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“Les élections du 8 avril ont été fatales à la vie politique”
Rachid Benyellès à Liberté
Publié dans Liberté le 23 - 12 - 2004

Personnalité politique au langage incisif et, quelque peu, désabusé, le général à la retraite Rachid Benyellès, qui avait démissionné de ses fonctions en 1988, en pleine révolte d'Octobre, revient sur la dernière présidentielle, donnant ses points de vue sur l'après 8-avril.
Liberté : D'abord, un retour sur les élections du 8 avril, événement de l'année…
M. Rachid Benyellès : Au lendemain des élections, le 11 avril, j'avais déclaré dans un quotidien que ces élections avaient été complètement biaisées, falsifiées, ne répondant à aucun critère d'honnêteté et d'objectivité. Les candidats s'étaient trouvés face à quelqu'un qui avait commencé sa campagne électorale dès le mois de juin 2003. Avec tous les moyens et l'appareil de l'Etat, en disposant de l'argent du Trésor public, mobilisant une machine de propagande digne de Goebbels, le propagandiste d'Hitler. Les Algériens avaient été soumis à un matraquage extraordinaire depuis juin 2003. C'était tout cela le résultat des élections, avec, en plus, leur falsification le jour même du scrutin. Pratiquement tous les bureaux de vote étaient sous l'emprise totale des services de l'administration. Contrairement à ce que l'on avait pu espérer, les trois candidats restés en lice, Benflis, Sadi et Djaballah, avaient été incapables de contrôler les urnes. J'estime donc que ce ne sont pas des élections. Je l'avais dit et je le répète. Par la suite, des données précises ont été fournies concernant ces falsifications et manipulations grossières des urnes.
Par qui exactement ?
Par les agents de l'administration qui étaient aux ordres de l'autorité en place, avec le silence complice, sinon la complicité active des services de sécurité. Il faut le dire.
Mais, il y avait tout de même ce groupe des Dix dont vous faisiez partie ?
Que pouvait faire le groupe des Dix ! Il faut se remettre dans le contexte de l'époque. Ce groupe s'était constitué avec pour objectif d'œuvrer pour des élections honnêtes. Le rapport des forces avait été tel que le groupe s'est trouvé totalement écarté. Je peux témoigner en connaissance de cause pour avoir été un candidat. On nous a mis des obstacles énormes. Pour ma candidature, des instructions avaient été données partout pour me refuser la simple légalisation des signatures recueillies auprès de citoyens qui m'avaient donné leur confiance. Des menaces avaient été proférées contre des personnes qui activaient pour ma candidature et même contre des notaires habilités à légaliser les signatures pour ma candidature. Je n'étais pas seul à faire les frais de cette action de représailles. Face à pareille situation que pouvait faire le groupe des Dix ?
Les élections étaient pourtant suivies à l'étranger…
L'étranger, l'étranger ! Il ne faut pas se faire d'illusions. Les grandes puissances étaient totalement alignées sur Bouteflika. Il n'y a pas de doute, elles n'ont jamais, depuis l'indépendance, trouvé un homme pour servir leurs intérêts avec autant de zèle. Jamais depuis l'existence de ce pays, un homme n'a servi les intérêts des Occidentaux de cette manière. Voilà la réalité.
Avec du recul, vous ne pensez pas avoir fait des erreurs d'appréciations ou d'analyses de situations et de données sociologiques ?
Non, j'estime, pour ma part, ne pas avoir fait d'erreurs d'appréciations. Ce qui m'avait déterminé à entrer dans le jeu, c'étaient les propos rassurants, maintes fois tenus par l'ex-chef de l'état-major, qui était supposé représenter l'institution la plus forte dans le pays. Des propos par lesquels il disait et redisait que “l'armée était neutre, que les élections allaient se passer d'une manière honnête”. C'est ce genre de propos qui m'ont poussé à me présenter. Néanmoins, je n'avais pas pris ces déclarations pour de l'argent comptant et j'avais gardé une certaine méfiance. Mais, comme le dit le dicton de chez nous : il fallait “suivre le menteur jusqu'au pas de sa porte”. Il fallait prendre au mot celui qui était le chef d'état-major de l'armée ! Finalement, tout cela s'est avéré de la foutaise.
