Dans sa prison, Moubarak, l'ex-raïs du pays des pharaons, fait un cauchemar : les Frères musulmans détiennent le pouvoir en Egypte ! Mais, excellence M. ex-Raïs, ceci n'est ni rêve ni cauchemar ; une réalité réelle ! Mohamed Morsi, nouveau pharaon musulman, nouveau président élu démocratiquement par le peuple égyptien, issu du parti des Frères musulmans, lui aussi fait un autre cauchemar ! Dans son sommeil agité, M. Morsi, président de la République, voit dans son rêve Sayyid Qutb pendu dans son bureau ! Morsi tourmenté se réveille en disant : Ô mon Dieu, je suis dans le palais présidentiel où jadis résidait Nasser, celui qui a signé l'exécution de Sayyid Qutb. C'était le 29 octobre 1966. Je me demande, comme des milliers d'intellectuels et écrivains vivants sur cette terre d'islam, d'Arabes et de Berbères, comment le nouveau pharaon islamique va-t-il se comporter vis à vis des artistes et des créateurs dans le pays de Mohamed Abdel Wahab, d'Oum Kalsoum, de Abdel Halim Hafez, de Farid Al Atrache, de Youssef Chahine, de Tahia Kariouka (star de la danse orientale), et j'en passe ? Quand les Frères musulmans arrivent au plus haut niveau du pouvoir, en Egypte ; pays de Naguib Mahfouz, de Faradj Foudah assassiné en 1992 et de Nasir Abu Zayd, il nous est demandé de mettre la lumière sur leur vision fondamentale concernant la culture et la création. Sayyid Qutb, théoricien et un des guides des Frères musulmans, considère que toute culture moderne est une partie de “El Jahiliya" (la période anti-islamique). Commençant par son recueil de poésie La rive inconnue (Achchatie al majhoul), lui qui a débuté en poète, jugé par lui-même du “Jahiliyia". Dans son livre intitulé Maâlim fi attarik (repères sur le chemin), Sayyid Qutb définit la culture comme suit : “Il existe deux sortes de cultures ; culture musulmane basée sur des règles islamiques et culture jahilite basée sur des divers méthodes dont la base demeurera la même." Sayyid Qutb considère qu'Ibn Sinae (Avicenne), Ibn Roch (Averroès) et Al-Farabi ne sont que l'ombre de la philosophie grecque. Ils appartiennent à la culture d'El Jahiliyia. Aujourd'hui, au moment où les salafistes de la Tunisie menacent la liberté d'expression artistique dans ce pays connu par ses traditions laïques, on se demande comment le parti des Frères musulmans qui a raflé tous les pouvoirs en Egypte procédera à la chose des “arts et cultures" ; dans le pays de Taha Hussein, Louis Awad, Abderrahmane Badaoui, Abelwahab Al-Masseri et Nawal Sadaoui? Trahir son leader, son morchid, changer sa position envers le monde ou tout simplement déclarer la guerre à la culture de la pluralité et la diversité ? Perplexité ! A. Z. aminzaoui@yahoo.fr