Projeté mardi, à l'Oref, ce film est une adaptation du livre «Le camp» d'Abdelhamid Benzine ancien moudjahid, incarcéré dans un centre militaire d'internement spécial (CMIS) à Boghari en 1961, dont la garde était constituée de légionnaires et d'anciens officiers nazis. Abdelhamid Benzine, ancien membre du Parti communiste algérien et journaliste à Alger Républicain, a consacré sa vie dans la lutte contre le joug colonial. Après avoir rejoint le maquis, il a été pris, les armes à la main, par les autorités françaises. Après un séjour à la prison de Lambèse en 1961, Abdelhamid Benzine est transféré avec soixante compagnons dans un Centre militaire d'internement spécial (CMIS), situé à Boghari dans la wilaya de Médéa. Vivant dans des conditions inhumaines, Benzine écrivait en catimini une sorte de journal intime pour raconter les atrocités perpétrées par les légionnaires réservistes, dont d'anciens officiers nazis sur les détenus. De ces écrits est né le livre Le camp publié en France, à quelques mois de l'indépendance du pays. Cette histoire méconnue de la nouvelle génération, a été adaptée sur grand écran par le réalisateur Nasredine Guenifi dans le cadre de la célébration du cinquantenaire de l'indépendance en 2012. Après moult problèmes, le film Nous n'étions pas des héros a fini par voir le jour, et à cette occasion, il a été projeté en avant-première mardi, à la salle Ibn Zeydoun de l'Oref (Alger). Ce long-métrage nous plonge, d'emblée, dans l'univers carcéral où nous découvrons le personnage d'Abdelhamid Benzine dont le rôle est campé par Ahmed Rezzak, un homme réservé, mais au caractère volcanique, un vrai leader pour ses copains de cellule. L'exécution de ces militants annulée, ils sont transférés alors au camp de Boghari. La garde, constituée de légionnaires et d'anciens officiers nazis, va mener une vie dure aux "autochtones". Entre sévices, tortures, humiliations et assassinats, ces assaillants ne reculaient devant rien pour "éradiquer les Arabes". Tout au long du film, nous sommes spectateurs de scènes violentes. Constamment brimés par les officiers, ces détenus restaient forts face à cette situation insoutenable et continuaient à croire à la cause algérienne, malgré les différentes tentatives des Français de leur faire changer de camp pour devenir de bons amis de la France. Dans cette œuvre, Guenifi a mis en exergue le côté humain de ces moudjahidine — loin d'être de "superhéros" — et dépeint leur crainte de mourir, de se faire tabasser. D'ailleurs, on voit l'un des jeunes captifs lécher la chaussure d'un nazi, et d'autres camarades écoutant dans un silence absolu leurs compagnons de cellules se faire torturer. Malgré cette tentative, le réalisateur n'est pasparvenu à transmettre la douleur de ces personnages. On reste seulement spectateurs de ce qu'il leur arrive et presque à nous lasser des scènes de violences répétitives. À Nous n'étions pas des héros, il manque une "âme". Les protagonistes du film n'ont pas d'histoires, nous ne connaissons absolument rien de leur passé ! Quelques incohérences sont, par ailleurs, flagrantes, notamment celles des personnages "fantômes", qui apparaissent au début, pour disparaître et réapparaître à la fin... l'utilisation de gadgets modernes à l'instar d'un appareil photo numérique ! Néanmoins, ce premier long-métrage de Nasredine Guenifi est à encourager pour la profondeur de l'histoire : des hommes ayant sacrifié leur vie pour la liberté, et de démontrer que ces "héros" n'étaient pas forcément des surhommes, mais des êtres humains avec leur force et leur faiblesse. Hana Menasria