Enterré au carré des martyrs en présence d'une foule imposante, Ben Bella reposera désormais aux côtés de ses compagnons d'armes. Les funérailles nationales réservées au premier président de l'Algérie indépendante, inhumé hier au Carré des martyrs du cimetière El-Alia, auront certainement rappelé aux algériens âgés de plus de 40 ans les mêmes protocoles réservés, en 1978, à celui qui l'avait renversé en 1965, en l'occurrence le défunt président Houari Boumediene. Mais seulement dans la forme. Dans le fond, l'émotion des Algériens était incomparable entre les deux évènements. La différence, c'est que le défunt Ben Bella est presque “inconnu” des nouvelles générations. Cela a fait qu'hormis l'ensemble du monde politique et militaire algériens, et du corps diplomatique étranger, très peu de citoyens s'étaient déplacés. Les pluies abondantes qui s'abattaient, depuis mercredi, sur Alger, n'incitaient guère les gens à quitter leur domicile. Tout de même, plusieurs dizaines de curieux ont suivi, qui sur son balcon, qui sur le trottoir, le passage du cortège funèbre. Le long cortège “mené” par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, s'est ébranlé vers 14h, juste après la prière de vendredi, du Palais du peuple, où la dépouille du défunt premier président d'Algérie était exposée depuis jeudi matin, pour permettre aux citoyens de lui rendre un dernier hommage. Le cortège a sillonné les grandes artères de la capitale avant d'atteindre le cimetière El-Alia. Le cercueil en bois du défunt posé sur un catafalque a dû être recouvert de larges bâches de plastique blanc pour le protéger de la pluie. Si l'accès au palais du peuple jeudi ne posait pas de problème, ce n'était pas le cas hier au cimetière d'El-Alia, encadré par un dispositif des plus musclés, où même une carte professionnelle de presse est rejetée par les policiers en poste. Il faut dire que la grande foule, qui a carrément bouclé les lieux, rendait la tâche des policiers plus ardue. D'où leur refus catégorique à toute personne, professionnelle soit-elle, d'y accéder. “Désolé, nous avons reçu des instructions fermes pour ne laisser personne entrer”, telle est la phrase répétée par tous les policiers. Pendant ce temps, les véhicules “blindés”, transportant les personnalités nationales et étrangères, passaient en vitesse pour précéder le cortège funèbre. À l'intérieur du cimetière, de grands chapiteaux ont été mis en place pour protéger les présents des fortes pluies. Aussitôt le cortège, au rythme des tambours de la garde républicaine, arrivé, des allah Akbar s'élevaient de partout. Derrière, le cercueil porté par plusieurs officiers de la garde républicaine, suivi de Abdelaziz Bouteflika, accompagné de l'ancien président Chadli Bendjid ainsi que tous les membres du gouvernement. Parmi les responsables politiques étrangers ayant fait le déplacement à El-Alia, on citera, entre autres, le président tunisien Moncef Marzouki, le prince héritier qatari, le Premier ministre marocain, Abdelilah, Benkirane, pour qui Ben Bella a été “un symbole de la lutte contre le colonialisme”, son homologue mauritanien, Moulay Ould Mohamed El-Aghdas, mais aussi le président sahraoui du Front Polisario, Mohamed Abdelaziz. Moncef Marzouki avait déclaré la veille à la télévision algérienne que “l'Algérie n'est pas la seule à avoir perdu Ben Bella ; le grand-Maghreb l'a perdu aussi, tout comme la nation arabe. Il était le symbole du tiers-monde”. Pour le Premier ministre marocain, Ben Bella a été “un symbole de la lutte contre le colonialisme”. au rythme des tambours, au cimetière, le cercueil du défunt a été exposé sous un chapiteau pour l'oraison funèbre, avant sa mise sous terre au Carré des martyrs, aux côtés des tombes de plusieurs de ses compagnons d'armes dont celles de… Houari Boumediene et Abane Ramdane. L'oraison funèbre a été lue par le ministre des Moudjahidine, Mohamed-Cherif Abbas, qui a salué le combat et le parcours exemplaire du défunt, “une figure nationale, un révolutionnaire et un homme d'Etat”. F A