Outre le fait qu'il soit un brillant universitaire, formant avec sa fratrie -Djamel, Abdelali, Nourredine et Samir- une famille qui fait honneur à Constantine en laissant croire qu'elle est toujours une ville du savoir, Abdelmadjid Merdaci est un homme qui ne fait jamais les choses à moitié, sa moitié Zaynab non plus d'ailleurs. Quand ils s'y mettent à deux, ça vole très haut ! À la hauteur qu'ils adorent, la juste hauteur : celle du cœur et de l'esprit. Tenez, pour le mariage de leur fille Meriem, ils ont battu le rappel de quelques-uns des meilleurs esprits du pays. Et même de France. Un seul critère : l'affectif. Et comme chez Madjid les affinités sont toujours intellectuelles, jamais de calculs ou d'intérêts, nous avons eu une telle concentration d'intellectuels, d'écrivains, d'universitaires, de chanteurs-compositeurs, de journalistes que les organisateurs du Sila pourraient crier à la concurrence. Connaissant la grande complicité qu'il y a entre le père et la fille, on s'émeut, puis on s'étonne : “Quoi, elle va se marier ? Mais comment pourrait-elle trouver chaussure à son pied avec une figure du père aussi imposante qu'écrasante ? Ce père qui l'a chaussée avec le diamant du savoir et du cœur ?" Et allez trouver ces deux contraires pour en faire une paire. En mettant la barre très haut à sa fille, Madjid voulait la prémunir définitivement des crêtes de la médiocrité qui se pavane en 4x4, le portefeuille plus gros que le ventre. On était curieux de connaître le futur mari. De quelle eau sera-t-il ? Madjid, historien et sociologue renommé, spécialiste du malouf, on s'est dit que l'idéal serait pour lui que sa fille reste dans ces territoires dans lesquels il s'est investi corps et âme. On craignait le beggar de l'Algiré, on craignait sa chique, son chic et son choc. On s'est dit que le père qui a résisté à tant d'épreuves, qui est sorti indemne de tant de combats, ne résisterait point à cette ultime épreuve : la prunelle de ses beaux yeux bleus ravie par un beggar, on aura tout vu ! L'ignorance se vengeant ainsi du savoir, quoi de plus normal en Algérie, hein ? On se rassurait en se disant que bon sang ne saurait mentir ! Mais on connaît assez les mystères de l'amour pour être convaincus du contraire. Dans ce monde de l'irrationnel tout peut arriver. Alors, alors on a vu le parti et on s'est dit : “Ouf ! Le père est sauvé, la mère également, et sans doute la fille aussi !" Et pourquoi ? Zoom : la réalité dépasse la fiction, Meriem Merdaci s'est mariée avec Tarek Bentobbal, fils d'un historique, Lakhdar Bentobbal. Ainsi, Madjid, qui cache ses émotions derrière une moustache de hussard et un verbe musclé pour masquer sa gentillesse, a reçu de sa fille, qui le connaît sur le bout des doigts, le meilleur cadeau : elle ne le quitte que pour mieux lui revenir sous un patronyme historique. Meriem est bien la fille de son père... H. G. [email protected]
