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Le temps des desperados
ILS SONT ENCORE 400 À 600 À PRATIQUER LA «TERREUR SACREE»
Publié dans L'Expression le 13 - 05 - 2002

Entre le religieux, le politique, le crime et l'aventure, ils ont créé un nouveau concept: le gangsterrorisme.
A partir de 1997, la désintégration des groupes armés est évidente. La courbe décroissante des actes de violence le démontre nettement. Cette année prend fin avec la proclamation d'une trêve négociée. Mezrag, à la tête de quelque 3000 hommes, dépose les armes. Ses chefs militaires à l'Ouest (Ahmed Benaïcha) et à l'Est (Mustapha Kébir et Madani Mezrag lui-même) en font autant. Le Mouvement islamique de la prédication et du combat (Mipc) agit de la même façon.
La Ligue islamique de la daâwa et du djihad (Lidd) par l'intermédiaire de Ali Benhadjar, et l'énigmatique Fida, par le biais de Ahmed Abou el-Fidâ, intègrent ce processus de fin des hostilités.
Alger perd la plupart de ses figures charismatiques djihadistes: Ahmed el-Oued, Layada, Cherati, Djamel, l'émir de l'Algérois, Lamamra Djebbara, puis Sid-Ahmed Lahrani, Napoli, Hocine Flicha, etc. Des émirs de moindre importance tombent entre Alger, Hussein Dey, El-Harrach, Baraki et Sidi Moussa.
Tizi Ouzou perd, entre 1995 et 2002, ses principaux chefs de katibate à l'exception de Hattab: Ahmed Baïche se rend aux autorités en décembre 1995, Saïd Mekkaoui est abattu en avril 1999, Arezki Aït Ziane en novembre 1995, Boudjenah est abattu près de Oued Aïssi en 1999, Mouffok le sera le 4 septembre 2000 à Tizi N'kouilal, dans le Djurdjura, l'émir Zoubiri est mis hors d'état de nuire le 24 décembre 2001, puis enfin Hadj Ali, la «hantise de Draâ El-Mizan» est abattu le 24 mars 2002 dans les maquis de Boumehni.
A l'Est, à l'Ouest et au Sud, les émirs tombent les uns après les autres. Kada Benchiha, Mustapha Akkal, Djeriri, Benslim, etc. sont soit abattus soit destitués. Désormais, c'est le règne des jeunes loups, de la nouvelle vague de desperados, jeunes, sans connaissance théologique profonde, ni attache religieuse, mais déterminés, implacables, irréductibles.
Cette nouvelle vague ne s'encombre pas de principes ni de jurisprudence légale. A cheval entre le djihad, le terrorisme, le brigandage, la criminalité et l'aventure, ils créent ce qu'on peut définir comme du «gansterrorisme», c'est-à-dire un terrorisme au nom d'Allah allié à un gangstérisme mafieux avéré.
Dans une cache qu'on a pu voir en mai 1999 dans les monts boisés de Boukhanfar, sur l'axe routier Thénia-Zemouri, il y avait des couvertures, de la nourriture (pâtes, lait en poudre, café, semoule, sucre, etc.) des vêtements, des ustensiles de cuisine, des médicaments, mais aussi des paquets de cigarettes (Rym, Marlboro, etc.), des barbituriques (Diazépam, Rivotril, Tranxène 10 mg, etc.), des briquets et des... bandes dessinées.
Contrairement à ce que pensaient beaucoup de chercheurs, le GIA a été le fait de jeunes. Ni l'apport des ex-afghans, ni celui des ex-bouyalistes, ni celui du MIA de Chebouti n'ont été déterminants devant la hargne des jeunes Sellamna Noureddine, Allel Mohamed, Layada Abdelhaq, Chikhi Omar et Abou Hafs, même s'il est permis de croire que le poids de Mansouri Miliani, Sid-Ahmed Lahrani, etc., a été pesant.
Cherif Gousmi prend en 1994 le commandement général du GIA à 26 ans.
A la fin de la même année, Djamel Zitouni est plébiscité émir national du GIA, et un quinquagénaire, doublé d'un universitaire, de la troupe de Mohamed Saïd, se met, alors, sous son autorité. C'est à 26 ans que Antar Zouabri, le jeune loubard de Boufarik et ex-paumé de Haouch Grau, se retrouve à la tête de la plus meurtrière et la plus importante secte de la planète.
