Les turbulences que connaît le monde arabe, à l'issue de ce qui est abusivement dénommé le Printemps arabe, notamment les régimes à gouvernance autocratique à l'image de la Tunisie, la Libye, l'Egypte, la Syrie, n'est que la déclinaison d'un processus de mutations entamé au siècle dernier avec la chute du mur de Berlin et le démantèlement du modèle soviétique de gouvernance. Il s'agit, en fait, de mutations systémiques en vue de l'instauration des principes de gouvernance d'un nouvel ordre qui est la globalisation et en consolider les fameux 7 piliers. Les secousses, qui ébranlent les pays arabes actuellement, vont dans le sens non pas de la chute des régimes mais surtout de la chute des élites de ces régimes au pouvoir qualifiés de totalitaires et qui en fait ne correspondent plus aux profils établis pour gouverner cette nouvelle ère. Le renversement de Morsi par les militaires en Egypte nous confirme cet état de fait. Il est clair que tout ce processus avait commencé avec l'élimination de Saddam Hussein. Dans ce contexte, il utile de distinguer deux groupes de pays : - Les états-nation, des pays à identité nationale relativement solide, qui vivent un épuisement voire un essoufflement de régimes, une limite de leurs modes et modèles de gouvernance et une transition politique (Tunisie, Egypte, Maroc, Algérie) ; - Les Pays à faible unité nationale qui sont travaillés par des forces tribales, claniques, communautaires dominantes (Libye, Iraq et Syrie). Nous sommes bel et bien dans les non-dits du discours du Caire du Président Obama à l'issue de son investiture à la Présidence des Etats-Unis et qui est en fait le prolongement de la politique du président Bush pour ce qui est du projet de démocratisation du Moyen-Orient et Afrique du Nord dénommé également Grand Moyen-Orient qui date depuis 2003 et qui a commencé par la deuxième guerre du Golfe et l'élimination du symbole de l'autoritarisme Saddam Hussein. Selon ma lecture que j'avais partagée en mai 2011 dans les colonnes de ce même média, le cas syrien aujourd'hui le confirme. Trois étapes de cette feuille de route globale en constituent le "driver". Il s'agit de : - phase de démantèlement du panarabisme ; - phase de fragilisation et fragmentation des Etats-clés ; - phase de mise en œuvre de gouvernances dite d'inclusion. La stratégie adoptée pour le monde arabe aurait pour objectif, si mon décryptage de la vision des puissances occidentales est correct, une harmonisation des standards de gouvernance avec "un formatage" de la structure mentale des dirigeants nouveaux qui adopteront une même ligne de conduite. Dans certains cercles d'influence mondiaux, on parle de gouvernants "Generation 11" référence faite à l'année 11 du 21e siècle. Après l'humanitaire, c'est autour de la possession et/ou de l'utilisation des armes à destruction massive, les CBN, qui constituent le prétexte pour une ingérence voire des interventions militaires internationales. L'affaire Valerie Palme Wilson, ex-chef de la division WMD (armes à destruction massive) de la CIA et le sort qui lui avait été réservée par l'Administration américaine en dévoilant son identité au public pour avoir défié le président Bush en attestant que l'Irak ne possédait pas d'armes nucléaires est la pour nous le faire rappeler ! Aujourd'hui, le tour de la Syrie est arrivé. Une intervention militaire avec comme conséquence le renversement du président Bachar al-Assad est à forte probabilité. Depuis environ quelques années, les think tanks les plus influents ont élaboré plusieurs scénarios. Selon mon analyse et mon décryptage des différents scénarios, il me semble que nous nous acheminons vers l'émergence d'une Syrie unifiée à l'issue de la défaite qu'accuserait Bachar al-Assad et qui serait entre les mains des forces soutenues par les Etats-Unis et les amis de la Syrie. Dans ce cas, un gouvernement de coalition sunnite majoritaire opérant sous un système pseudo fédéral se mettrait en place. Dans le but de dissiper les rapports ethniques et sectaires tendus, une autonomie significative serait donnée aux gouvernements locaux et régionaux. Cet état final serait le résultat le plus positif du point de vue des Etats-Unis et de ses amis dans la région. Aux yeux des Etats-Unis, la connexion de l'Iran avec la Méditerranée serait rompue et le Hezbollah aura perdu un soutien-clé. Plus important, du point de vue des Américains, c'est que les réfugiés qui sont en Jordanie, en Turquie et au Liban pourraient retourner chez eux. Toutefois, cette option demeure tributaire de l'unification de l'opposition, de l'unification de la coalition et de l'engagement par un plan d'action qui permettra d'atteindre cet objectif. À terme nous pourrions assister, également, à la fin des frontières de Sykes-Picot dans la région. Certaines parties de la Syrie seraient absorbées par les pays voisins ou conglomérées avec les régions séparatistes dans d'autres pays pour former de nouveaux micro-Etats. Un Etat kurde, avec une partie de la Syrie et de l'Irak pourrait voir le jour dans le Nord. Les frontières syriennes avec la Jordanie, Israël, le Liban, la Turquie et l'Irak pourraient devenir inutile. A. C. *Membre du Defence and Security Forum de Londres, du Conseil d'experts du Forum de Davos (WEF) et du NESA Center for Strategic Studies Nom Adresse email