Nous étions nombreux à penser, au lendemain de la première réunion du G20 consécutive à la crise financière internationale, que le consensus de Washington avait été définitivement enterré. Les pays du Sud essentiellement, dont l'Algérie, qui ont fait l'objet des programmes d'ajustements structurels (PAS) résultants de ce consensus, en connaissent bien les effets désastreux sur leur économie et société respectives. Ils en paient encore le prix. Mais voilà qu'en 2010, de nouveau et contre toute attente,des variantes européennes du PAS sont mises en œuvre pour traiter les crises économiques et financières ainsi que les déficits budgétaires des pays européens les plus vulnérables (Grèce, Espagne, Portugal). Pourquoi en est-on arrivé là et quels enseignements en tirer pour nous ? Premier élément qui illustre bien qu'il s'agit pour les pays européens concernés de l'application d'un PAS classique : coupe dans les revenus salariaux et les budgets sociaux. Après la Grèce qui a supprimé le treizième mois à ses fonctionnaires et a relevé l'âge de la retraite, c'est à présent le Portugal qui veut réduire quant à lui le déficit budgétaire en relevant la TVA d'un point et en augmentant les impôts sur les revenus et les bénéfices. Avec 20% de taux de chômage, le gouvernement espagnol, pourtant socialiste, va dans le même sens en abandonnant par exemple la revalorisation promise du salaire minimum de 600 euros à 800 euros. Il faut rappeler à ce sujet que Zapatero, premier ministre espagnol, disait il y a un an seulement qu'il va “continuer à augmenter et à améliorer les politiques sociales grace à un taux d'emprunt bas car c'est le chemin par lequel nous allons renouer avec la reprise”. Même la France dont l'économie est plus robuste fait preuve des mêmes anticipations car les mêmes causes créent les mêmes effets. Ainsi le premier ministre français Fillon avait indiqué récemment que “pour les trois prochaines années à venir les dépenses de l'Etat, hors charges d'intérêts de la dette et hors dépenses de pensions, seront gelées en valeur”. Seule réserve, ce pays refuse par la voix de son président de la république de parler de “plan d'austérité” car il ne prévoit pas d'augmentation des impôts. Pour le moment. Deuxième élément qui témoigne bien qu'il s'agit bien de véritables PAS qui sont mis en oeuvre. Les institutions de l'Union européenne (UE) se sont exprimées pour souhaiter que les Etats membres de l'UE leur soumettent les lois des finances avant de les faire voter par leur Parlement. Pour ma part je considère que la forte implication du Fonds monétaire international (FMI) dans le plan de sauvetage de l'euro à hauteur du tiers des montants mobilisables(250 milliards d'euros) n'est pas sans corrélation avec les ajustements dont on a parlé plus haut. Alors quels enseignements pour nous ? Le premier est la priorité absolue à accorder à nos équilibres extérieurs car en cas de défaillance ce qui nous arriverait serait infiniment plus dur à supporter que les ajustements auxquels sont soumis actuellement nos voisins de la rive nord de la Méditerranée. Par conséquent, on peut se poser à ce propos la question de savoir si “les inquiétudes” exprimées de façon récurrente par certains milieux économiques externes et internes sur “les dérives” du patriotisme économique algérien, inquiétudes qui ne reflètent en fait que la défense de leurs propres intérêts, recoupent ceux plus globaux du pays. Cela reste à prouver. A l'inverse, cette situation économique momentanément fragile que connaissent certains de nos partenaires européens créée une situation favorable pour construire des partenariats gagnant/ gagnant du fait d'une part de la tendance à la baisse des prix de leurs actifs technologiques et industriels et d'autre part des larges besoins algériens en la matière. Un euro qui est descendu la semaine passée à moins de 1,25$ rend cette situation encore plus favorable. Mon sentiment est que, dans ce contexte particulier pour tous, les lignes en matière de protectionnisme économique vont probablement bouger mais au cas par cas. Pendant ce temps la Banque d'Algérie continue, à juste titre, de s'inquiéter des tendances inflationnistes. Elle a ainsi absorbé 1100 milliards DA de liquidités pour freiner l'inflation en contractant notamment l'offre des fonds prêtables placés sur le marché interbancaire qui est passée de 10,030 milliards DA à 8,970 milliards DA. Pour le reste le bon et le moins bon coexistent. Ainsi l'Algérie va réaliser, pour la première fois depuis 43 ans, des exportations d'orge car “le pays dispose d'un excédent de deux années en orge sans compter la production de la campagne 2009-2010”. Mais ce qu'a dit de plus intéressant Noureddine Kahal, président de l'Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) réside dans le fait que “ces exportations vont s'inscrire dans la durée car l'Algérie est en situation excédentaire structurelle et non pas conjoncturelle”. A Sétif le groupe Cevital a inauguré le complexe Samha de l'électroménager et de l'électrotechnique de 1000 salariés construit avec son partenaire sud coréen Samsung. Pour le moins bon notre confrère d'ElWatan a consacré vendredi dernier deux pages à “ces chantiers qui s'éternisent”. Finalement l'un dans l'autre, tout cela aurait pu être pire en ces temps incertains de crise. Mais retenons quand même que l'Algérie peut mieux faire.