Des centaines de manifestants ont organisé un sit-in pour protester contre la construction de ce mur de la honte. Notre accompagnateur pousse un ouf de soulagement. Hei El Mehbes n'est pas très loin. Point de plaques de signalisation. Point de pancartes, seuls des acacias plantés en nombre en ce lieu où pas âme qui vive, servent de repères. Comme surgi du néant, le sinistre mur érigé par le Maroc pour isoler les populations civiles sahraouies chassées de leur terre est enfin visible. Dressée sur une longueur de près de 2000 km, cette clôture qui rappelle le rideau de fer ayant coupé en deux les deux Allemagnes durant la guerre froide, est truffée d'engins de la mort. En effet, des millions de mines antipersonnel qui ont déjà fait de nombreuses victimes parmi les populations civiles ont été disséminées tout le long de la frontière séparant le Maroc des territoires sahraouis libérés. Afin de sensibiliser l'opinion internationale autour de la cause juste du peuple sahraoui et pousser l'ONU à hâter le processus d'autodétermination, des centaines de manifestants, en majorité des femmes issues des camps de réfugiés de Tindouf, ont organisé un sit-in pour protester contre la construction de ce «mur de la honte». Aux cris de «Non à la soumission, non à la soumission» «Pas d'alternative à la résistance au droit à l'autodétermination», «Lutte totale pour imposer la souveraineté et l'indépendance», les manifestants brandissant des drapeaux sahraouis et des pancartes appelant à la démolition du mur se sont arrêtés à moins de deux kilomètres de celui-ci pour faire entendre leurs voix. De là, on peut aisément observer les mouvements des soldats marocains en faction sur les remparts, guettant le moindre mouvement suspect. Aminatou, une jeune universitaire sahraouie, chargée d'accompagner les journalistes algériens est à la tête de la protesta. Emblème sahraoui à la main, elle crie sa colère «La Namel, La namel heta takrire el massire», relayée par des centaines de voix qui déchirent l'air faisant sortir de sa torpeur ce lieu habituellement paisible. A quelques mètres de là, un groupe de jeunes filles, parmi lesquelles des collégiennes, ont trouvé un moyen très original pour s'adresser à l'administration militaire marocaine. Par des sifflets, elles ont signalé leur présence en huant «les envahisseurs». «Pourquoi ce mur et toutes ces mines. L'ONU doit intervenir et imposer le processus devant aboutir à l'autodétermination du peuple sahraoui et à son indépendance», hurle une autre militante, d'une voix teintée d'émotion et d'amertume.