Cheveux couleur de jais. Une voix douce et des yeux de tigresse, elle c'est Ines qui revient au bercail après quelques années d'absence mais avec au bout, la concrétisation d'un rêve. Un départ heureux qui l'a vu évoluer doucement mais sûrement sur les scènes du monde entier. Sous un air espiègle chavire un coeur enflammé, en éveil, l'appel de l'amour, l'impatience, l'attente de l'autre et puis la délivrance, la joie salvatrice de la musique qui étend ses ailes pour écrire son histoire. Envolée lyrique, tristesse, mélancolie, un peu de nostalgie quand même, mais le tout enrobé d'une musique suave, nimbée d'émotion vraie. La candeur d'Ines n'a d'égale que la profondeur du timbre de sa voix qui se marie allègrement avec l'âme d'une artiste à fleur de peau. Ines est une étoile qui éclôt et qui, on l'espère, ne cessera de briller. Inès qui veut dire, «dit lui» en kabyle vient ainsi de sortir son premier album en France, signé sous le label Maboul Music. Conviée à un live pour le compte de Radio-Alger Chaîne III, on ne pouvait rater cette occasion où Inès, seule, accompagnée à la guitare par Karim Albert Kouk - qui a produit, réalisé et réarrangé l'album - et d'un percussionniste, chantait rien que pour nous, les quelques privilégiés dans la salle. Un moment unique, de pure magie, rehaussé par la voix sublime de cette femme, dont le talent ne demande qu'à exploser. Inès égrena une partie de l'album avec professionnalisme et sérénité, prenant le temps d'expliquer chaque morceau. Elle nous fera ainsi voyager le temps d'une balade musicale dans son royaume intérieur gorgé de soleil d'Alger, de souvenirs du pays, parfois joyeux, parfois tristes mais marqué d'une obstination farouche à toute épreuve, c'est ce qui lui a valu d'ailleurs ce parcours sans faute, à saluer. Un album de quatorze titres qu'on devine intime, qui restitue une «tranche de vie,» comme le dit si bien Inès. «Ça parle d' amour, de paix, de tout ce qu'une femme peut rencontrer dans sa vie. Un mélange de tous les sentiments où tout le monde peut s y identifier». «Je suis allée un peu partout dans le monde, j'ai fait de très belles rencontres avec des artistes merveilleux, j'ai réalisé mon rêve, j'ai enregistré cet album qui est là aujourd'hui, un mélange de tous les styles de musique que j'aime de la pop au rock, en passant par la world music et puis de la musique dans laquelle je suis née qui m'a toujours entourée qui est la musique traditionnelle algérienne. C' est aussi un mélange des langues puisque je chante en arabe, français, kabyle et anglais.». Ainsi The fact, interprété en arabe et anglais chante l'amour de l'autre. No matter where you are, est l'histoire de deux être séparés par la mer mais dont l'amour unit indubitablement. So far est un beau morceau aussi sur l'absence, le manque des proches. La baie d'Alger écrite en français, clin d'oeil à Sbhan allh yaltif par moments est un bel hommage au maître du chaâbi Hadj M'hamed El Anka. Khalini Naich écrite quand Inès était à Alger illustre on ne peut mieux sa soif de liberté. Et pour entamer Djazaïria Ines déclare: «Là ou je vais j'ai envie de la crier haut et fort!». Puis de finir avec Bali haïran et The voice. D'autres titres viennent compléter ce sublime album. Désormais citoyenne du monde, Ines a accompagné son mari et néanmoins grand blues-man, partout et a eu le temps de se familiariser avec les scènes du monde entier et tester son album sur différents publics avec succès mais celui qu'elle appréhende le plus, c'est bien celui de l'Algérie. «Je me suis produite en France, au Canada, à Montréal, aux USA, à Washington, à Houston Texas, en Floride, et puis à New York, à Orlando...J'espère pouvoir continuer à faire de la musique, d'autres albums, à chanter. J'espère surtout être à la hauteur de ce que vous pensez de moi. Je compte me produire à Alger la première semaine du mois de janvier avec Arts et Culture. J'ai très hâte, je suis impatiente de revenir. C'est quelque chose qui me tient à coeur, je pense que j'ai fait beaucoup de scène mais c'est elle qui me tient le plus à coeur, celle que j'appréhende le plus et pour laquelle j'ai déjà le trac!». Côté musiciens, nous apprend Karim Albert Kook, Inès s'est entourée des meilleurs dans leur domaine. On citera notamment, Steve Shihan, qui a joué quasiment dans tous les albums de Othmane Bali, et qu'on retrouve aussi dans les albums d'Eric Clapton et Paul Simon. Deux percussionnistes: Kamel Kenfich de l'ONB et Kheiridne Medjoubi, Mehrez El Anka, le petit-fils du rossignol du chaâbi, au mandole, excusé du peu. Aussi, Bouabdallah Khelif, violoniste d'Oran qui assure comme un chef dans les morceaux Salami Alik et Nice and slow. Une très grande blueswoman Beverly Joe Scot qui vient de l'Alabama fait exceptionnellement les choeurs sur The Voice. Il y a aussi, nous apprend Karim Albert Kook, l'exceptionnel Stephan Mélino, guitariste des Négresses Vertes qui fait un beau remix en acoustique de Djazaïria. A la basse, on découvre Jean luis Foiré, à la batterie, Jaquis boulado, et au clavier, Jean Philipe Riquiel, ayant souvent travaillé avec des artistes africains du genre Mory Kante, Salif Keita, Youssou N'dour. Là, c'est sur le morceau Holding back qu'il fait montre de son énergie et talent. Influencée par Tracy Chapman, Noa, les Beatles, Sheryl Crow, Fiona Apple et bien sûr Alanis Morissette, c'est tout naturellement qu'Inès parvient à combiner les styles et les langues, dans un assortiment harmonieux.
