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L'apôtre du bédoui baladi
Cheikh Hamada, le chantre du chant identitaire
Publié dans L'Expression le 19 - 10 - 2024

C'est sans nul doute, que j'évoque cette haute personnalité de la culture, et des arts algérien, dans un contexte où la valorisation de cette donne se doit d'être (re)visitée, en s'appropriant tous les paramètres, ressources, et outils, susceptibles de définir, et d'amplifier la source mère et ses éléments effectifs, qui représentent son historiographie, son état mémoriel, humain, pratique, esthétique, littéraire, entre autres, contre toutes nuisances d'ici et là. Cette mémoire séculaire, n'est pas sans reste, à l'abri de ces aléas, et des agissements de tous bords. Combien d'oeuvres écrites, peintures, sculptures, et autres, antérieures, et actuelles, prirent la tangente, depuis, au détriment des artistes, et hommes de culture (mes oeuvres y comprises). Comment définir cela?
Qui ne connaît pas ce monument de la culture algérienne, et des arts populaires? «Une figure de proue», signifiait la classe européenne à son égard, et ce n'était que justice. Le bédoui d'où qu'il vienne, de l'Ouest, du Sud, de l'Est, ou du Centre, relève de la même sémantique populaire, des mêmes caractéristiques, et typologie, sur notre ancestralité millénaire, de par certaines particularités dans la forme. Cheikh Hamada, ordonnera cette tendance chaâbia (populaire) du fond du terroir ancestral, des cheikhs bâtisseurs de ce patrimoine national. Une personnalité forte, humble, et juste, incarnant à jamais cet héritage centenaire. C'est en ces termes qu'on le définira désormais, sa traversée immensément pourvue de richesses artistiques, historiques. De l'oralité, des chants de coeurs enfouis dans l'ancestralité, transcendant les temps, valorisant l'identitaire, dans la bonne conduite culturelle, mais d'autres, inversant les valeurs intrinsèques, comprimant dans l'ignorance, dans l'inculte, osant dénuder la mémoire collective. Chose non étrangère aux esprits éveillés. Hadj Hamada, de son vrai nom Gouaich Mohamed est né en 1889 à bled touahria, daïra de Aïn Tedles, à 24 km de Mostaganem. Fils de Gouaich Abdellah, il reprendra le métier de son paternel, l'agriculture, pour pallier le manque vivrier familial. À 17 ans, il vit le rôle d'adulte, soumis aux tribulations du diktat colonial. C'est dans ce contexte imprévisible, qu'il s'appropria la diversité artistique, de personnalités des arts «indigènes», auprès de l'élite, la nahda (pionniers), s'infiltrant, pour étancher sa soif du savoir, et en acquérir l'essentiel. Un mouvement incommensurable, exemplaire, l'abreuva jusqu'à l'extasier, de textes, du qaçid d'el melhoun, etc. De sa voix chaude et porteuse, il parcourt les champs, douars (villages), où il amplifia son champ d'écoute. Il est sollicité aux soirées festives, et mariages, tendant son oreille musicale par l'acquisition de sa culture totale.
Deux flûtistes suffiront...
Basculé par l'occupant français, considérant son itinéraire (culturel) un délit, il plie bagage avec sa famille pour Tigditt, Mostaganem, en 1910, où foisonne une pépinière de chouyoukhs, il les côtoya de près, à l'exemple de: Med Bendada (1840-1910), Abderrahmane Benaïssa (1895-1950), Bentria Hbib (1902-1950), Belkacem Ould Saïd (1875-1956), figures emblématiques, incarnant l'authenticité des arts, au chaâbi, l'andalou, la poésie, le bédoui musical. Quand bien même les cheikhs Anka, Menouer, Laâchab, E Ankis, Bourdibe, Chaou, et autres, Hbib Hachlef, Mustapha K, Mustapha B, et consorts, à l'acquisition des airs chaâbi, et théâtral, au café riche «Cahouet el Blad», point culminant des rencontres, de réflexions, de méditations, sans omettre le concept mystique, «dini». Le cheikh élargira son champ de prédilection des airs lyriques, au haouzi, malouf, l'arroubi, bedoui, et s'accoutuma, aux cercles culturels dès 1940-1960 à Saidia-El Masrah, et ses renoms, au «Nadi Hillal Takafi» (ex- croissant 1912) avec cheikhs Benkrizi, Benkoula, Bendenia, Med Tahar, une pléiade d'artistes émérites. L'enfant prodige de la bédouinité se rend compte de l'impact musical traditionnel, ses nuances verbales dont il maîtrise, l'ordre transcrit. Ainsi, son prélude baladi (genre citadin), prendra corps, forcèment. Il ordonnera ce nouveau modèle, aux composantes humaines, musicales, définies. Deux flûtistes suffiront, dans l'ordre des six «gassabines» habituels, libérant ce condensé accompagnement-chant, selon la rythmique du cheikh. Une vue géniale accomplie, avec ses icônes flûtistes, en Boudissa, Abbas, et Tekouk, fleuron des arts populaires. 