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Le bon grain et l'ivraie
ALGERIOPHOBIE
Publié dans L'Expression le 19 - 06 - 2008

Les extrémistes s'inventent un nouvel ennemi, cherchent l'affrontement et font diversion à d'autres problèmes politiques du monde.
Le débat en Europe sur la question du prosélytisme chrétien en rive Sud, qui vise à mettre hâtivement l'Algérie au banc des accusés, est injuste et s'emballe. Le poids de l'histoire, les interférences politiques et la question de la différence plus que celle des convergences pèsent sur les imaginaires. L'oeuvre de ceux qui travaillent au rapprochement doit être consolidée et non point sapée. Les musulmans, les chrétiens, et les hommes et femmes de bonne volonté de tous les horizons, sont appelés à surmonter les crises et les transformer en enrichissement mutuel. Avancer sur les chemins de la fraternité au milieu de signes contradictoires est notre mot d'ordre; même si le «prosélytisme» est intrinsèque à ces grandes religions monothéistes. Reste à différencier de manière nette l'acte légitime de témoigner de sa foi des formes agressives et clandestines du prosélytisme.
La vigilance est de mise
Le respect de la vérité oblige à dire qu'en Algérie c'est plutôt un nouveau épiphénomène, à consonance politicienne et affairiste. Pour tout observateur averti, sans que la notion de complot étranger soit grossie, ni verser dans le stéréotype, d'un côté, nous avons des évangélistes qui font feu de tout bois et pratiquent la provocation haineuse et de l'autre, certains tombent de manière irréfléchie et outrancière dans le panneau en réagissant sévèrement. La seule méthode répressive pour faire face à cette question est inappropriée. 132 ans de nuit coloniale n'ont pas changé les convictions du peuple algérien musulman. Certes, la vigilance est de mise et des règles de droit, doivent être interprétées avec raison pour contrôler et empêcher l'activisme de «sectes», comme pour tout pays, surtout pour celui qui n'a pas fini de cicatriser les blessures causées par l'instrumentalisation de la religion.
Le discernement s'impose. Peut-on être chrétien en Algérie, se demandent des médias étrangers? Si on interroge les citoyens algériens, pour qui 99, 99% l'Islam en est l'âme, dans un pays où le sens de l'être commun est heureusement encore vivace, évidemment ils répondraient par l'affirmative. En précisant qu'il faut dialoguer et se dire la vérité. Sachant que, à la fois, tout abus de l'hospitalité n'est pas conforme à l'usage et que l'intolérance est en contradiction avec les préceptes du Coran, la tradition du Prophète et celle hospitalière de l'Algérie. Non, le rapport avec l'Islam ne bute pas sur le droit à la conversion, mais sur d'autres questions, comme la politique du deux poids, deux mesures, le désenchantement du monde, sa déshumanisation, la remise en cause des valeurs abrahamiques, celle de voir la vie comme une totalité cohérente, du droit d'adorer, dans la vie et la Cité, Dieu, Celui à qui rien ne ressemble. Pour le Coran et pour la plupart des musulmans, la liberté de conscience est possible. Tous les jours dans le monde, y compris en terre d'Islam, on peut constater que le fait d'avoir ou de ne pas avoir de religion, et d'en changer, est un droit humain courant. Un chrétien peut devenir musulman, un musulman, chrétien ou athée.
Chacun est libre et assumera devant l'Eternel sa responsabilité. Comme pour les textes religieux fondateurs, Thora et Evangile compris, le Coran est clair, il ne favorise pas les infidélités, les transfuges; il les déplore comme recul, et les menace pour l'au-delà. Nul ne pourra dire qu'il ne savait pas. Surtout que l'Islam, dernier message, est venu rappeler, accomplir et dépasser les révélations antérieures. Mais aucun être humain n'a le droit de s'immiscer et de condamner. L'acceptation de cette valeur n'est pas l'apanage de la laïcité ou d'un seul pays, mais un principe de tolérance universelle qu'Abraham, Moïse, Jésus et le Prophète ont fondé, quoi qu'en disent certains. C'est un devoir des êtres de foi que de le répéter à ceux qui perçoivent les religions comme bornes, ce qu'elles peuvent devenir dans certaines conditions. Mais nous savons aussi qu'elles sont des sources infinies de dépassement de soi, possibilités incomparables de droits et d'acceptation de la différence.
