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«S'exiler hors de soi, le temps d'un texte»
MUSTAPHA BOUCHAREB, ECRIVAIN, À L'EXPRESSION
Publié dans L'Expression le 29 - 05 - 2011

Mustapha Bouchareb est enseignant universitaire et auteur de plusieurs romans. Il nous revient dans cet entretien pour parler de son parcours, de ses projets et, bien sûr, de l'amour de l'Algérie chevillé au corps, pays à nul autre pareil...
L'Expression: Vous revenez après un long silence, à quoi est dû ce parcours d'étoile filante?
Mustapha Bouchareb: Etoile filante, c'est une jolie appellation et elle me convient très bien. En fait de silence, je n'ai jamais vraiment cessé d'écrire, mais il est vrai que je n'ai rien publié depuis fort longtemps et cela est dû à deux facteurs. Le premier est qu'en m'éloignant de l'Algérie, sans jamais pourtant la quitter, car elle m'habite en permanence et parce que j'y reviens régulièrement chaque année, j'ai perdu ma source première d'inspiration. Coupé des senteurs d'Alger, des rires et des cris de ses rues, de la splendeur de ses matins de printemps, quelque chose en moi était entré en hibernation. Le deuxième facteur relève d'une perte de repères littéraires, qui me semble-t-il, est générale et profonde, dans la mesure où tout le monde écrit sur tout et n'importe quoi, dans l'urgence, dans la paresse, dans l'intérêt général, pour dénoncer, renoncer, foncer, tancer, pour la frime aussi, ou tout autre raison: quelle place reste-t-il pour le fait littéraire en soi puisque tout dépend maintenant d'un savoir-faire publicitaire qui utilise l'actualité pour vendre ses produits? Quiconque ne cadre pas dans la catégorie de la littérature de l'instant, a toutes les chances d'être ignoré.
Vos romans se font rares, est-ce un manque de temps ou est-ce l'inspiration? Comment choisissez- vous vos sujets?
L'inspiration n'est pas en cause, puisque j'écris toujours, bien qu'assez irrégulièrement, et donc la flamme est toujours là, tapie au fond de moi. Mais il est vrai qu'il y a problème de temps. Et le temps personne n'en est maître. Cependant, j'essaie autant que je peux, de le prendre, ce temps, à bras-le-corps et de lui imposer un rythme personnel, parce que personne ne peut vous le donner si vous ne le saisissez pas.
Pour ce qui est des sujets, je ne les choisis pas à proprement dire; ils s'imposent plutôt à moi. J'ai porté certains textes pendant des années; d'autres sont nés en en seul jet; d'autres encore ont été construits patiemment, phrase à phrase. Je crois aussi que ce sont les mêmes thèmes qui traversent mes textes depuis mes premiers écrits. Des personnages pris dans les rets du destin, c'est vieux comme le monde, et une telle thématique relève de la question essentielle que nous nous posons tous: sommes-nous libres de nos actes ou soumis aux aléas de la vie, voletant comme des fétus de paille, au gré des vents?
J'affectionne aussi les thèmes fantastiques, par choix esthétique, mais aussi en souvenir des contes merveilleux ou terrifiants de l'enfance ou bien par réminiscence d'anciennes lectures de jeunesse.
D'après vos écrits, vous voyagez beaucoup. Sont-ils autobiographiques ou virtuels?
Certains de ces voyages sont réels, mais bien moins nombreux qu'il ne peut y paraître. Quant aux voyages virtuels, toute littérature en est une forme, puisqu'on s'exile hors de soi, le temps d'un texte, pour entrer dans un monde de mots que nous susurre un autre. En tout cas, j'invente des lieux inconnus et y fait vibrer des personnages, souvent déchirés, comme nous le sommes tous, à des degrés divers. Je pense que les lieux sont des personnages à part entière dans mes textes. En tout cas, j'essaie de leur donner ce statut. Dans mes romans déjà, «Fièvre d'été» et «Ciel de feu» Alger, Chelar, ou Seg, étaient des lieux inventés ou réinventés et jouaient un rôle central dans le déroulement des intrigues. Il en est de même de tous les lieux de «La Troisième moitié de soi». Relag, par exemple peut être pris comme un anagramme d'Alger tout en étant une ville totalement inventée et peinte aux couleurs du décalage temporel, par emprunt à l'anglais jet lag, le décalage horaire.
