La réconciliation par les extrêmes

La primeur a été laissée à Abassi Madani pour annoncer que les redditions annoncées “sont le fruit d’un long processus de consultations�.
Quelques jours auparavant, Ali Benhadj avait appelé le président réélu à “tenir ses promesses�. Comme en 1999, les Algériens seront tenus loin des tractations et promesses en question. On leur demandera un jour de venir ratifier le compromis et ils le feront de gré ou de… fraude. Et si, par hasard, l’arrangement paraît trop humiliant, le pouvoir s’arrangera pour interpréter à sa guise une loi suffisamment équivoque pour lui permettre de respecter ses engagements avec les terroristes. N’impose-t-il pas, quatre ans plus tard, une loi qui a fixé sa propre péremption à janvier 2000 ?
Abassi précise que les terroristes accueillis se trouvent “avec leurs femmes et leurs enfants dans des camps de toile mis en place par l’ANP�. Il semble, cependant, que la partie terroriste n’est pas, pour le moins qu’on puisse dire, cohérente dans sa démarche de concorde : au moment où on célébrait cette expiation salutaire et responsable des criminels, quatre militaires ont été ciblés à Relizane, une des wilayas évoquées par ce concert d'incantations sur les massives redditions terroristes. À Kerkara, une commune de Collo, où des assassins repentis devraient réintégrer la société, cinq gardes communaux ont été mitraillés par un groupe de terroristes.
Un journal arabophone proche du MSP et de la coalition régnante a choisi le jour du sacrifice des quatre soldats de Relizane pour développer, sur deux pleines pages, la question du “qui a tué qui à Relizane ?�.
Il n’est pas, bien entendu, question de s’offusquer sur le fait que des milieux proches du pouvoir accablent l’ANP qui, pourtant, apporte au moins sa contribution logistique à la démarche de concorde civile en passe de se transformer en mystérieuse “réconciliation nationale�. Comme il n’est pas question d’être plus royaliste que le roi quand Ali Benhadj réclame du président de “prendre des mesures révolutionnaires contre les généraux�. Après tout, il n’est pas possible de se faire une idée sur les réels enjeux et les véritables intentions du régime, tant il semble mener une vie parallèle avec l’islamo-terrorisme.
S’il y a un mouvement de reddition, il n’est pas plus intensif que ce qui survenait depuis des années. Il est même possible que la célébration intempestive de ces réjouissants retours vise plus l’effet d’annonce qu’il ne marque une réelle vague de renoncement de la part des terroristes. Le plus probable est qu’elle se prépare à une nouvelle offrande par laquelle la République s’apprête à gratifier le soutien islamiste au régime qui vient d’être reconduit.
Dès le premier Conseil des ministres du nouvel ancien gouvernement, le président a confirmé la priorité de la réconciliation nationale. Sa recette consiste à “libérer le pays de la violence sous toutes ses formes et de tous les extrémismes�, ce qui réduit le terrorisme islamiste à une forme, parmi d’autres, de violence.
En noyant le terrorisme et l’islamisme dans un contexte plus général de violence et d’extrémisme, on relativise leur responsabilité.
Bientôt, il va s’excuser d’avoir assumé son opposition au terrorisme. Parce que s’opposer à un extrémisme est, selon l’esprit de la concorde bientôt affinée par la réconciliation, un extrémisme !
M. H.