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"Construire ensemble une nouvelle culture de l'eau"
Arezki Berraki, ministre des Ressources en eau
Publié dans Liberté le 19 - 07 - 2020

À la tête des Ressources en eau depuis six mois, Arezki Berraki fait le point sur la situation hydrique. "Les changements climatiques impactent sévèrement notre pays depuis de longues années et les incidences sur notre potentiel hydrique sont prégnantes", assure-t-il.
Liberté : Vous êtes à la tête du département des Ressources en eau depuis quelques mois. Dans quel état est le secteur ?
Arezki Berraki : Cela fait, certes, seulement six mois que je suis à la tête du secteur des ressources en eau, mais permettez-moi quand même de préciser que j'ai fait l'essentiel de mon parcours professionnel au sein de l'Agence nationale des barrages et transferts (ANBT), en tant qu'ingénieur de base, puis comme responsable, et enfin, comme directeur général. Comme vous pouvez le constater, j'ai fait mes classes dans un organisme névralgique dans la collecte et la fourniture d'eau aux Algériens. Maintenant, pour en revenir à votre question, et s'il faut résumer en une phrase la situation du secteur, je dirais que nous sommes dans une phase où il faut faire beaucoup plus, et surtout beaucoup mieux, avec moins de moyens, surtout financiers.
Les Ressources en eau souffrent de plusieurs handicaps qui ne datent pas d'hier, ni d'avant-hier. Je rappelle, par exemple, que nous sommes classés 29e parmi les pays les plus touchés sur le plan hydrique par le réchauffement climatique. Evidemment, cela a rendu nos modèles d'évaluation hydrologique, qui datent des années 70 et 80, complètement obsolètes ! Un autre facteur crucial, l'évolution démographique et urbanistique fait que le maintien du service public à son niveau actuel constitue un défi, voire une gageure.
Le pays n'est pas integralemet couvert en matière d'alimentation en eau...
Statistiquement parlant, la distribution de l'eau potable est assurée aujourd'hui dans 75% de nos communes, il reste toutefois 27 wilayas dont la situation est fragile, ainsi qu'un nombre inacceptable de zones d'ombre qu'il faudra prendre en charge au plus vite. C'est le minimum que nous puissions faire. Mais, d'un autre côté, il ne faut pas non plus oublier qu'il y a beaucoup de gaspillage d'eau en Algérie.
C'est hélas une triste réalité qu'une ressource si précieuse et si difficile d'accès pour les uns soit si facilement gaspillée par d'autres. L'heure est plus que jamais à la prise de conscience et à la solidarité car, ce qui est économisé à un endroit peut être acheminé vers un autre avec une difficulté plus ou moins grande. Nous travaillons d'ailleurs à renforcer l'interconnectivité de nos réseaux de transfert. Enfin, le secteur des ressources en eau, à l'instar de beaucoup d'autres secteurs, vit une situation particulière à cause de l'épidémie de Covid-19. Les femmes et les hommes de notre secteur sont conscients de la grande responsabilité qui leur incombe, ils ont œuvré durant les derniers mois et continuent à le faire, à assurer une alimentation en eau la plus régulière possible et ce, bien que plus de 50% des employés aient été contraints à l'inactivité (ils ont repris depuis peu), et malgré une hausse de la consommation domestique de l'ordre de 10%, toujours pour cause de Covid-19.
Nous sommes en pleine saison estivale, avons-nous les capacités d'éviter des robinets à sec cet été ?
Je comprends que les citoyens soient contrariés, le mot est faible, à cause des coupures d'eau, surtout en été. Mais en même temps, il est nécessaire de regarder les choses avec objectivité et lucidité : d'abord, de quoi dépend une alimentation en eau continue ? Elle dépend, vous le savez bien, de la mobilisation de la ressource. Sur ce plan et malgré un début de saison pas très encourageant vu la faible pluviométrie enregistrée dans différentes régions du pays, nous avons des réserves qui nous permettrons d'atteindre la fin de l'année sans rupture.
