Selon les responsables de ces ONG, le blocage des navires humanitaires en Méditerranée est devenu la nouvelle norme des pays de l'UE. Deux ONG, Médecins sans Frontières et Sos Méditerranée, ont pointé du doigt la politique européenne dans la lutte contre la crise migratoire dans le bassin méditerranéen, en provenance de la Libye, un pays passoire en raison de la guerre qui le ravage depuis fin 2011. "Un an après la décision de l'Italie de fermer ses ports aux navires humanitaires et le premier blocage politique sur le sort des personnes secourues en Méditerranée centrale, au moins 1 151 hommes, femmes et enfants vulnérables sont morts et plus de 10 000 autres ont été renvoyés de force en Libye, exposés à encore plus de souffrances", constatent les deux ONG dans un communiqué publié hier, affirmant que "ces morts évitables témoignent du coût humain de politiques migratoires européennes irresponsables". Face à l'important flux migratoire et de réfugiés vers l'Europe, Bruxelles a opté pour la répression des réseaux de trafics de migrants, se refusant à assumer la moindre responsabilité politique qui consiste à lutter en amont contre cette tragédie. Autrement dit, l'UE refuse de s'attaquer aux raisons profondes qui poussent des milliers de personnes à risquer leur vie pour atteindre le Vieux continent. "La réponse des gouvernements européens à la crise humanitaire en Méditerranée et en Libye n'a été qu'une course effrénée vers le fond", a déclaré Annemarie Loof, responsable opérationnelle de MSF, lit-on dans le communiqué. "Il y a un an, nous avons imploré les gouvernements européens de faire passer la vie des personnes avant la politique. Nous avons plaidé pour une réponse humaine, pour mettre fin à la déshumanisation des personnes vulnérables en mer à des fins politiques. Pourtant, un an plus tard, la réponse européenne a atteint un niveau des plus déplorables", a-t-elle ajouté. "Il y a un an, nous avons sonné l'alarme : les blocages politiques en mer, dangereux et inhumains, ne devraient en aucun cas créer un précédent. C'est pourtant exactement ce qui s'est passé", a déclaré pour sa part Sam Turner, chef de mission de MSF pour la Libye et la Méditerranée. "Cette impasse politique entre les pays européens et leur incapacité à prioriser des vies humaines n'est que plus choquante aujourd'hui, alors que les combats continuent à faire rage à Tripoli", a-t-il insisté. Selon les chiffres de l'ONU et les estimations des autorités intérimaires libyennes, il y aurait plus de 800 000 migrants et réfugiés sur le sol libyen, en attente de leur chance pour traverser la Méditerranée. La dégradation de la situation sécuritaire en Libye, notamment à Tripoli, met en péril la vie de ces milliers de personnes qui sont à la fois victimes des guerres et des dictatures dans leurs pays d'origine et des réseaux de trafics d'humains. En face, certains pays membres de l'UE ont opté pour un renforcement du dispositif répressif contre les migrants, mais aussi contre tous ceux qui leur viennent en aide. "Depuis que le navire de recherche et de sauvetage Aquarius, affrété par SOS Méditerranée et opéré en partenariat avec MSF, a été empêché d'entrer dans les ports italiens il y a un an, les blocages de navires en Méditerranée centrale sont devenus la nouvelle norme, avec plus de 18 incidents publiquement documentés" lit-on encore dans le communiqué en question. "Les conséquences de la criminalisation du sauvetage en mer n'affectent pas seulement les navires humanitaires, mais érodent l'obligation même de prêter assistance aux personnes en détresse en mer", dénoncent les deux ONG.