1920-1926, Il est sollicité chez le Libanais «Baida Phone», à Paris, enregistrant Ya aoudi bya sir, qacid sentimental, traçant son itinéraire auprès de poètes de renoms tels: Bentobdji AEK (de Abdelkader ya Boualem), Bensebane, Bekheira, Ben Yekhlef, répondant à sa thématique incontestable, du XXe S. Puis El ghiem der adlam, ficelant le passé contrariant, déraisonnable, et cruel. Sa notoriété accomplie, il est invité par le roi Mohammed V du Maroc, et en Tunisie, à maintes reprises, portant l'étendard lyrique à son apogée. Ainsi, nombreux disciples s'abreuveront de son modèle édifiant, les cheikhs Aïn Tadles, Mamachi, Bouguirati, etc. 1930 est ponctuée par une rencontre historique avec El Ousted Med Abdelwahab, à Paris, éminent compositeur-chanteur égyptien, ils échangeront leur savoir au sens de la culture (arabe), reconnaissant en lui une éminence particulière. Le baladi prit toute sa dimension, les studios «La voie de son maître», «R.C.A», «Philips», avec ses Miloud ya Miloud, en 1926, de Mustapha.B, Aya Neghdou de A.E.K. Khaldi, émanent d'un acquis qui requiert des atouts dans les 45, 78, et 33 tours, dans ses 600 poèmes. Ya Ouchem de Ben Msayeb, Ya Bouya ki rani, de Bentriki Ah, un patrimoine référentiel, et un acquis conséquent en faveur des publics. Les frontières n'étant pas un obstacle à l'art, il parcourt les chemins transversaux du Maghrib, avec Kadour el Allami, Abdelaziz El Maghraoui, Bensliman. Cet être ultra-sensible, contemplateur, aussi, révélateur, hors des pensées simplistes, et réfractaires, s'affirmant dans Lesnam du poète Charef Bekheira, sera un point d'honneur dans l'affirmation de soi et aux artistes.
Dignité et honneur
Sa scolarité inexistante, au temps déloyal, et raciste, dépouillant «l'indigène» à son élévation intellectuelle, et les frustrations sociales aidant. Clairvoyant, il fit ses études auprès de ses fils, assimilant le français, et l'arabe, d'un trait. Dates, 1955-1958, ses enfants, Mohamed et Abdelkader tomberont en martyrs, pour que vive l'Algérie libre. Vivant cette déchéance douloureusement, il demeurera fort. Cheikh Mazouz Bouadjadj fut admis, son disciple, lui promulguant les mesures (el aouzanes) du chii'r el melhoun, chose faite auprès de son pair spirituel. Un esprit sélectif et draconien, il élaborera les références des genres: d'el guebli, btalhi, berouagui, bedoui, aux mélodies. Il est dit qu'il foula les planches de l'antique «Olympia», vers 1938, autant que cheikh Aïssa Djermouni (1876-1946), la chaude, et puissante voix de l'Est. Ainsi, il reformula sa trajectoire, pour ravir et honorer son milieu, et à d'autres. IL s'investira plus de 50 années dans l'hémisphère artistique, corps et âme, de 1910 à 1968. Réunissant à lui seul l'histoire, l'identité culturelle du pays. Il se fera le messie inconditionnel de la condition traditionnelle de son milieu, de ses pairs qui n'ont pas eu ces privilèges d'être entendus, écoutés, et promus dans ce parchemin scabreux, des éditions, spectacles, expositions, dignes de leurs noms. Ils seront engloutis par l'ère mercantiliste, des pseudo...arts lesquels fondent et dé-fondent. Le cheikh en avait conscience de cet état malveillant, il contribua dans son élan, dont il fera l'apologie des tenants du droit de leur culture originelle, et mettre à nu cette fausse «nature», aux dysfonctionnements (volontaires) du patrimoine populaire. Il sut amasser la multiplicité des faits, de connaissances (socio-culturelles), pour la mémoire commune, collective, et des intérêts des artistes, jusqu'à son dernier souffle. Sa paternité originale engendra cette symbiose, propre à son caractère de justice, des droits artistiques inaliénables.
Jamais, au grand jamais, il n'eut recours à une quelconque doléance pour service rendu, sa dignité et l'honneur qu'il portait aux siens, particulièrement à son art, étaient au-dessus de toutes autres considérations. Sa destinée fut inscrite à sa naissance, s'abreuvant des paroles du peuple. Cheikh Mahieddine Bachtarzi, l'immortalisa comme tel, lors de sa participation à des tournées en Algérie, ou à l'étranger, début 1960, «Cheikh Hamada mérite tout mon respect, c'est un Grand dignitaire qui reflète l'authenticité de notre culture populaire», fin de citation. À Paris (France), toujours, avec son ami El hadj El Anka, sirotant un café, l'avenante fut surprise par cet être enturbanné...saisissant la chose, il répliqua intelligemment, «Madame, puis-je avoir votre stylo SVP», celle-ci resta ébahie devant ce français impeccable, il l'a décrite illico dans: Ya Roumya, ce poème sera inscrit dans les annales. Contenant les trames de l'Histoire, et celles d'actuelles, ramenant cette esthétique vers les Bnatt Bahdja, et La Tloum el Euchak. Il côtoya des érudits, en cheikh Mustapha Benhalouch, perfectionniste, aux nuances linguistiques, il s'affirma comme tel à ses côtés. Cheikh Hamada incarnera l'élément conceptuel, des genres ancestraux, et eut sa 1re consécration en 1938, au Festival du chant populaire en France (Paris), avec hadj el Anka, Skandrani, honorant l'ère de l'«indigénat». Ya Allah ounis fi lilett el qbar, de Sidi Lakhdar Lakhal Benkhlouf, laudateur du Prophète (Qsssl), à son élan final, avec contemplation, et méditation, il lèguera cet immense trésor immatériel pour la postérité, salué par la haute sphère, et son cher public. Après La Mecque, il rejoint ses pairs dans l'Au-delà en 1968, âgé de 79 ans.

*Ecrivain, plasticien, comédien sculpteur, marionnettiste, ex-Prof des arts et culture, ex-chargé des festivals.
Abdelkader Dadi ABBOU


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