Les choses se clarifient davantage au sein de la classe politique. Au fur et à mesure que l'échéance du 12 décembre approche, partis et personnalités nationales choisissent chacun son camp. C'est la décantation. Entre ceux qui ont choisi d'accompagner la rue dans son mouvement et ceux qui adhèrent à la feuille de route du pouvoir, le champ politique offre à présent une meilleure lisibilité. D'un côté, des partis qui font des exigences du soulèvement citoyen leurs principales revendications. De l'autre, ceux qui ont choisi de suivre la voie tracée par le pouvoir, soit celle de l'élection présidentielle. La convocation du corps électoral et la programmation du scrutin pour le 12 décembre ont fini par provoquer cette décantation. Jusqu'à hier, une vingtaine de responsables de parti ou d'indépendants ont retiré les formulaires de candidature. La situation que vit actuellement la classe politique n'est pas nouvelle. C'est souvent les positions des uns et des autres face à des situations ou événements donnés qui départagent les formations politiques. Le mouvement populaire que vit le pays depuis le 22 février en est la parfaite illustration. Entre ceux qui pensent l'accompagner pour en finir avec le système en place et ceux qui y voient un tremplin pour arriver au pouvoir, les appréciations faites de ce soulèvement impliquent un début de décantation. Ceux qui aspirent à jouer un rôle quelconque lors du scrutin du 12 décembre font fi d'une rue qui mobilise plus que jamais pour faire avorter, pour la troisième fois, une tentative du pouvoir de faire élire un président. Cela dit, rien ne garantit, par-dessus tout, la tenue de cette élection, qui pourrait être condamnée à connaître le même sort que celles du 18 avril et du 4 juillet. C'est dire que, tout compte fait, ceux qui ont fait le premier pas vers la participation à l'élection risquent de ne pas aller plus loin dans cette direction, sachant eux-mêmes que le scrutin pourrait ne pas avoir lieu. C'est donc un saut dans l'inconnu pour les Benflis, Makri, Belaïd, Sahli et plein d'autres prétendants. La détermination de la rue à rejeter tout processus électoral qu'imposerait le régime sans passer par une transition qui garantira un assainissement de la vie publique est une donnée que les soutiens de la feuille de route du régime ne peuvent ignorer. La démonstration de force du mouvement populaire au 31e vendredi, notamment à Alger, confirme, si besoin est, que la prochaine élection a toutes "les chances d'échouer". Le choix des partis de la mouvance démocratique et des personnalités regroupés au sein de l'Alternative démocratique est plus judicieux. Contrairement aux autres courants auxquels on attribue l'épithète de nationaliste ou d'islamiste, ceux du camp des démocrates ont trouvé dans la rue un prolongement de leur discours, de leur position et de leur projet. Le rejet de l'élection du 12 décembre prochain par les citoyens suppose également la récusation des candidats. Dans ce cas de figure, toute participation au processus de règlement de la crise tel que défini par le pouvoir, va signer, fatalement, l'acte de décès de ceux qui l'adoptent ou y souscrivent en faisant acte de candidature.