Pour faire le lien, on parle, depuis, du retrait de l'armée de la scène politique…
Je crois que cette fois-ci le retrait de l'armée de la scène politique est une réalité. La donne a totalement changé. Nous ne sommes plus au lendemain de la démission du président Chadli, avec un pays à la dérive où l'armée était tenue de s'engager directement. Nous ne sommes plus dans la situation où l'armée a coopté Bouteflika en 1999 pour le porter au pouvoir. Je pense que la conjoncture a totalement changé, surtout sur le plan international, l'armée ne peut plus se présenter comme force politique dans le pays.
L'armée n'est donc plus la principale force…
Le pouvoir est totalement entre les mains de Bouteflika. Ce n'est plus le “trois quart de président”, mais un président deux cents pour cent. Un président normal, c'est un président jouissant des seules prérogatives que lui confère la Constitution. Le président Bouteflika a lui des pouvoirs exorbitants. Il a tous les pouvoirs, y compris le pouvoir discrétionnaire le plus étendu. C'est le fait du prince, l'humeur du moment.
Le paysage politique donne l'impression d'être complètement chamboulé depuis ces élections : le FLN n'en finit pas avec sa crise, les islamistes ne se portent pas mieux et les démocrates sont tétanisés…
Il n'y a plus de paysage politique, ni de vie politique dans le pays. La parodie d'élections d'avril a été fatale à la vie politique. Tout s'est effondré, y compris les partis qui étaient, plus ou moins, structurés, plus ou moins, existants, comme le FLN. En fait, pour ce parti, il n'a existé que durant la guerre de Libération. Après l'indépendance, c'était devenu un parti alibi, un faire-valoir et il n'a jamais repris, même si le système s'était bâti sur le parti unique et que ce parti unique était le FLN. Je pense que la seule fois où il a été réellement présent sur la scène politique, c'était lorsqu'il avait effectué un court passage dans l'opposition, au lendemain du départ de Chadli. Les turbulences qui le traversent aujourd'hui ne sont que des gesticulations sans aucune portée au sein de la société. Quant aux partis islamistes, ils étaient déjà effondrés avant. Le FIS s'est éteint, le MSP se donne au plus offrant et le MNR n'existe que pour et par son leader. Les démocrates ! Les démocrates ! Il y a beaucoup d'Algériens qui aspirent à la démocratie. La demande de démocratie est réelle en Algérie. Elle ne date pas d'aujourd'hui. C'est peut-être le pays qui était le mieux préparé dans le monde arabe à la phase de construction d'un système démocratique. Une partie de la population avait des prédispositions à la démocratie mais les appareils, les partis qui ont porté ces idées n'ont jamais été à la hauteur de ces aspirations. Les démocrates structurés dans les partis n'ont jamais eu de réelles prises ni d'influence sur la vie politique. Aussi, au moindre petit coup de vent, ils disparaissent. Ainsi en est-il du FFS, qui, en Kabylie, notamment, avait une existence, une écoute. Ses erreurs d'appréciations et sa participation aux dernières élections communales et de wilaya, ont fait que ce parti a reçu un coup extrêmement sévère dont il risque de ne pas se relever.
Que faire pour ranimer ce courant démocratique que vous dites présent dans la société ?
Il faut des militants sincères, des figures de proue, qui existent mais qui ne sont pas structurés dans des partis.
Ce courant, apparemment, ne bénéficie d'aucune attention de la part des grandes nations démocratiques…
Vous pouvez être sûr que nous ne seront jamais aidés dans ce domaine. Les autorités américaines avaient demandé à la Rand Corporation, la plus importante de leurs institutions en matière d'analyses, de stratégies et de conjonctures, s'il fallait ou non encourager l'instauration de la démocratie dans les pays arabes. La conclusion avait été claire : non, il ne fallait pas, en tout cas, jamais, aider les pays arabes à se démocratiser.