C'est cette pulsion de jeunesse qui continue à battre, à mener les jeunes aventuriers de cette extraordinaire et cauchemardesque épopée post-horreur, de galère en galère. Car pour les irréductibles desperados du GIA actuel, il n'y a plus rien à espérer, plus rien à perdre. Vers la fin de l'année 2001, 5 hommes et 3 femmes ont été abattus dans le djebel Boukhil, près de Djelfa, dans un ratissage militaire. Revoyons les corps: trois jeunes filles, très jeunes encore, dont une au ventre enflé, l'accouchement atteignant bientôt son terme, et cinq garçons, cheveux tressés, les yeux soulignés d'un trait de k'hol, longue barbe et armes moyenâgeuses. Il n'y a pas de doute: nous avons bel et bien affaire ici à de jeunes aventuriers d'un autre âge, jetés tête la première dans une galère politico-thélogique sans issue et sans fin.
Combien sont-ils encore dans cette position inconfortable? 400, 500 ou 600? Dieu seul le sait. Les anciens sont bien sûr gardés pour leur apport: ce sont les pyrotechniciens, les artificiers, les armuriers, les muftis, sorte de juristes-légaux qui sanctifient et légalisent les actes les plus répréhensibles. Mais l'action et la décision restent l'apanage des jeunes, et les groupes armés se renouvellent grâce à ces jeunes.
Ceux qui ont commencé, en 1991, 92 ou 93, l'aventure terroriste avec le GIA ont aujourd'hui plus de 30 ans. Or, on trouve une grande majorité de jeunes garçons âgés entre 18 et 25 ans. D'où viennent-ils? Comment sont-ils recrutés? Quel est le vivier du terrorisme? Comment dissuader un jeune de rejoindre les groupes armés? Par quel raisonnement ce jeune préfère aller se faire massacrer dans des montagnes plutôt que de rester auprès de sa famille?
Telles sont les questions que doivent observer de plus près ceux qui sont chargés d'étudier le phénomène islamiste et/ou terroriste, et telles sont les questions de fond qui doivent être posées, en lieu et place d'autres, vaines, futiles et carrément belliqueuses.
Souvent, lorsqu'on parle de terrorisme, on se trouve en face d'une surmédiatisation des actes de violence et une occultation totale des causes qui les sous-tendent. On ne naît certainement pas terroriste, on le devient.
Souvent aussi, le terrorisme prend naissance à la périphérie des grandes villes, dans les banlieues pauvres, les cités-dortoirs et les haouch d'infortune. Les Layada, Chebouti, Miliani, Zouabri, Hattab et les chefs militaires des groupes armés sont venus de la périphérie d'Alger et de Blida, de Bouzerga, Baraki, Aïn Taya, Boufarik et Larbaâ.
Dans ces zones rurales, justement, l'indigence est réelle, et le langage radical prend facilement. A Chlef, Khemis Miliana, Aïn Defla, Meurad, Hadjout, Larbaâ, Rovigo, Réghaïa, Boudouaou, Sidi Moussa ou les Eucalyptus, les jeunes sont «rassasiés» de malvie, d'oisiveté et de rêves. Les propos teintés de religion prennent comme feu à la paille. En fait, ils sont surtout séduits par le langage radical qui va droit au but. Et c'est parce que les radicaux ont un discours «extrême», qu'ils séduisent. Là où le langage de Rédha Malek, de Sid-Ahmed Ghozali ou de Saïd Sadi échoue, celui d'un Ali Benhadj fait mouche. La raison est située aux plans sensitif et cognitif.
Pour les jeunes desperados des groupes armés, un fait nouveau prend naissance à partir de 1998: il n'est plus question d'édification de l'Etat islamique. Cet impératif, qui a fait les beaux jours du GIA de 1992 à 1997, s'est effrité au fil du temps. Le terrain perdu, les pertes cumulées et le retournement des citoyens, à partir de 1997, contre l'islamisme radical ont fait éloigner les miroitements de l'approche de l'édification de la «cité vertueuse», sorte de monde parfait où seront appliquées les lois de Dieu, la charia.
L'effondrement de ce rêve devait, en principe, aboutir à une fin des hostilités de la part de ces groupes armés. Cela ne s'est pas produit. La raison est que les nouveaux venus à la mouvance djihadiste sont très souvent des personnes issues des milieux où le chômage, l'indigence sociale et les frustrations sont importants et où la violence a fonctionné, depuis longtemps déjà, comme détonateur pour arracher des droits, même les plus légitimes.
C'est ainsi qu'ont pris naissance des «groupes armés privés», sorte de micro-entreprises qui, au moyen de la violence, même la plus cruelle, s'imposent par la force dans la société des gens, et se créent une forme de vie qui est un discrédit jeté à la face d'un monde, un cri de détresse et de refus à la fois jeté au visage d'un monde qui s'est développé en dehors de leurs visions des choses.
Voilà l'aveu d'un repenti de Larbaâ qui nous disait, il y a quelques jours: «Je ne regrette pas d'être ‘‘redescendu'', mais je m'ennuie à mourir dans ce train de vie que vous adoptez avec autant de facilité.»


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