Le respect de l'autre
L'Islam, en continuité de l'histoire du salut, est ouvert à l'égard des «gens du Livre». La vision se fonde sur le principe coranique: «Pas de contrainte en religion».
Les dérives, notamment ces quinze années ici ou là, sont en contradiction avec quinze siècles d'histoire. Le plus souvent, en ces affaires de prosélytisme en rive Sud, il s'agit plus de manipulations que de foi. D'autant que nos amis catholiques après l'Indépendance, en Algérie, n'ont généralement pas cherché à convertir. Parfois, partis pour évangéliser le monde, beaucoup de prêtres et de pasteurs se sont mis à l'école des peuples, partagent leurs épreuves et ne cherchent pas à les détourner de leur foi originelle si proche. Les prêtres et les soeurs catholiques en Algérie sont appréciés pour leur sens du respect de l'autre. Le peuple algérien ne pratique pas l'amalgame. Certains affirment que les citoyens européens de confession musulmane sont heureux et libres, contrairement aux chrétiens en terre d'Islam.
C'est aller vite en besogne. S'il est vrai que des progrès notables ont lieu pour sortir la pratique de la troisième religion monothéiste des «caves», et que des acquis sont enregistrés, la situation est loin d'être satisfaisante. L'islamophobie, le racisme et des discriminations insidieuses restent visibles. Quoi qu'il en soit, on doit chacun oeuvrer pour améliorer en rives Nord et Sud les conditions de vie des uns et des autres. L'émulation doit tendre vers la générosité et l'hospitalité, chacun devant en même temps respecter les lois du pays et de la République.
Tout comme des musulmans sont préoccupés par cette propagande «d'évangélisation», on comprend que des chrétiens s'inquiètent et s'interrogent sur les réactions jugées excessives et autres mesures restrictives, d'autant que nombre d'entre nous, Algériens musulmans, comme disait en 1861 l'Emir Abd El Kader sauvant des milliers de chrétiens d'une mort certaine à Damas, au nom de notre foi et des droits humains exprimons le souci de la solidarité et du discernement. Il faut garder raison. Car en dehors de ceux qui s'émeuvent sincèrement, des courants islamophobes et algérophobes, mal intentionnés, amplifient la difficile gestion de ce dossier, versent des larmes de crocodile, veulent diviser et asseoir leur influence.
La christianophobie en rive Sud, malgré les mauvais souvenirs du passé de l'Eglise, et les politiques injustes de l'ordre dominant mondial est un phénomène archi-minoritaire. Le père Christian Delorme, ce prêtre objectif, digne disciple du Messie, qui active depuis longtemps par solidarité auprès des jeunes dans la région de Lyon, comme des milliers d'autres catholiques qui ne s'enflent pas d'orgueil, ont raison de dire que «l'Algérie n'est pas une terre antichrétienne». Le pape Benoît XVI lui-même, il y a quelques jours à Rome, en audience, me répétait de nouveau sa confiance dans le peuple algérien afin de préserver la fraternité. En effet, on ne doit pas tomber dans les pièges provocateurs. Tout comme les musulmans ne doivent pas confondre les xénophobes en Europe avec la majorité des citoyens. L'Emir Abd El Kader l'Algérien, précisait avec clarté: «Le tort que l'on a pu faire aux lois d'origine religieuse est, hélas, provoqué davantage par ceux qui veulent en assurer le triomphe par des moyens qui ne sont pas appropriés que par ceux qui les combattent». Il faisait allusion aux extrémismes de toutes les religions qui perdent de vue le projet spirituel libérateur et tolérant. Les extrémistes s'inventent un nouvel ennemi, cherchent l'affrontement et font diversion à d'autres problèmes politiques du monde. Cependant, des signes d'espérance sont visibles pour relancer le dialogue et empêcher que le monde ne sombre dans la méconnaissance, les injustices et la marchandisation. Musulmans et chrétiens, citoyens de notre temps embarqués dans le même navire, on doit pratiquer l'ouverture, pour vivre ensemble et apprendre à réguler les différends, pas à les refouler ou les exacerber. Les sages savent que nul n'a le monopole de la vérité, même si chacun croit en détenir la part parfaite.
(*) Philosophe algérien
Prochain ouvrage: Conversation avec le Pape


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