Parce que cela se retournerait contre les intérêts pétroliers, financiers et géostratégiques des Occidentaux et des Etats-Unis, en particulier. L'Algérie, comme tous les autres pays arabes, est dans ce cas de figure. Contrairement aux pays baltes, à la Géorgie et à l'Ukraine, on ne nous encouragera pas à construire un système démocratique. On sait comment cela se passe dans ces pays et qui tire les ficelles. Par ailleurs, l'islamisme, qui n'a pas été un exemple d'efficacité, sert lui aussi les intérêts occidentaux, particulièrement des Etats-Unis.
Selon vous, quelles seraient les perspectives chez nous ?
Bouteflika n'a aucune opposition. Personne ne peut l'empêcher de faire ce que bon lui semble. Sans avoir l'étoffe d'un véritable dictateur, il obéit à ses impulsions, à des considérations personnelles, avec un ego extrêmement développé. Le pays est géré au jour le jour et selon l'humeur. Voilà dans quelle situation nous sommes.
Bouteflika dit le contraire, partout il affirme des convictions démocratiques et pas plus tard que cette semaine, il devait réitérer sa volonté d'accompagner la modernisation de la presse, lui assurant la liberté...
Oui, mais la réalité est tout autre. Benchicou est en prison, son journal interdit. Wafa, le parti du docteur Taleb el-Ibrahimi n'est toujours pas agréé ainsi que le FD de Sid Ahmed Ghozali, alors même qu'ils répondent aux exigences de la loi et de la Constitution, dans la forme comme dans la lettre. C'est le fait du prince : je n'autorise pas, je mets en prison qui je veux. Est-ce cela la démocratie ?
Comment appréciez-vous son second mandat ?
Pour ma part, je n'en attends strictement rien. La situation ira de mal en pis, même avec des réserves de change dont, par ailleurs, personne ne sait à quoi elles sont utilisées. Je me demande pourquoi le pays continue à honorer son service de la dette et à payer des intérêts énormes, alors qu'il est en mesure de rembourser ses dettes par anticipation !
Il reste qu'il a été élu confortablement, qu'il a l'estime des populations et que la situation est plus détendue…
La situation est loin d'être aussi détendue que vous le dites. La misère existe. La mendicité est partout, il suffit de faire un tour dans les décharges publiques pour se rendre compte de la situation sociale dans le pays. La corruption n'a jamais atteint ce niveau. L'Etat est absent. Le pays croule sous la saleté et je ne crois pas qu'il y ait dans le monde, un pays aussi sale. Certes, il y a bien des jacqueries, à droite, à gauche, pour revendiquer des logements, du travail, le courant électrique, des routes, mais il n'y a pas de revendications pour défendre son destin, ses valeurs. Les gens de ma génération s'étaient engagés et ne s'étaient pas contenter de piaffer d'impatience.
Le pouvoir promet l'arrivée massive d'investisseurs grâce aux privatisations…
Depuis que Bouteflika est arrivé, cela fait maintenant six années, on parle de privatisation, et il n'y en a aucune. On parle de réformes, et il n'y en a pas plus. La modernisation, les investissements, les réformes, on en parle beaucoup. C'est le serpent de mer, le monstre du Loocness dont tout le monde parle mais que personne n'a vu.
Apparemment, l'amnistie générale serait le grand chantier du second mandat de Bouteflika, selon vous c'est quoi au juste ?
Qui va en bénéficier, comment et à partir de quand ? Personne ne le sait encore. Il faut attendre le projet de loi pour pouvoir porter un jugement.
Pour ma part, je suppute que cette mesure ne vise qu'à absoudre des éléments des services de sécurité pour les dépassements dont le responsable du Conseil consultatif sur les droits de l'Homme a parlé publiquement la semaine dernière dans la presse.
Pour finir, que devient Rachid Benyellès ?
Beaucoup de gens me demande de créer, soit un parti, soit une association… mais, je reste persuadé que l'on ne m'autorisera pas puisque l'on m'a bien refusé la simple légalisation de signatures pour ma candidature à la présidentielle d'avril 2004.
En attendant, je lis, je pianote sur mon ordinateur.
D. B.


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