L’ambassadeur de Tunisie reçu aux AE

Violences policières contre les supporters de l’EN à Sfax

De jour en jour, le scandale de Sfax grandit. Rehaussé par des témoignages accablants, il tend à devenir une véritable affaire d’État.
Jeudi matin, l’ambassadeur de Tunisie en Algérie a été convoqué au ministère des Affaires étrangères pour livrer des explications sur la sanglante répression policière qui s’est abattue sur les supporters de l’équipe nationale de football dimanche dernier à Sfax, à l’issue du match contre le Maroc, comptant pour les quarts de finale de la Coupe d’Afrique des nations (CAN).
Le diplomate a été reçu par le directeur des affaires consulaires. Au même moment, notre ambassadeur à Tunis devait s’entretenir avec le secrétaire d’État au département des Affaires étrangères tunisien. Si rien n’a filtré sur les résultats de ces entrevues, il reste que l’Algérie est décidée à faire la lumière sur ce qui s’est passé durant cette fameuse soirée du 8 février où des centaines de partisans des Verts étaient matraqués dans l’enceinte et à l’extérieur du stade par des policiers d’une brutalité extrême. Une semaine après ces “troublants� incidents, les récits poignants de nombreux supporters, revenus, parfois estropiés de leur aventure tunisienne, accréditent une répression systématique, pis, une véritable chasse à l’Algérien (Voir l’article de Nabila Afroun). Des rumeurs persistantes évoquent des cas de détention, de disparition et de décès de nos ressortissants suite au traitement dont ils ont fait l’objet. À ce jour, au moins deux décès sont enregistrés. Il s’agit de deux jeunes originaires de Tissemsilt dont les dépouilles viennent d’être rapatriées.
Le ministère des Affaires étrangères, qui a confirmé cette information, hier, reste circonspect sur les circonstances de leur mort. Selon, M. Chebchoub, directeur de la communication, les défunts sont victimes d’un accident de la circulation qui a eu lieu le 10 février (soit deux jours après le match ?!) aux environs de 23 heures, sur l’autoroute reliant Sfax à Sousse. “Il semble qu’ils roulaient à contresens�, croit savoir notre interlocuteur. Il dit tenir cette version des faits d’un accompagnateur des victimes, actuellement blessé, et des autorités tunisiennes.
D’autres sources soutiennent en revanche que le petit groupe circulant à bord d’un véhicule de marque Clio a été pris en chasse par une voiture de police. Ce qui a contraint le conducteur à dévier de la voie et à rebrousser chemin, d’où un télescopage mortel. M. Chebchoub fait état d’une autre collision qui est survenue le soir du match et a entraîné des blessures plus ou moins graves de quatre passagers.
D’autres “accidents� de ce genre sont par ailleurs signalés. Jusque-là , les autorités algériennes se sont fiées à leurs homologues tunisiennes pour le recueil des informations. Cependant, vu la tournure de l’affaire, le gouvernement a diligenté ses services diplomatiques et consulaires pour rétablir la vérité. À la question de savoir si une équipe d’expertise est dépêchée sur place afin de suppléer au travail des diplomates, le porte-parole des AE répond par la négative. Il infirme par ailleurs la mise en place d’une commission d’enquête tunisienne à la demande de l’Algérie. Pour autant, le dossier est suivi au plus haut niveau de l’État. Si le département des affaires étrangères est tout naturellement chargé de sa gestion, eu égard à ses prérogatives, d’autres ministères sont impliqués à l’instar de l’Intérieur et de la Jeunesse et des Sports. La présidence de la République a également pris l’affaire en main. Le chef de l’État serait intervenu personnellement auprès de son homologue pour exiger des sanctions exemplaires.
Livrées à leur sort, les familles des victimes attendent, pour certaines, des nouvelles de leurs enfants disparus. Questionné à ce sujet, le chargé de la communication des AE affirme ne pas disposer d’informations. “Certains ont peut-être préféré rester encore quelques jours là -bas après le match. Nos services consulaires nous ont fait part de la présence, trois jours après le match, d’une centaine d’Algériens�, indique-t-il. Quoi qu’il en soit, notre interlocuteur soutient que contrairement à ce qui se dit, les familles concernées sont tenues informées par le biais des walis. Vrai ou faux ? Une chose est à retenir.
De grandes zones d’ombre entourent cette affaire. Pour ne pas altérer les “relations fraternelles�, les deux États s’entourent de discrétion. Pour preuve, la convocation de l’ambassadeur tunisien n’a pas fait l’objet d’un communiqué public contrairement à son homologue saoudien suite à l’accueil au palais royal de l’ex-numéro un du FIS, Abassi Madani.
S. L.
ZERHOUNI SE PRONONCE
“La police tunisienne a fait son devoir�
Évoquant les tragiques événements de Sfax où des titres de la presse nationale ont même évoqué des supporters qui auraient été tués dans des affrontements avec la police tunisienne, le ministre de l’Intérieur dément formellement ces allégations. “Il n’y a eu aucun mort à Sfax. Il y a eu seulement quelques blessés légers et des véhicules abîmés�, a-t-il affirmé. Commentant cette affaire qui a pris les proportions d’un véritable incident diplomatique entre Alger et Tunis, il dira : “Il y a eu excès de la part de nos supporters et les autorités locales ont réagi comme elles devait réagir�.
M. B.