D'où une référence au voyage réel et virtuel, donc. Autre exemple: Sed Maroub peut être lu comme étant l'anagramme de Boumerdès, largement détruite par le terrible tremblement de terre que l'on sait, tout en étant un renvoi symbolique à Sed Ma'areb, la mythique ville que la rupture de son barrage a complètement ravagée en des temps immémoriaux. Tous les lieux de mes textes sont donc un mélange de plusieurs endroits, réels ou créés de toutes pièces, et donnent naissance à un nouvel espace imaginaire. Une sorte de Chimère spatiale. Car la Chimère, le symbole même de l'imaginaire, n'est-elle pas un assemblage de plusieurs animaux qui forment un être nouveau, terrifiant, et fascinant à la fois?
Le fait de vivre loin de la terre natale, est-ce un handicap ou un épanouissement qui tend vers l'universalité?
L'éloignement de la terre natale ne peut être que géographique, parce que, où que l'on se trouve, on porte son pays en soi, ses paysages, ses rires et ses pleurs, tout comme on porte son enfance. De même qu'on vit sa terre natale dans le regard et les mots des autres qui vous identifient justement par votre pays. On peut quitter son pays, mais lui ne vous quitte pas. Vivre hors de son pays est aussi un enrichissement personnel, parce que l'on est amené à rencontrer des gens et à vivre des situations qu'on n'aurait jamais ni vus ni connues dans son propre pays. Quant à l'universalité, la seule chose qui soit universelle, à mon sens, c'est l'humaine condition. Tout le reste change. Les structures sociales, politiques, architecturales, culturelles, scientifiques sont en continuelle transformation. Les structures mentales et les valeurs aussi. Ce que l'on considère comme universel aujourd'hui ne l'était pas hier et ne le sera peut-être pas demain. Par contre on aime et on hait de la même façon depuis la nuit des temps; on souffre et on est heureux semblablement sous toutes les latitudes et à toutes les époques. La jalousie brûle les coeurs du même feu incandescent sur les bords du Tibre impérial, du désert de Gobi, des rues de Relag ou à l'ombre des murs de Cirta défiant Carthage. Quiconque réussit à exprimer les tourments de l'âme humaine atteint à l'universalité.
Envisagez-vous d'éditer vos livres en Algérie?
Je n'ai absolument rien contre éditer en Algérie. Bien au contraire. Malgré quelques petits déboires avec des maisons d'édition nationales, je suis toujours disposé à confier mes textes à l'éditeur qu'ils peuvent intéresser.
Un ouvrage en chantier peut-être?
J'ai deux romans fin prêts, mais que je n'arrête pas de fignoler et un troisième en chantier depuis longtemps, presque oublié, mais que je suis décidé à reprendre. J'ai aussi un recueil de nouvelles en voie de préparation; certains textes en sont écrits d'autres en gestation.
Généralement, écrire est une quête d'exaltation, quand on a l'appétit de la beauté. Que vous apporte l'écriture?
Ecrire est d'abord un besoin. Un besoin pressant d'exprimer ce que l'on ressent, de communiquer des émotions, de partager des expériences, pas nécessairement factuelles dans mon cas, mais plutôt réflexives. Cependant, il ne suffit pas de ressentir le besoin d'écrire pour arriver à une écriture aboutie. Il y a aussi la masse de travail qui se cache derrière chaque écrit, la construction, délibérée ou spontanée, des textes qui lui donne une quelconque valeur et une forme de beauté intrinsèque. D'où possiblement le sentiment d'exaltation, tout à fait cathartique, qui peut en résulter. Le désir de beauté semble inscrit dans la nature de l'être humain. Nous sommes tous à sa recherche, partout, dans tous les coins et recoins de la vie. Et dans toutes les formes d'art, et particulièrement l'écriture. Je ne sais plus quel philosophe grec disait que la beauté est la seule des vertus qui se puisse appréhender par les sens, d'où son attrait irrésistible, et la quête perpétuelle que nous lui vouons et notre soumission à son joug. Personne n'a jamais vu ou entendu des vertus cardinales comme la justice, le courage, ou la loyauté, qui elles, n'attirent pas les foules et ne sont qu'accessoirement objet de quête, parce que, comme le vent, nous ne pouvons en percevoir que les effets.
Un dernier mot peut-être?
Oui, un souhait: que ceux qui lisent mes textes y trouvent un peu de beauté et qu'ils prennent autant de plaisir à les lire que j'ai eu à les écrire.


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