La thématique qui a prévalu au 21e acte des marches populaires à Constantine a complètement démythifié le dernier discours du chef d'état-major de l'armée. Les manifestants ont tenu une bravade sans ambages en stigmatisant Gaïd Salah dans leurs slogans et autres chansonnettes improvisées pour la circonstance. Par milliers donc, ils ont sillonné, sous un soleil de plomb, les principales artères de la ville avec un mot d'ordre phare "Dawla madania, machi âaskaria" (un Etat civil et non militaire) et autres "Echaab la yourid hokm el âaskar min jadid" (le peuple ne veut plus du pouvoir militaire), "La li el intikhabat, la li hokm el généralate, la li hokm el moukhabarat" (non aux élctions, non au pouvoir des généraux ni à celui des services secrets). Retraitée de l'enseignement supérieur, Fatima Mekaoui, qui n'a raté aucune marche depuis le 22 février, considère que "sortir chaque vendredi est devenu un rituel. Sortir crier son refus du système politique et du gouvernement illégitime, sortir scander des slogans de rejet mais aussi d'espoir pour une Algérie meilleure, mais aujourd'hui, j'avoue être dans l'expectative et le dernier discours de Gaïd Salah me laisse perplexe". Elle en veut particulièrement à la teneur des propos du chef d'état-major de l'armée et s'interroge : "Comment peut-on qualifier de traîtres ces millions de voix qui aspirent au changement ? Comment peut-on adopter ce ton menaçant envers des manifestants pacifiques ? Comment peut-on menacer et réprimer ceux dont on juge, par ailleurs, les revendications légitimes ?" Cette ancienne activiste du Cnes et autres mouvements féministes et avant-gardistes garde espoir, sinon, dira-t-elle, "j'aurais cessé de sortir". Pour elle, "une Constitution violée à maintes reprises, un président potiche et des élections vidées de leur sens, voilà ce qu'on veut nous servir. Nous voulons des garanties et un socle démocratique à travers un premier pas d'apaisement qu'est la libération des détenus d'opinion qu'on qualifie de traîtres. Le bon geste serait de redonner du contenu et du sens au mot dialogue. Or, on assiste à une prise de pouvoir à peine déguisée par les militaires. Ahmed Gaïd Salah, pendant des mois, nous gratifie de deux discours fleuves sans aucun respect pour le président mis en place pour faire de la figuration. Une sortie de crise envisagée unilatéralement par le nouveau pouvoir équivaut à une mise au pas de la société.".