Les confectionneurs de pin's ont écopé de six mois de prison ferme. L'étudiante Yasmine Nour El-Houda Dahmani a été condamnée à six mois de prison dont quatre avec sursis. Elle est sortie hier de prison. Le verdict était pressenti. Pourtant, il a eu l'effet d'une onde de choc sur les dizaines de citoyens qui se sont déplacés, hier, au tribunal de Sidi-M'hamed pour soutenir les onze jeunes manifestants, en détention préventive à la prison d'El-Harrach, principalement des confectionneurs de pin's et des porteurs de pancartes, dont l'étudiante Yasmine Nour El-Houda Dahmani et les sept prévenus placés sous contrôle judiciaire. Il y avait les familles des personnes poursuivies pour atteinte à l'unité nationale pour avoir porté l'emblème amazigh, mais aussi des étudiants en droit, des militants politiques et des citoyens. L'attente a duré une matinée. Ce n'est qu'en début d'après-midi que les dix détenus sont entrés dans le box des accusés, sous les applaudissements de l'assistance et aux cris "Djazaïr hourra democratiya" (Algérie libre et démocratique). Le président de la chambre correctionnelle a exigé alors le silence, sinon il ordonnerait l'évacuation de la salle. Il a aussitôt cité le nom de Nour El-Houda Dahmani, innocentée de l'accusation inhérente au port d'un emblème autre que le drapeau national, mais condamnée pour le chef d'inculpation de port d'une pancarte incitant à la rébellion à six mois de peine privative de liberté, dont quatre mois avec sursis, assortie d'une amende de 20 000 DA. Arrêtée, le 17 septembre dernier, dans une marche des étudiants et placée sous mandat de dépôt le lendemain, elle est sortie de la prison d'El-Harrach hier, après avoir purgé ses deux mois d'incarcération. Les autres prévenus ont écopé, tous, de six mois de prison ferme et d'une amende de 20 000 DA. Les citoyens présents dans la salle d'audience n'ont pu contenir leur colère. "Honte à vous", ont-ils asséné à l'adresse des magistrats. Dans la salle des pas perdus du tribunal, puis à l'extérieur du palais de justice, la protestation n'a pas faibli. "Nous sommes et resterons Amazighs", "Il n'y aura pas de vote avec le gang", "Nous n'abdiquerons pas"… et autres slogans du hirak ont été scandés, pendant quinze à vingt minutes, dans un rassemblement improvisé rue Abane-Ramdane. Imad, Oussama, Razane, Fatiha, Lyès et les quatre autres coaccusés laissés jusqu'alors en liberté provisoire semblaient en désarroi, au milieu de la foule compacte. "N'ayez aucune crainte. Vous n'irez pas en prison. Le jugement n'est pas encore exécutoire. Nous ferons appel dès aujourd'hui", les ont rassurés les avocats. La mère de l'étudiante et ses camarades avaient, en revanche, le sourire aux lèvres. "Je suis très fière de ma fille. Elle sera accueillie aujourd'hui avec les honneurs à la maison", nous a déclaré Mme Dahmani. "Son père ne voulait pas assister aux audiences, car il ne supportait pas de voir sa fille dans le box des accusés", dit-elle. Un important contingent de proches, d'amis et de familles d'autres détenus d'opinion ont pris le départ vers le centre pénitentiaire d'El-Harrach. Pour rappel, le procureur de la République avait requis la semaine dernière, au terme d'un procès boycotté par le collectif de défense, deux ans de prison ferme assortie de 100 000 DA d'amende à l'encontre de l'ensemble des prévenus.