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Il a été le premier président de l'algérie indépendante
Ben Bella est mort
Publié dans Liberté le 12 - 04 - 2012

Cette fois-ci, il est mort le président Ben Bella. Annoncé décédé, un mois auparavant, la mort a comme bégayé face à ce monument de l'histoire de l'Algérie contemporaine qui part à 95 ans après une vie remplie de faux rendez-vous avec l'histoire et des quiproquos insolubles. Forcément.
L'Algérie aime les symboles. L'Algérie aime ses symboles. Elle s'inclinera dans la solennité et l'esprit martial devant la dépouille de celui qui incarnera, à toujours, le premier président de l'Algérie indépendante. Rien que pour ça, Ben Bella devra être enterré dans le carré des martyrs du cimetière d'El-Alia à moins que la famille veuille disposer du corps autrement, tout en sachant qu'elle ne le peut plus. Car Ahmed Ben Bella ne lui appartient plus depuis longtemps. C'est un président, quelque soit sa stature, qui appartient aux manuels d'histoire et au processus lancinant de son écriture. Ben Bella est inattaquable sur ce point. Il sera enterré comme un président de la République dans une tombe forcément profonde tant l'énigme a, de tout temps, accompagné le personnage.
Ben Bella. Un sourire pâle sur un visage joufflu et une carrure d'athlète pour une démarche nonchalante qui a tellement incarné la résistance algérienne au colonisateur. Il est le PPA-MTLD, l'OS, le Crua, le premier gouvernement algérien, l'anti-GPRA, il est le fondateur du “Clan d'Oujda” et sa victime, il est le chantre d'un “socialisme islamique” insondable, le concepteur du “centralisme révolutionnaire” qui nie pourtant le communisme, il est l'ami de l'égyptien Nasser, trop ami, il est celui qui a chassé les opposants du FFS dans les maquis, il est celui qui a donné l'espoir aux paysans et le désespoir aux vieilles qui crient “Sandouk tadamoune”, il est celui qui distribua les terres de l'autogestion, en enlaçant Che Guevara, il est celui qui proclamait que “la démocratie est un luxe pour un peuple qui a faim” et qui prend le café avec Malcolm X, il est celui qui marchait sans gardes du corps dans la rue et qui aime les complets bien taillés, il est comme ça Ben Bella, comme cette Algérie indépendante qui se cherche et qui avait besoin d'hommes à poigne. Ben Bella en fut un jusqu'à être confondu par ses pairs comme un dictateur qui a oublié la révolution pour l'esprit de zaouïa.
Les folles années 1960
C'est le Ben Bella des débuts. Des lendemains qui sentent bon la liberté, chèrement acquise, et des refus de compromis. À un journaliste français qui lui demandait dans son bureau modeste de président : “êtes vous lié par les accords d'Evian ?”, fraîchement libellés par celui qui deviendra son ennemi, Krim Belkacem, Ben Bella répondit : “Je suis lié par les intérêts de l'Algérie.” L'énigme encore. Une phrase qui peut dire tout et n'importe quoi. Ben Bella était alors populaire et croyait que l'Algérie pouvait se gérer, elle-même, comme un Kolkhoze soviétique. Il était tranchant, cassant, un faux calme qui résumait le modèle socialiste à “la liquidation des privilégies”. Les français ayant été chassés, de qui parlait-il ? Ben Bella pouvait également caresser une utopie romantique en disant que “l'islam nous aide à faire le socialisme”.
Il n'a jamais réussi à faire la synthèse des deux jusqu'au jour où il comprit, en voyant de sa fenêtre, un char stationné.
Face aux premiers redresseurs
19 juin 1965. Selon la légende, Ben Bella, qui aimait le football, s'est vu dédicacer un maillot du Brésilien Pelé dans le vestiaire de Bouakeul à Oran, deux jours avant le “coup d'état”. Le jour du redressement forcément “révolutionnaire”. Comme un dernier bain de foule, tendu, électrique, que ses anciens compagnons d'armes, dont le colonel Boumediene, lui ont laissé faire.
Il aimait le foot, cet ancien ailier du club de Maghnia, mais l'arbitre a sifflé la fin de l'Histoire. De la grande histoire. Ben Bella a été déposé par l'armée qui n'en pouvait plus de lui. Ben Bella est mort ce jour-là. Pour l'Algérie post-indépendance comme pour toutes les générations d'Algériens qui ont suivi. Il disparut dans une résidence, on ne sait où, une prison ; du moins un tunnel qui durera 16 années. Quand il en sortit, il était empâté, les cheveux grisonnants et pas de photos. La dernière à Oran était en noir et blanc alors que le monde était déjà passé à la couleur.