Donc, sur ce plan, nous sommes rassurés et c'est ce qui m'a poussé à déclarer plus d'une fois que nous avons de quoi passer un été sans crainte. Mais l'eau au robinet ne dépend pas que de la mobilisation, elle dépend encore plus des réseaux et des équipements de traitement et de distribution. Maintenant, il faut poser la question de leur état et de leur capacité à fonctionner sans interruption. Il faut savoir que la plupart de nos conduites, surtout les plus anciennes, sont dans un état de grande fragilité, qui les expose à des cassures, tantôt à cause de la pression, tantôt à des actes malveillants.
Toutes les ruptures d'approvisionnement surviennent en raison d'incidents techniques imprévus. Aucune coupure volontaire, je tiens à le souligner avec force, n'a eu lieu depuis le début de l'été. Nous sommes donc devant une réalité structurelle qui rend les coupures imprévisibles et inévitables. Face à cette réalité que devons-nous faire ? Nous avons privilégié l'écoute et la veille, afin que toutes les interruptions soient immédiatement signalées aux équipes d'intervention, et le rétablissement de l'alimentation en eau potable ne dépasse pas les 24 heures en moyenne, sauf complications.
De nombreux foyers dans différentes régions du pays sont privés d'eau en cette période d'été. Pourquoi cette récurrente pénurie ?
Ces ruptures sont souvent dues aux incidents techniques et, dans de nombreux cas, la vétusté des réseaux en constitue la raison principale. Les raccordements illicites sont aussi à l'origine des casses et des fuites d'eau qui pénalisent souvent les populations. Malgré cela, à ce jour, nous avons dû faire face à environ 500 incidents majeurs, 50% en moins que l'année 2019, ce qui dénote une amélioration sensible de la situation. Un effort considérable accompli par les gestionnaires.
D'évidence, il demeure que la situation est toujours fragile et vulnérable. Elle mérite d'être améliorée sans cesse dans un avenir proche, et nous y travaillons d'arrache-pied. Aucune coupure n'a été volontaire ; celles enregistrées sont causées par des incidents techniques qui ont nécessité des travaux de réparation parfois lourds mais souvent dans des délais très courts. Je saisis cette opportunité pour nous excuser auprès de nos concitoyens des désagréments causés par ces situations inconfortables.
Les ressources sont vulnérables et par-dessus tout, nous sommes un pays menacé par la sécheresse. Comment comptez-vous y faire face ?
Les changements climatiques impactent sévèrement notre pays depuis de longues années et les incidences sur notre potentiel hydrique sont prégnantes. Si nous ne regardons que les eaux superficielles, nous constaterons une baisse exponentielle des écoulements. Nous sommes passés de 6,5 milliards de m3 à la fin des années 70 à 5 milliards de m3 dans les années 80, pour descendre à 4 milliards de m3 dans les années 2000. Je tiens à préciser que le Groupe d'experts internationaux d'évaluation du climat (GIEC) ont classé la Méditerranée comme l'un des 25 hot-spots les plus impactés par les changements climatiques. Cette situation nous impose deux impératifs : préserver et valoriser nos ressources, et nous tourner davantage vers les sources pérennes. Aujourd'hui, nous disposons de 11 stations de dessalement d'une capacité quotidienne de 2,1 millions de m3 par jour.
Quatre autres stations sont programmées pour le centre et l'est du pays, avec une capacité additionnelle de 600 000 m3 par jour, ce qui portera notre capacité globale de dessalement à 2,7 millions de m3 par jour, couvrant ainsi plus de 10 millions d'habitants. Notre objectif est d'alimenter tout le nord du pays par le dessalement. Seulement, si le m3 d'eau superficielle coûte à l'Etat 50 DA (pour être finalement cédé à 12 DA), le m3 d'eau provenant du dessalement revient à plus de 80 DA. Cela nous amène à l'autre facteur incontournable dans notre adaptation face aux changements climatiques : la lutte contre le gaspillage. Nous devons tous comprendre qu'au-delà de la question morale du gaspillage d'eau, nous faisons perdre au Trésor public des sommes faramineuses qui pourraient servir à soulager les populations en difficulté et à améliorer le service public pour tous les Algériens.
