Pour les anciens, la journée est dédiée aux retrouvailles et aux embrassades. Les nouveaux tentent désespérément de trouver leurs marques. Il est clair que le taux élevé de réussite au Bac va à l'encontre des choix des étudiants. C'est le constat qu'ont établi les nouveaux bacheliers, rencontrés hier au sein de l'université de Bouzaréah et de l'Ecole normale supérieure de la même ville à Alger. Aussi, les discussions sur les recours et les mécontentements ont caractérisé le premier jour de la rentrée universitaire. Djamel D. s'est dirigé dès les premières heures de la matinée vers l'ENS pour s'enquérir de sa filière. «On m'a orienté vers le site du ministère de l'Enseignement supérieur pour que je retire ma fiche d'inscription», dit-il. «J'ai obtenu cette information de la part de l'agent de sécurité de l'Institut», a-t-il précisé. Car pour les réceptions, c'est quasiment mission impossible. «Personne d'autre n'a voulu s'intéresser à mon problème», s'indigne-t-il. Généralement, les récriminations des bacheliers ont porté sur les notes élevées qui sont exigées pour certaines spécialités. D'une année à l'autre, les moyennes requises ne sont jamais les mêmes. D'autres bacheliers se plaignent de n'avoir pas été reçus dans certains instituts à cause d'un demi-point manquant au compteur. «Il ne me manque qu'un demi-point pour pouvoir postuler à une formation à l'ENS», dit Karima H., rencontrée à Bouzaréah avec un groupe de camarades. Renseignement pris, il s'est avéré que pour être reçu à l'ENS, il faut disposer d'une moyenne de 14,72 pour les postulants au diplôme d'enseignant dont la moyenne est de 12,88. «Les bacheliers qui font leurs premiers pas à l'université sont un peu perdus», concède le recteur de l'université de Bouzaréah, Abdel-kader Henni. Sans céder pour autant à la fatalité. Il a créé le poste de guide devant faciliter la tâche à ces nouveaux venus et les accompagner dans leurs premiers pas dans ce nouvel univers auquel ils ne sont pas habitués. Mais pour ce premier jour, ce n'est pas vraiment la rentrée. Aucun cours n'est dispensé dans les deux enceintes universitaires de Bouzaréah. «On ne dispose même pas de programme», nous annonce un enseignant au département de psychologie de Bouzaréah. Renseignement pris auprès d'autres collègues réunis dans la salle des professeurs, il s'avère que la tradition consistant à retarder la rentrée, a encore de beaux jours devant elle. «On ne dispense pas de cours aujourd'hui, mais ce sera fait dès la semaine prochaine», annonce l'un d'entre eux. Cela donne du répit aux nouveaux inscrits pour trouver leurs marques. Les carences de l'administrations sont comblées par les organisations estudiantines ou plutôt l'une d'entre elles, à savoir l'Ugel. A l'Ecole normale supérieure, deux syndicalistes venus de Médéa et d'Adrar et qui ont déjà un certain nombre de formations ont dressé une table au milieu de la cour de l'Institut pour venir en aide aux bacheliers. «Ils veulent savoir où sont situées les salles de cours et dans quel groupe ils sont inscrits», nous indique l'un d'entre eux. Mais les problèmes ne s'arrêtent pas là. L'université n'est pas à l'abri de paradoxes. Y a-t-il trop de bacheliers? Y a-t-il une mauvaise orientation? Ce sont les questions que se posent certains enseignants. D'autres préfèrent s'intéresser au phénomène de féminisation des effectifs. A l'ENS, on constate qu'il y a énormément de filles qui choisissent d'embrasser une carrière professionnelle dans l'enseignement. Pourquoi? C'est une enseignante à l'Institut qui répond. «On dispose de nombreux mois de congé, ce qui rend la femme disponible pour l'entretien du foyer familial lorsqu'elle est mariée», dit cette enseignante qui a fait ses études à la faculté d'Alger. Et celles qui ne sont pas mariées, pourquoi choisissent-elles ce métier. «Parce que c'est bien vu par les futurs époux et les futurs beaux-parents.» L'avis des nouvelles bachelières est loin de cette préoccupation. Peut-être que cela ne l'est qu'en apparence, mais les revendications immédiates vont plutôt à des exigences beaucoup plus terre à terre. «Je n'ai même pas encore défait ma valise, comment voulez-vous que je pense au mariage dès cet instant», s'insurge une candidate au métier de Mouloud Feraoun qui a foulé cette école fondée en 1860. Albert Camus, auteur de L'Etranger et de La Peste, est aussi passé par là. A l'ENS, il y a visiblement d'autres soucis à se faire. L'Ecole est un vaste chantier. Les travaux de rénovation ont commencé dès l'été dernier. «Cela va poser d'énormes problèmes d'acoustique», fait remarquer Kader F. qui aurait préféré le calme d'une périphérie d'Alger pour poursuivre ses études. Au préalable, il faut trouver la bonne porte de l'amphithéâtre ou de la salle des travaux dirigés dans ces immenses espaces. Les tableaux d'affichage sont disposés partout pour orienter les étudiants. Y sont collées les listes des étudiants avec les affectations par groupes. Les plus anciens viennent consulter les résultats des examens de rattrapage.