Dans ses recommandations devant le Conseil des droits de l'homme à Genève, une experte onusienne a appelé à la création par l'ONU d'une "task force" d'intervention rapide pour enquêter sur des meurtres ciblés ou des disparitions de journalistes et d'opposants. Le président turc, Recep Teyyip Erdogan, est revenu à la charge hier en accusant "certaines personnes offrent d'importantes sommes d'argent pour enterrer l'affaire de l'assassinat du journaliste saoudien, Jamal Khashoggi", dont est ouvertement accusé le prince héritier Mohamed Ben Salmane, a rapporté la télévision turque ITV. Le Président turc n'a fourni aucun autre détail, a rapporté la même source, soulignant que ces informations ont été livrées à la presse en marge du sommet du G20 qui s'est tenu durant le week-end à Osaka au Japon. C'est la deuxième sortie d'Erdogan en moins de 48 heures concernant cette affaire. Le journaliste saoudien avait été exécuté et décapité à l'intérieur même du consulat d'Arabie Saoudite à Istanbul, le 2 octobre dernier. Un commando d'une quinzaine de membres était venu spécialement de Riyad pour l'exécuter sur ordre de la monarchie qui a toujours nié son implication. Le prince héritier est directement lié à ce crime, selon les rapports d'enquête en Turquie et les conclusions de la CIA américaine, et plus récemment, les preuves accumulées par une mission d'enquête de l'ONU. À l'issue de près de 6 mois d'enquête sur l'assassinat de Jamal Khashoggi, la rapporteure spéciale de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires, Agnès Callamard avait affirmé, il y a quelques jours, avoir rassemblé suffisamment de "preuves crédibles" pour justifier l'ouverture d'une enquête internationale afin d'établir les responsabilités de hauts responsables saoudiens dans ce crime, y compris le prince héritier Mohammed Ben Salmane. Mme Callamard, qui en tant qu'experte indépendante ne s'exprime pas au nom de l'ONU, avait appelé la semaine dernière le chef de l'ONU à déclencher cette enquête. "Les preuves rassemblées par l'enquête suggèrent que le meurtre de M. Khashoggi constitue une exécution extrajudiciaire, une disparition forcée et probablement un acte de torture pour lesquels le royaume d'Arabie Saoudite est responsable", avait-elle affirmé. Le Sénat américain est aussi convaincu de l'implication directe du prince héritier saoudien, accusé par ailleurs d'avoir mis en place un plan de rapatriement de tous les opposants saoudiens établis à l'étranger. Mais le président américain, Donald Trump, nage à contre-courant en continuant à soutenir l'Arabie Saoudite et à protéger Mohamed Ben Selmane. Riyad dépense beaucoup d'argent pour redorer son image à l'étranger et à dénigrer en parallèle tous les militants saoudiens qui dénoncent le royaume wahhabite pour ses graves atteintes aux droits des femmes et aux droits de l'homme. Pour rappel, M. Erdogan avait indiqué auparavant avoir demandé à Mohamed Ben Selmane de lever le voile sur ce crime d'Etat et à livrer tous les coupables, dont certains sont toujours en liberté, alors que les autres ont été condamnés lors de procès douteux.