Ces solutions exigent des réformes et des initiatives pour y aboutir. Comment comptez-vous vous y prendre ?
Dans des situations pareilles, il convient de prendre de la hauteur. Il faut s'occuper des urgences, certes, mais ne pas les laisser nous dicter le chemin à prendre. Durant les 20 dernières années, 136 milliards de dinars ont été dépensés dans des programmes complémentaires et d'urgence qui, de par leur nature et dans leur conduite, ont parfois engendré surcoûts, malfaçons et dépassements. Même s'ils apportent une réponse conjoncturelle, ils n'auront jamais réglé les problèmes à la source, et chaque année, les mêmes insuffisances reviennent et nous font perdre des ressources financières précieuses et de plus en plus difficiles à mobiliser. Un choix s'imposait : nous avons fait celui de définir un cap à l'horizon 2030, qui nous autorise à gérer nos urgences tout en nous donnant les moyens d'élargir notre vision et de pérenniser l'effet de nos efforts.
C'est pour cette raison que j'ai tenu à entreprendre un chantier décisif pour doter le secteur des ressources en eau de ce dont il avait le plus besoin : une stratégie. C'est un projet dont j'avais déjà ressenti l'urgente nécessité quand j'étais à la tête de l'ANBT : tous les gestionnaires savent à quel point il est difficile de travailler sans orientation stratégique. Ainsi, peu de temps après ma nomination à la tête du ministère, je me suis impliqué personnellement dans un diagnostic en profondeur qui a abouti à une démarche stratégique en 10 leviers.
Cette stratégie a pour finalité de préparer notre pays à des enjeux importants et inévitables tels que le réchauffement climatique, l'évolution démographique et urbanistique, la viabilité du modèle économique du secteur, la nécessité d'accompagner les autres secteurs, avec en tête l'industrie et l'agriculture..., elle a été pensée en intégrant l'importance de valoriser la ressource humaine, de maîtriser les nouvelles connaissances et technologies, de respecter l'environnement et les écosystèmes. Nous voulons réduire notre dépendance aux ressources instables et irrégulières et favoriser les eaux non conventionnelles, comme celles issues du dessalement et de l'épuration. Mais aucune stratégie ne peut atteindre ces objectifs sans le concours des usagers avec lesquels nous envisageons de construire ensemble une nouvelle culture de l'eau.
D'aucuns s'interrogent sur les tarifs de l'eau. Vont-ils être revus à la hausse et pourquoi ?
L'Etat algérien est un état social, c'est son ADN et c'est sur cette base que ses missions sont définies. Le secteur des ressources en eau ne fait pas exception dans cette orientation et la subvention du prix de l'eau fait partie des différentes formes de transferts sociaux envers les citoyens. Cela dit, tout le monde s'accorde à dire que la quasi-gratuité de l'eau en Algérie constitue la principale cause de son gaspillage. Devons-nous continuer éternellement sur la voie actuelle où l'argent du peuple part inutilement dans les canalisations ? Un jour ou l'autre, nous serons contraints d'adopter un prix plus équitable et plus rationnel de l'eau.
Si pour la consommation humaine, elle devra continuer à être soutenue, ce n'est pas le cas pour les autres usages de l'eau, où elle devra être considérée pour ce qu'elle est : un produit économique. Revoir le tarif de l'eau ne se fera pas en dehors d'une vision globale et intersectorielle, et il ne pourra pas être envisagé avant une amélioration substantielle du service public de l'eau et un accès généralisé et sécurisé pour tous les Algériens. Mais pour l'instant, ce sujet n'est pas à l'ordre du jour.


Entretien réalisé par : Mohamed Mouloudj


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