L'ennemi d'hier
Le 16 décembre 1985. Il revient au-devant de la scène politique. Loin d'Alger. Loin des regards. En noir et blanc, à Londres, avec à ses côtés… Hocine Aït Ahmed. Un Kabyle. Un opposant. Un démocrate. L'ennemi d'hier. Ben Bella a créé un mouvement. Le MDA (mouvement démocratique algérien) qui tente une fusion avec ce FFS qu'il a tant honni. Déroutant dans la volte-face, Ben Bella se découvre démocrate, avec des cernes sous les yeux et un discours aux accents surannées.
À deux, ils veulent incarner une “alternative” et voulaient être rejoints par d'autres hauts contestataires qui ne sont jamais venus. Ce même Aït Ahmed qui traitait Ben Bella de “réactionnaire” était assis avec celui qui découvrait, alors, que la “berbérité n'est pas une amputation”.
Un attelage qui n'a eu aucun écho. Il n'y avait pas Al-Jazeera, il n'y avait pas d'internet et la vue de deux historiques disserter sur le multipartisme avait quelque chose de figé, de revanchard même si le diagnostic était bon, car ces deux là avaient du flair. Trois ans après, ce fut octobre 1988.
Un bateau et puis rien
1990. Ben Bella prend le bateau pour Alger avec quelques fidèles et des européens qui ont fait de lui un symbole de la résistance à la répression. À Paris, il est devenu un exemple des droits de l'homme. En Algérie, les éditions Larousse où son nom est évoqué n'est pas vendu depuis 25 ans en librairie. Le pouvoir lâche du lest face à un Ben Bella qui ne semble plus menaçant. C'est un sage qui rentre au bercail et qui au-delà de l'accueil inexistant de cette jeunesse qu'il savait galvanisée auparavant, va recroiser, du regard, un autre char qui stationne devant son domicile. Mais cette fois-ci, ce n'est pas pour lui. La menace est barbue. Elle voudra tuer tout ce qui bouge. Les gens du “système”, les anciens socialistes, les démocrates naissants. Paradoxe de l'histoire contrariée, Ben Bella remplit les trois critères. Ces gens-là veulent tuer le père. Il est revenu trop tard dans un pays qui ne le reconnaît plus. Le MDA est englouti dans l'amnésie envers son créateur.
Commence alors une perdition idéologique. “Le discours mythologique” de Ben Bella, comme le décrit Noureddine Boukrouh, est en place. Ben Bella veut reprendre le costume comme il l'a laissé en 1965. Celui d'un président “tiers-mondiste”.
Il parle de la “croisade occidentale” contre l'Irak et boycotte les municipales de 1991. Il rate le coche et sera englouti dans sa quête permanente pour retrouver la flamme. C'est un Ben Bella aigri qui apparaît. Soutien du FIS, entremetteur à la demande de capitulation de l'Algérie à Sant'Egidio, plaide pour la libération de Abassi Madani et de Ali Belhadj. Il disparaît un temps des radars pour aller prêter main forte aux “frères arabes”, dans des missions personnelles, appuyant l'Irakien Saddam Hussein ou se faisant l'avocat du libyen Mouammar Kadhafi sous embargo. Ben Bella recycle Djamel Abdenasser alors que le monde a changé et il le sent, sans abdiquer, car Ben Bella n'est pas homme à se résigner. Sauf en Suisse, dans sa demeure, où il reçoit émissaires et journalistes étrangers pour leur parler de ses souvenirs. Déjà des souvenirs avec Castro, Mandela, Nehru…
Avec le retour du président Boutelika, il retrouve de la quiétude et de… l'influence. Abdelaziz Bouteflika, le “putschiste d'hier” qui l'a jeté dans les oubliettes de l'histoire, réhabilite l'homme. Il veut en faire un monument. Il devient un intouchable. Mais Ben Bella accuse le poids des ans et de ses contradictions. Il n'a jamais pris sa retraite politique et distille, ici et là, des noms, des conseils, des recommandations. Bouteflika lui laisse ce plaisir tardif de re-goûter aux délices d'un pouvoir jamais reconquis “même pour un jour”, disait la légende. On lui pardonne tout ou on fait mine de ne rien voir. Sa vivacité intellectuelle se brouille face au Wissam que lui colle au veston Moulay Rachid au Maroc ou quand il parle, à voix haute, de sa “marocanité” et de ses désillusions. Ben Bella n'a jamais pardonné à personne et c'était ça son moteur jusqu'à tromper la mort avant qu'elle ne le prenne. Ses funérailles seront à la mesure de son statut. Mais dans son testament, il a certainement demandé à ce que son cercueil ne soit pas transporté sur un… char.
M B.


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