Le parti politique Talaie El-Houriat ne compte pas donner un chèque en blanc au président de la République dans son projet de révision de la Constitution. Le parti émet des réserves et considère que le brouillon proposé pour un débat public élude plusieurs questions relatives aux exigences politiques du mouvement populaire, auquel, précise Talaie El-Houriat, une référence a été faite dans le préambule. Hier, lors d'un point de presse, Abdelkader Saâdi, président par intérim du parti, a estimé que la révision constitutionnelle doit consacrer "l'émergence d'un Etat de droit" et "d'une société de libertés", s'appuyant "sur une indispensable légitimité des institutions". Il a regretté que des experts et membres de la commission se soient impliqués dans une opération de promotion du document, estimant que cette pratique "jette le discrédit sur le processus de consultations initié par le président de la République". Il a ajouté que cette campagne de promotion avant terme "renseigne sur la nature de l'avant-projet diffusé qui semble être le projet quasi final". Le parti considère que la commission d'experts a outrepassé ses prérogatives, d'où la nécessité de la mise en place d'une "structure crédible pour la prise en charge des avis et propositions dans la perspective de la préparation de la deuxième mouture de l'avant-projet". Le parti a souligné également que le contexte choisi pour rendre publique la mouture n'a pas suscité le débat souhaité. "La mouture a été rendue publique en pleine crise sanitaire, ce qui a différé le débat autour du projet pour une étape ultérieure", a déclaré M. Saâdi, ajoutant que même le contexte politique n'était pas approprié, puisqu'il n'était pas "suffisamment apaisé" pour engager de tels débats. Sur cet aspect, Talaie El-Houriat plaide pour "un consensus politique minimum préalable avant de faire intervenir les experts pour traduire les engagements politiques en termes constitutionnels". M. Saâdi prédit, à ce propos, "des libérations de détenus politiques" d'ici à la rentrée sociale. Faisant le parallèle entre le mouvement populaire et l'avant-projet soumis à débat, M. Saâdi estime qu'il est truffé "d'incohérences" incompatibles avec "les impératifs de changements, de rupture et de bonne gouvernance" qu'exige le mouvement populaire. "La réduction des aspirations de la révolution du 22 février 2019 à des revendications exclusivement sociales, occultant l'exigence de changement radical du système, n'aiderait pas à créer un consensus autour du projet", a dit M. Saâdi, dénonçant, au passage, l'omniprésence de l'institution présidentielle dans l'édifice institutionnel. En somme, le parti de Talaie El-Houriat considère que la mouture de la future Constitution doit être l'aboutissement d'un débat "inclusif", en dehors "des institutions léguées par le régime du président déchu". Abordant dans le détail les aspects sur lesquels son parti diverge avec la commission d'experts qui a élaboré le brouillon de la loi fondamentale, M. Saâdi a plaidé pour le rétablissement de la fonction de chef de gouvernement, avec un Exécutif qui sera l'émanation de la majorité parlementaire. Il a également plaidé pour le renforcement des pouvoirs du Parlement, avec, en sus, la suppression du Conseil de la nation, au motif que les conditions qui ont présidé à sa création ne sont plus d'actualité.