatiques liées aux Cbrn pourraient exploiter cette situation de dissémination d'agents pathogènes comme cela fut déjà le cas au milieu des années 1990. En termes d'analyse, la menace de bio-terrorisme utilisant des agents pathogènes, décrite comme une menace sérieuse par plusieurs organisations internationales et multilatérales est sans nul doute à prendre en compte en perspective au regard des rapports de force politiques et géopolitiques qui secouent la région dite des «trois frontières». La diplomatie scientifique demeure un élément clé de la sensibilisation aux menaces liées à ces fléaux, aussi bien de nature climatique que malveillant, mettant en exergue l'importance du principe des 3S (Sécurité, Sûreté, Sauvegarde). *Expert en géopolitique et membre du Comité d'experts du World Econolic Forum et du groupe 'Track-2' du système des Nations unies (Unscr-1540).