Au Venezuela, la “main étrangère” est algérienne. Elle s'est présentée aux grévistes de ce pays sous forme de techniciens en hydrocarbures. On pouvait deviner que Bouteflika n'aime pas les mouvements citoyens, mais de là à intervenir aux antipodes… Imaginons que des Vénézuéliens viennent casser une grève contre la privatisation de Hassi Messaoud. D'ailleurs, ce n'est pas loin du possible et l'on pourra certainement compter sur la solidarité de l'ami Chavez. D'ailleurs, à quoi servirait la diplomatie dans le tiers-monde, si ce n'est à assurer l'entraide des chefs d'Etat. Dans les systèmes autocratiques du Sud, qu'ils soient bananiers ou pétroliers, les peuples n'ont rien à se dire. Leurs despotes, en se parlant entre eux, parlent pour leur peuple. Où va-t-on, si on laisse des mouvements populaires pousser des présidents vers la sortie ? Il n'y a pas que les droits de l'Homme qui suggèrent le devoir d'ingérence ; le droit des chefs d'Etat à conserver leurs fauteuils justifie bien les intrusions réciproques dans les politiques intérieures des Etats — plus exactement des chefs d'Etat — amis. Cette diplomatie qui consiste à entretenir, en priorité, les amitiés du prince, de la concession coupable faite aux massacreurs de gazelles et d'outardes. En attendant les illusoires milliards de dollars, ce sont leurs braconniers exterminateurs qu'ils nous délèguent. Les pauvres volatiles payent de leur existence notre contribution au bien-être intime de nos amis orientaux. Heureusement que nous n'en sommes qu'à la traite des bêtes… Il n'y a d'ailleurs pas qu'au Sud qu'on confond encore l'Etat avec ses occupants. Le Président français a, semble-t-il, lui aussi, exprimé son amitié en engageant son influence dans le choix algérien de 2004. On ne sait pas encore si Chirac a été tenté par la proposition. Ainsi, la diplomatie nationale aura été tout entière dédiée aux échanges de bons procédés entre notre Président et certains de ses pairs. Les affinités ne sont donc pas mises à profit pour favoriser le rapprochement entre peuples et nations, mais exploitées, de manière syndicale, pour se prêter main forte quand l'avenir politique de l'un ou de l'autre semble quelque peu compromis. Les relations internationales réduites ainsi au rang de relations personnelles cessent de servir les intérêts mutuels des pays et prennent la voie d'une campagne électorale. L'internationalisation de l'échéance de 2004 devrait donc compenser l'impopularité locale d'un Président dont le mandat aura été un modèle d'immobilisme. Les Algériens n'ont sûrement pas l'ambition de choisir pour les Vénézuéliens ; ils seraient moins enclins à encaisser l'option que leur proposerait Chirac. Au point où elle en est, on n'attend plus d'elle des miracles, mais il serait souhaitable que notre diplomatie revienne à sa naturelle vocation : servir, même mal, le seul intérêt de l'Algérie. M. H.